Après le verdict de la Chambre criminelle, qui a condamné Ousmane Sonko à une peine ferme de 2 ans pour corruption de la jeunesse après qu’il l’a acquitté de viols et de menaces de mort, la capitale a été sens dessus dessous. Hier, Dakar a revêtu son plus sombre habit. Par Malick GAYE –

Tendu ! L’adjectif est sans doute proche de décrire la situation qui a prévalu au Sénégal, et particulièrement à Dakar. Bien que lavé des chefs d’accusation de viols et de menaces de mort, Sonko a été condamné à 2 ans de prison ferme pour corruption de la jeunesse. C’est cette sentence de la Chambre criminelle qui n’a pas été bien accueillie. Les jeunes manifestants encagoulés ont opté pour une guérilla urbaine.

Dans le département de Dakar, c’est à la Médina que les premiers heurts sont constatés. Des jeunes, aidés par une ambiance de ville morte, ont commencé à brûler des pneus et autres tables qui sont à leur portée sur la route. Le temps que les Forces de l’ordre se déploient, les jeunes disparaissent. Par moments, ils jettent des pierres pour empêcher les policiers d’avancer. Après la Médina, c’est l’université Chei­kh Anta Diop qui est entrée dans une manifestation violente. Grâce aux réseaux sociaux, les manifestations se généralisent. Puis le débit internet a été baissé pendant de longs mo­ments pour bloquer le fonctionnement des réseaux so­ciaux.

A la Cité Apecsy 2 de Yoff, des jeunes se sont regroupés derrière les murs du stade pour se préparer. Ils étaient une dizaine. Les gendarmes, qui sont en faction depuis plusieurs mois devant la Brioche Dorée et Auchan, ont été obligés d’avancer pour se retrouver a l’intersection. Les limiers y sont restés des heures durant. Malgré la détermination des manifestants, les policiers les ont empêchés d’avancer. Finale­ment, il a fallu l’intervention des notables du quartier pour dissuader les manifestants. Mais ce n’était que pour un temps. En effet, dans l’après-midi d’hier, ils sont revenus pour en découdre. Les gaz lacrymogènes ont eu raison de leur présence.

Malgré cette situation qui n’enchante personne et qui n’honore pas la démocratie, le point de non retour semble proche d’être atteint. Le parti Pastef, par un communiqué, a appelé les populations à «descendre dans la rue pour faire face aux dérives dictatoriales et sanguinaires du régime de Macky Sall jusqu’à son départ de la tête de l’Etat».

Pour sa part, Yewwi askan wi a dénoncé «une haute trahison» du président de la République. Elle a aussi appelé «à maintenir la mobilisation et à résister intensément conformément à la Constitution, partout dans le pays et dans la diaspora, pour sauvegarder les droits et libertés de nos concitoyens, l’unité nationale et la démocratie sénégalaise». Des propos qui ont eu un écho favorable. En effet, aux Parcelles Assainies, des manifestants ont pris pour cible un policier. Atteint par des projectiles, le limier est couché par terre. Ses collègues sont venus l’aider en essayant de le tirer, mais les pierres lancées en leur direction les ont obligés à l’abandonner. Le policier, visiblement inerte, a reçu une brique à la tête. Le plus inquiétant, la scène est filmée et est en train de faire le tour des réseaux sociaux. C’est désormais ça le Sénégal. Ce havre de paix dans une région en proie à des troubles ne sera plus que l’ombre de lui-même si cela continue.
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