Pour les employés de la Compagnie sucrière du Sénégal (Css), les années se suivent et se ressemblent. En pire. Il y a quelques jours, ils ont espéré le meilleur, après le passage du Président Macky Sall, en campagne électorale dans leur ville. Ce dernier, devant une foule très enthousiaste, avait déclaré qu’il ferait «tout pour aider la Compagnie sucrière sénégalaise, créatrice d’emploi à Richard Toll et dans le Walo, à augmenter ses capacités de production».
Mais, près de dix jours après, les syndicats d’entreprise de la Css se disent que cette aide éventuelle dont parlait le chef de l’Etat, si elle devait un jour venir, trouverait leur société la clef sous le paillasson.
Le pire est que la situation est connue de tous, car les maux de la Css sont les mêmes depuis bientôt 4 ans. C’est une mévente due à l’entrée massive de sucre de contrebande dans le pays, écoulé à vil prix par des personnes qui ne méritent même pas le terme de commerçants, parce qu’elles ne s’acquittent pas des droits et autres taxes leur permettant d’opérer une concurrence équitable.
A ce jour, le stock d’invendus de la Css a atteint 40 000 tonnes, pour une production de 50 mille tonnes au cours de cette campagne. Il est évident dans ces conditions que la société continue de produire, si elle ne parvient pas à vendre. D’autant plus qu’il lui est difficile de régler ses fournisseurs, et de faire face à ses charges, dont notamment ses salaires.
Normal donc, que les représentants du personnel décident de tirer la sonnette d’alarme, parce qu’ils sentent que c’est leur outil de production qui est menacé. Ils envisagent, dans les jours très proches, de venir à Dakar, organiser une grande marche de protestation des près des 8000 travailleurs et leurs familles. Ou alors, organiser une grande journée Ville morte à Richard Toll. L’essentiel étant de sensibiliser les autorités sur la situation catastrophique qui, cette fois, risque de conduire à l’arrêt total de la plus grande industrie agro-alimentaire du pays. La décision sera prise aujourd’hui, au cours d’une Ag des travailleurs à Richard Toll.
Les syndicalistes rappellent que si le ministre du Commerce avait promis qu’il n’y aurait plus de Dipa à la fin de décembre de l’année dernière, il n’avait pas dit que des milliers de tonnes de sucre étaient déjà entrées dans le pays. «Stockées dans des ports secs en ville, ou même dans des entrepôts au port, ces quantités de sucre commencent à sortir au vu et au su de tout le monde, sans qu’aucune autorité ne s’en inquiète. Tous ceux qui sont interpellés prétendent que la période électorale est peu propice à une action décisive. Or, la société a besoin d’une action rapide».
Il est évident que le propriétaire de l’entreprise ne va pas continuer à injecter de l’argent pour maintenir à flots une société qui ne rapporte plus. Or, dans les conditions actuelles de mévente, même les banques hésitent à accorder des prêts à la société, car elles sont dans l’incertitude sur son avenir. Le temps que les politiciens se réveillent, ils seront sans doute obligés de chercher des solutions pour relancer une entreprise que leur cupidité et leur incompétence auront mis à genoux, freinant du même coup le dynamisme économique de la région du Nord.
mgueye@lequotidien.sn
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