«Les propos d’aujourd’hui ne sont graves que parce qu’ils ont été installés depuis longtemps. Voilà quelques années que l’identité est devenue une obsession. Ce sont parfois les défenseurs de l’identité de la France qui lui font le plus grand mal en la rendant tellement restrictive, crispée, inquiète», dénonce-t-elle. Dans un entretien publié sur le site du magazine français Le Point, l’auteure estime que «la France n’a pourtant aucune raison de s’inquiéter car partout dans le monde, les gens parlent de la France avec tant d’amour». «Comment peut-on habiter un si beau pays et être si pessimiste, vouloir s’enfermer alors que la France a toujours voulu disperser ses valeurs d’une manière universelle», s’interroge la native de l’île de Niodior, dans le delta du Sa­loum.
Fatou Diome, naturalisée française, dit qu’elle a choisi de rester en France par «choix» et par «amour». «Rien ne m’oblige à rester en France, je suis parfaitement libre d’aller travailler ailleurs. Je vis dans ce pays parce que je l’aime ; c’est une libre décision», se défend l’écrivaine. «On ne m’a pas donné la nationalité à titre provisoire mais vraiment de manière sincère. Cela signifie qu’on m’a donné le droit de m’exprimer en tant que citoyenne française», affirme l’auteur de Le ventre de l’Atlantique (2003), son premier roman qui lui a valu une reconnaissance internationale. A propos de Marianne porte plainte, titre de son dernier livre, Fatou Diome explique que «l’ironie est permise» en littérature.  «Ma­rianne porte plainte contre les diviseurs, contre ceux qui falsifient son histoire, son identité. Contre ceux qui ne veulent pas admettre la diversité de ses enfants. Contre ceux qui vont à l’encontre de sa devise nationale», s’insurge-t-elle. Elle ajoute : «Je suis de nationalité française, je suis donc une des enfants de Marianne, et je me donne le droit de dire que je ne suis pas d’accord.» «J’en appelle à toute personne qui se sentirait mal à l’aise avec les propos qui m’ont révoltée ; que ceux qui partagent ma révolte viennent avec moi défendre ma mère adoptive Marianne», plaide l’écrivaine franco-sénégalaise.
Selon elle, «aller vers l’autre est toujours une fragilité. Pour aller vers l’autre, il faut accepter sa propre fragilité. Il faut accepter de se décentrer de soi, de relativiser sa culture».  «Dès lors, estime Fatou Diome, on ne peut plus mépriser l’autre. On se met alors en position de comprendre et d’apprendre. C’est là la fragilité, car on transmet ce qu’on sait et reçoit ce qu’on ne sait pas.» Fatou Diome est l’auteure de plusieurs recueils de nouvelles et de romans parmi lesquels La Préférence nationale, Les Loups de l’Atlantique, Kétala, Inassouvies, nos vies, Le Vieil Homme sur la barque, Celles qui attendent, Mauve, Impossible de grandir.
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