Absence de chiffres fiables : Le secteur pêche dans l’informel

Les données se bousculent, mais les protagonistes ne se mettent pas d’accord sur les bons chiffres. Même sur le nombre de personnes vivant directement ou indirectement de la pêche, on note des désaccords certains ; d’où la nécessité pour l’Etat de jouer le jeu de la transparence dans les accords qu’il passe, assurent certains.
Officiellement, le secteur de la pêche emploie 600 mille personnes. Mais ces chiffres datent de 1981, d’après Gaoussou Guèye, président de l’Association pour la promotion et la responsabilisation des acteurs de la pêche artisanale maritime (Aprapam). Aujourd’hui, ni l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) ni le ministère des Pêches et de l’économie maritime ne peuvent informer sur le nombre de personnes qui s’activent dans ce milieu. Avec le problème des licences de pêche, personne ne connaît le nombre de bateaux qui naviguent dans les eaux sénégalaises. Au niveau de la pêche artisanale, le ministère n’a pas évalué le nombre de pirogues et les permis de pêche délivrés. Les accords de pêche ne sont pas publiés et il aura fallu que le Parlement européen ratifie le texte pour que l’on connaisse le contenu de l’accord de partenariat entre l’Union européenne et le Sénégal. Quid des navires industriels qui naviguent sur les 700 kilomètres de côtes du Sénégal, qui s’étendent du Nord au Sud du pays le long de l’océan Atlantique. Pour plus de transparence et de disponibilité dans le secteur, le Sénégal est appelé à entrer dans les standards Fiti.
Paroles aux acteurs Marième Mbengue Thiaw, vendeuse de poisson à Yoff Tonghor : «Je comprends les gens qui tentent l’aventure pour aller en Espagne»
«Les bateaux sont responsables du manque de poisson dans la pêche artisanale. Ce que nos fils doivent pêcher est pris par ces bateaux. Ils reviennent en amenant un à 2 poissons par jour. Ils amenaient beaucoup de poulpes, mais aujourd’hui on n’en voit presque plus. Mon fils est allé hier et aujourd’hui, mais n’a rien ramené. Nous demandons de l’aide. Je connais des gens qui paient 500 mille pour tenter d’aller en Espagne par la mer. Ils sont désemparés. Je les comprends. Ils reviennent de la pêche sans même avoir de quoi payer l’essence pour leur moteur. La nuit, on voit les bateaux à côté de l’île. Ils prennent tout.»
Thierno Mbengue, président des mareyeurs du Sénégal : «Les pêcheurs sont responsables des maux de la mer et non l’Etat»
«Les pêcheurs sont responsables des maux de la mer et non pas l’Etat. Quand on dit que la pêche au filet est néfaste pour la mer, l’utiliser est une forme de pêche illégale. Les poissons nouveau-nés ne doivent pas être pêchés. Des pêcheurs refusent de se conformer à la règle sur le repos biologique. Les mareyeurs chargent leurs véhicules en poissons et vendent tout d’un seul coup. Après, s’il y a rareté du poisson, on ne verra rien parce qu’on n’a pas prévu ce cas de figure. L’Etat a bon dos. Ces gens qui accusent n’ont pas de preuves. Ils ne sont pas plus patriotes que les membres du régime en place. Les acteurs doivent se regarder dans un miroir.»