La majorité parlementaire est allée à l’encontre du souhait de l’opposition relatif à une convocation des ministres concernés par la gestion des inondations. Il y a 10 ans, le régime de Wade avait accepté, pour les mêmes causes que deux ministres fassent le déplacement devant la représentation nationale dans le cadre d’une séance d’explications.

A l’épreuve de la rupture chantée urbi et orbi, les actes trahissent. L’Assemblée nationale a rejeté la question orale introduite par le Groupe parlementaire Liberté et démocratie (opposition), demandant la convocation des ministres concernés par la gestion des inondations. A la place, le Bureau de l’Hémicycle a décidé de mettre en place une mission d’information composée d’une quinzaine de députés pour s’imprégner de la question. Bien sûr, la 11ème Législature a porté ce projet funeste du ticket présidentiel qui permettait à un candidat de gagner une élection présidentielle avec plus de 25%. Mais l’Assemblée nationale sous le régime de Wade a attrait plusieurs fois des membres du gouvernement pour s’expliquer de­vant la représentation nationale.
Juillet 2010, les députés sont en vacances alors que la banlieue dakaroise patauge dans les eaux. L’Assemblée nationale décide de convoquer une session extraordinaire. Plus de 10 ans après, dans les mêmes circonstances, la majorité rechigne à accorder une suite favorable à cet exercice démocratique de transparence. A l’époque, Oumar Sarr, ministre d’Etat ministre de l’Urbanisme, de l’habitat, de l’hydraulique et de l’assainissement et Bécaye Diop, ministre d’Etat et ministre de l’Intérieur ont été sommés de s’expliquer. Doudou Wade et ses collègues de la majorité ne se sont pas opposés à la question orale introduite par Me El Hadji Diouf, président de la Commission de l’urbanisme, de l’habitat, des infrastructures et des transports.

Oumar Sarr est convoqué à l’Assemblée au 3ème jour du
décès de sa mère
«Mettre une Mission d’information, ce n’est pas bon. Les ministres concernés devaient venir devant la Représentation nationale pour s’expliquer. Ce sont eux qui détiennent les informations. Ce sont eux qui exécutent les projets, connaissent les sommes dépensées, etc. Il y a des députés qui sont issus de localités où sévissent les inondations. Ils seront capables d’apporter la contradiction aux ministres si ces derniers ne disent pas la vérité», a estimé Me El Hadji Diouf, député des 11ème et 12ème Législatures au téléphone. Ce vendredi 23 juillet 2010, Oumar Sarr est au 3ème jour après le décès de sa mère mais a calmé son chagrin pour se présenter devant l’Assemblée nationale avec son collègue Bécaye Diop. A l’époque, malgré la demande de l’imam Mbaye Niang, les travaux n’ont même pas été interrompus pour la prière du vendredi.
Poussés dans leurs derniers retranchements par les députés de l’opposition comme Me Ndèye Fatou Touré ou Cheikh Bamba Dièye, les ministres avaient apporté des explications sur la gestion du Plan Orsec et du Plan Jaxaay. «Le Plan Orsec n’est pas le solution définitive pour la fin des inondations dans certains quartiers de Dakar. Pour y arriver, il faut que les populations quittent les réservoirs naturels afin de permettre le drainage des eaux», avait répondu entre autres, Bécaye Diop, ministre de l’Intérieur. Oumar Sarr s’était surtout occupé de la mise en œuvre du recasement des sinistrés. L’actuelle législature, à l’image de la précédente, s’est montrée peu favorable à fouiller la gestion du gouvernement alors que l’Assemblée nationale a pour mission fondamentale de contrôler l’action du gouvernement. La députée Aïda Mbodj n’avait-elle demandé à l’Assemblée nationale d’auditionner le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, et le ministre du Développement communautaire, Mansour Faye, sur la gestion du Covid-19 ? A la place, elle aura reçu des menaces de mort !
A son crédit, la majorité parlementaire Benno bokk yaakaar avait instauré la session mensuelle des questions d’actualité. Mais l’exercice était faussé dans le format où les ministres reçoivent d’abord les questions avant de faire le déplacement à l’Assemblée nationale. D’ail­leurs, cette séance n’a plus été or­ga­nisée depuis mars 2018 (explication de la réforme sur le parrainage)! En outre, depuis 2012, seule une commission d’enquête parlementaire a vu le jour. Elle concernait l’affaire des 94 milliards opposant le député Ousmane Sonko à Mamour Diallo, ex-directeur des Domai­nes, finalement blanchi. Pour­tant, les sujets à polémique sont légion depuis 8 ans. Les 200 milliards supposés recouvrés dans la traque des biens mal acquis, le dossier sur le pétrole et le gaz, l’affaire Necotrans, l’affaire Arcelor Mittal, le Plan décennal de gestion des inondations, la gestion du Prodac, du Coud, de la Poste…