Émigration clandestine : Un passeur et 8 candidats arrêtés à Saint-Louis

Rien ne peut apparemment arrêter les convoyeurs de candidats à l’émigration clandestine. Quelques jours seulement après le tragique chavirement d’une pirogue avec un lourd bilan d’un mort et 43 disparus, le Commissariat central de Saint-Louis vient de déjouer une autre tentative. Les éléments du commissaire Mamadou Tendeng ont alpagué hier 9 personnes dont un passeur et 8 passagers.Par Cheikh NDIONGUE(Correspondant)
– La détermination reste de mise chez les passeurs de candidats à l’émigration clandestine, malgré la vigilance des Forces de l’ordre. A Saint-Louis, ces passeurs sont en effet tenaces pour avoir continué à planifier leurs forfaits, malgré le terrible naufrage de la semaine dernière qui avait fini de plonger de nombreuses familles de la Vieille ville dans l’émoi et la consternation. Cet accident tragique avait fait 1 mort et 43 disparus considérés comme morts, leurs corps n’ayant pas été retrouvés.
Malgré tout le bruit que cela avait fait, d’autres personnes, mues par des intérêts personnels et attirées par l’appétit du gain facile, ont encore essayé de convoyer d’autres jeunes en Espagne. Mais c’était sans compter avec la vigilance du Commissaire central de Saint-Louis, Mamadou Tendeng, qui avait depuis lors maintenu ses hommes en état d’alerte. Cette vigilance a fini par payer hier avec l’interpellation par les éléments du Commissariat central d’un jeune convoyeur âgé de 36 ans, né à Guet-Ndar, domicilié à Pikine Darou Salam, marié et père de deux enfants, qui tentait de faire voyager des candidats à l’émigration clandestine vers Nouadhibou, en République islamique de Mauritanie, où ils devaient embarquer pour l’Europe.
En plus de cette personne, la police a également interpellé 8 candidats à l’émigration clandestine présentement en garde à vue. Selon les premiers éléments de l’enquête, le convoyeur a confirmé que c’est à Nouadhibou que le départ vers l’Europe était prévu. Il a également confié aux enquêteurs que deux embarcations transportant 25 personnes ont quitté le même jour le quartier Hydrobase, un des quartiers de la Langue de Barbarie, à destination de Nouadhibou.
De nombreux départs prévus pour septembre
La police a relevé que d’après des renseignements concordants, de nombreux départs sont prévus pour septembre, notamment à l’approche du grand Magal de Touba. D’après les témoignages de plusieurs pêcheurs, la période allant de septembre à novembre est très propice aux voyages, car la mer est très calme. Chaque année, les passeurs mettent à profit cette période de l’année pour organiser des voyages vers l’Europe.
Face à la surveillance plus accrue des points de départ traditionnels, ils utilisent maintenant de nouvelles stratégies pour passer entre les mailles de la police. C’est ainsi qu’ils font recours parfois à des recruteurs qui en toute discrétion leur trouvent des candidats au voyage à Saint-Louis et dans d’autres localités du Sénégal. Ils les rassemblent ensuite à Saint-Louis avant de les embarquer.
Le quartier de Guet-Ndar a été le premier point de départ, mais à la suite de plusieurs arrestations d’organisateurs de voyage, ces derniers, pour échapper aux forces de sécurité, se sont déportés vers la localité de Gandiol, plus enclavée et plus difficile à surveiller.
Cette fois-ci, le passeur arrêté a usé de subterfuges en faisant voyager les jeunes migrants par petits groupes vers Nouadhibou, une ville portuaire de la Mauritanie très proche de l’Espagne, dans l’espoir non seulement d’échapper à la vigilance de la police, mais aussi certainement d’organiser des voyages plus faciles. Cette stratégie peut s’expliquer également par la récurrence des accidents ces derniers temps, avec de nombreuses pertes matérielles et en vies humaines.
Des aventuriers qui maîtrisent peu la voie maritime
Beaucoup de passeurs, des pêcheurs chevronnés pour la plupart, ont en effet tourné le dos à ce business, laissant ainsi la place à des aventuriers qui maîtrisent peu la voie maritime et qui parfois organisent des voyages fictifs en embarquant les jeunes pour les faire tourner en bourrique dans la mer avant de ramener les pirogues vers la côte. A plusieurs reprises, des migrants en détresse ont été sauvés sur les plages saint-louisiennes.
Par ailleurs, selon le témoignage d’un ancien capitaine de pirogue, avant les passeurs se payaient les services de capitaines bien capés qui recevaient entre 1 million et 1 million 500 mille francs Cfa pour conduire les pirogues à bon port. Ces derniers utilisaient de grandes pirogues adaptées qui pouvaient faire le voyage sans anicroche, alors que maintenant non seulement les capitaines sont inexpérimentés, mais utilisent de petites embarcations pas adaptées aux longs voyages et qui, en principe, ne peuvent contenir qu’environ 25 personnes pour y embarquer une soixantaine ou une centaine de personnes. Ce qui fait qu’elles chavirent très facilement en haute mer.
Les hautes autorités préoccupées
Aujourd’hui, la recrudescence du phénomène de l’émigration clandestine a pris des proportions très inquiétantes et préoccupe les autorités au plus haut niveau. Le phénomène qui fait débat, surtout dans les zones de passage, est pris en charge non seulement par les autorités administratives à travers les programmes initiés par l’Etat, mais aussi par des associations, des Ong et la coopération. Et surtout la police qui veille quotidiennement au grain pour tuer dans l’œuf toute tentative de départ, comme l’a indiqué le commissaire Mamadou Tendeng, patron de la Police centrale de Saint-Louis, qui a fait savoir que «la police est en alerte et met tout en œuvre pour empêcher tout départ à Saint-Louis».
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