Le Cadre de réflexion et d’action sur le foncier au Sénégal (Crafs), regroupant le Cncr, Enda Pronat, Ipar, entre autres, invite le Président Macky Sall «à relancer le processus de réforme foncière et permettre son bon déroulement jusqu’à sa finalisation, conformément à la volonté qu’il a toujours affichée».
Le cadre de réflexion et d’action sur le foncier au Sénégal (Crafs) est préoccupé par la léthargie dans laquelle le processus de réforme foncière est plongé. Dans une déclaration lue devant la presse samedi, au siège du Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (Cncr), les responsables de cette plateforme regroupant le Cncr, Enda Pronat, Ipar, entre autres, ont relevé que «par décret du 16 mai 2017, soit un peu plus d’un mois après la remise de ses conclusions, la Cnrf (Commission nationale de réforme foncière) a été dissoute, plongeant ainsi le processus dans une incertitude profonde alors que les problèmes de gouvernance foncière qui avaient rendu nécessaire la réforme sont toujours d’actualité». Les conclusions de la Cnrf, rappellent-ils, ont fait l’objet d’un partage avec l’ensemble des parties prenantes le 17 octobre 2016 et remises officiellement au président de la République le 7 avril 2017.
Mais selon Macky Sall, certaines propositions faites par cette commission que dirigeait le Pr Moustapha Sourang ne rencontrent pas son assentiment. Le chef de l’Etat qui s’exprimait à l’occasion du 13e Conseil présidentiel sur l’investissement avait souligné que les conclusions ne sont pas acceptables, en faisant référence notamment au transfert du droit de bail aux collectivités locales. «Si je le fais, dans le mois qui suit, il n’y aura plus une seule terre au Sénégal. Je ne vais pas prendre la responsabilité de transférer la gestion des terres aux collectivités locales. Je ne le ferai pas», avait dit le président de la République.
A ce propos, précise la secrétaire exécutive d’Enda Pronat, «si on lit intégralement le document de politique foncière de la Cnrf, on ne peut pas dire qu’on donne aux collectivités locales l’entier pouvoir de gérer les terres. Le document ne dit pas ça». D’après Mme Mariam Sow, «le document demande à ce qu’on garde l’esprit de la loi sur le domaine national pour ne pas aller vers la marchandisation des terres. Le document propose la mise en place d’un contrôle citoyen, en mettant sur pied des comités reconnus juridiquement. Ça, c’est dans la législation. Le document dit aussi qu’il faut arriver à reconnaître juridiquement les outils de gouvernance élaborés par les communautés locales, donc de reconnaître les savoir-faire locaux que les populations ont mis en place tels que les Plans d’occupation des sols (Pos), les conventions locales en matière de gestion des ressources. Bref, le document parle de gouvernance locale partagée». Par conséquent, jugent Mme Sow et ses collègues, «le processus en cours doit continuer». Ainsi invite-t-elle le chef de l’Etat à «reprendre ce document et le lire attentivement afin de relancer le processus de réforme foncière et permettre son bon déroulement jusqu’à sa finalisation, conformément à la volonté qu’il a toujours affichée».
Evaluer les impacts des lois relatives aux Zes
Embouchant la même trompette, Babacar Diop du Cncr demande au Président Sall de «maintenir le même principe d’inclusion et de participation de l’ensemble des parties prenantes dans la phase de transformation des conclusions du document de politique en actes législatifs et réglementaires, mais aussi d’évaluer les nouvelles lois comme celles relatives aux Zones économiques spéciales (Zes) sur la gouvernance foncière inclusive et sur le processus de décentralisation au Sénégal, et prendre les mesures correctives nécessaires». En effet, souligne le Crafs, «l’application stricte des nouvelles lois liées au foncier comme la Loi n°2017-06 du 6 janvier 2017, portant sur les Zes qui n’a pas fait l’objet de concertation dans le cadre du processus de réforme, pourrait être une source de conflits fonciers au niveau des zones ciblées».
Ces organisations de la société civile se félicitent tout de même «de la décision prise par le président de la République de procéder à l’arrêt du projet d’agrobusiness à Dodel, montrant ainsi sa disponibilité à prêter une oreille attentive et à répondre aux préoccupations des populations rurales dont les terres demeurent le moyen principal de vie et de survie».
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