«Le pouvoir est au bout du fusil», disait Mao Zedong. Au Mali, le pouvoir de sauver le Mali de la disparition comme l’Urss, ou du démembrement comme le Soudan, ou bien de la partition comme l’Ethiopie, est au bout du fusil. Mais pas d’un fusil français, russe ou américain, mais au bout d’un fusil de l’Armée malienne. Le chef des mutins a bien raison de dire que «le Mali n’a plus droit à l’erreur». C’est pourquoi le Mali devrait se garder de changer ou de trouver un nouveau baby-sitter militaire, fut-il français ou russe. La survie du Mali est au bout du fusil de l’Armée malienne ou d’un accord avec les sécessionnistes qui ne négocieront sérieusement que quand le rapport des forces aura changé. Les Russes, malgré toute leur puissance de feu, ont échoué en Afghanistan, car l’Armée communiste d’Afghanistan n’existait que de nom et il a fallu qu’ils se substituent à l’Armée afghane pour faire la guerre à sa place. Par contre, les Russes ont réussi en Syrie parce qu’ils sont venus en «complément d’effectifs» d’une Armée syrienne qui était sur le terrain et qui se battait. En Syrie, les Russes sont venus en appoint à une Armée syrienne (majoritairement composée de la minorité alouite), qui se battait donc pour sa survie. Les Maliens doivent comprendre que la France ou la Russie ne peuvent être que des variables et que la constante doit être l’Armée malienne. La bataille de la survie du Mali est avant tout celle et de l’Armée du Mali et du Mali, qui doit comprendre qu’aucune force expéditionnaire ne peut sauver un pays. Les Américains en ont eu l’amère expérience au Vietnam et les Russes en Afghanistan. La France est en train de le découvrir au Mali, car la vocation d’une force expéditionnaire est de se retirer un jour. Une telle force doit servir à créer un rapport des forces qui permet à un des belligérants autochtones de s’imposer et de stabiliser la situation comme c’est le cas en Syrie. Si l’Armée du pays n’est pas à la hauteur, la force expéditionnaire peut rester 20 ans comme les Américains en Afghanistan. Cela ne sert à rien, car le jour où la force part avec son parapluie militaire, la digue cède et le pouvoir est balayé. Au Mali, les jihadistes ont la même stratégie que les talibans, et le même allié : le temps. Najibullah d’Afghanistan a été dégagé dès le départ des Russes, l’actuel régime de Kaboul le sera dès que les Américains partiront, sauf s’il trouve un accord avec les talibans. Le Vietnam du Sud a été emporté dès que le dernier hélicoptère américain a quitté Saigon. Si le coup d’Etat contre l’immobilisme de IBK, qui menait le Mali vers une mort lente, permet d’en tirer les leçons, il n’aura pas été vain. Avec le coup d’Etat du 18 brumaire, Napoléon fit sortir de la scène politique des élus par la force des baïonnettes, afin de mettre un terme aux excès et désordres de la Révolution. Le coup d’Etat du 18 août, par la force des baïonnettes, va soit freiner le processus de désintégration du Mali ou au contraire l’accélérer si les mutins ne sont pas à la hauteur de leur tâche historique, car le Mali n’a plus droit à l’erreur. Les mutins doivent avant tout être comme les témoins de Jéhovah, en disant aux Maliens : «Réveillez-vous !» Au lieu de fermer les yeux pour vivre en permanence dans notre grandeur passée, ouvrons les yeux et arrêtons de rêver, car la survie du pays ne dépend pas de la France ou de la Russie, mais de notre capacité à le défendre !
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