Plusieurs législations de par le monde empêchent le développement des produits alternatifs à la cigarette. Or, les contraintes n’ont jamais réduit le nombre de fumeurs, et les conséquences sur la santé publique sont énormes. Des experts ont démontré ce mercredi qu’une meilleure information des citoyens permettait de faire des choix éclairés et de développer une meilleure santé, positive pour les pays.

Par Mohamed GUEYE
La question des alternatives au tabac et à ses méfaits était ce mercredi au centre d’une discussion virtuelle, organisée par une organisation non gouvernementale située en Grande Bretagne et dénommée, en anglais, «Know­ledge-action-change». Les débats, répartis en trois sessions d’environ 2 heures de temps chacune, tournaient autour de la thématique de faire en sorte que les décideurs puissent permettre aux citoyens, à savoir les fumeurs, leur entourage et l’opinion publique de manière générale, de s’informer sur les moyens d’abandonner le tabac, pour des solutions moins dangereuses pour la santé. Lesdites solutions sont en train d’être développées, et des experts et des scientifiques renommés assurent qu’elles donnent des résultats tangibles. Mais hier, certains des orateurs ont fait ressortir le fait que des facteurs de blocage existent de par le monde, qui sont le fait d’organisations parfois bien établies, comme l’Organisation mondiale de la santé (Oms), ou des fondations américaines ayant pignon sur rue, comme la Bill & Melinda Gates Foun­dation, ou celle du milliardaire Bloomberg.
Mme Fiona Patten, experte médicale australienne ayant longtemps collaboré avec l’Oms avant de démissionner, a indiqué que, sous le prétexte de protéger les jeunes générations des risques liés au tabac, l’Oms n’a jamais voulu communiquer autour des produits permettant de se passer de la cigarette, comme le tabac chauffé, dont une version a dernièrement été approuvée par le Food and drug administration américain (Fda). Les fondations Gates et Bloom­berg de leur côté, se voient reprocher de mettre en place des stratégies pour criminaliser la consommation et la publicité sur le tabac. Et comme l’Oms, elles ne veulent pas entendre parler d’alternatives permettant de consommer la nicotine sans brûler le goudron qui, signalons-le, est l’élément cancérigène du tabac.

Situation en Afrique
Pour les pays en voie de développement comme ceux d’Afrique, d’autres contraintes s’ajoutent à celles signalées plus haut. Alors que le nombre de fumeurs augmente parmi la jeunesse, les pays sont privés des moyens d’accéder aux produits alternatifs, ou même à une information à leur sujet. Un spécialiste du Malawi, Dr Chimwemwe, a attiré l’attention sur ce paradoxe de santé publique. Il a noté que «les pays africains comme d’autres, sont déjà imprégnés des principes d’atténuation des risques pour la santé publique. C’est pour cela qu’il existe la Trithérapie pour lutter contre le Hiv, ou le Code de la route pour éviter des accidents de la route. Mais quand on parle de tabac et de ses méfaits, la situation devient compliquée».
Il a déploré que la guerre contre le tabac soit devenue une guerre contre la nicotine. Or, si ce produit est celui qui crée l’accoutumance chez le consommateur de tabac, il n’est pas responsable des cancers, qui eux, sont le fait du goudron qui est dégagé par le tabac brûlé. «Or, le tabac chauffé évite justement ce genre de problème», assure-t-il. Malheureu­se­ment, dans les pays africains, le manque d’information adéquat fait que ces produits alternatifs au tabac, sont soit interdits au même titre que la cigarette, comme en Gambie, ou fortement taxés, ce qui les rend prohibitifs pour les consommateurs moyens, comme au Kenya. Ou alors, il y a un flou législatif à leur égard, qui ne bénéficie qu’au marché noir, comme en Tanzanie. Malheu­reu­sement, l’expert n’avait pas de données concernant les pays francophones au sud du Sahara. Néanmoins, les contraintes listées ont pour conséquence que les fumeurs en Afrique, n’ont pas encore d’autre choix que de continuer à fumer, et à exposer leur santé et celle de leurs proches, alors que des solutions existent pour les soulager.

La voix des citoyens
Cette situation a poussé un autre intervenant, Martin Cullip, situé en Angleterre, à pousser un cri du cœur, pour s’offusquer de ce que les décisions de santé publique concernant la consommation des produits alternatifs au tabac, n’ont jamais tenté d’impliquer les consommateurs. Or, a-t-il indiqué, il y a près d’un milliard de fumeurs de par le monde, dont 98 millions utilisent déjà des produits alternatifs à la cigarette, comme le tabac chauffé ou le vapotage. Il trouve choquant que leur avis n’ait pas été sollicité, pour une affaire dans laquelle leur santé est mise en balance. Pour lui, tout devrait être mis en œuvre pour modifier le rapport des forces et permettre de faire entendre la voix des consommateurs. Ce qui permettrait fortement de réduire le nombre de morts dus aux effets de la cigarette.