La migration est un phénomène humain et historique devenu une préoccupation mondiale indissociable du développement des pays d’origine, d’accueil, en passant par les pays de transit. A l’heure où elle connaît des agissements et est placée au cœur du débat mondial et des enjeux géopolitiques et géostratégiques, la migration culturelle apparait comme un facteur d’intégration, de sociabilisation et de cohésion sociale. Babacar Dieng, artiste-percussionniste de Louga, par ailleurs manager du groupe «Sonidos de Africa» ou encore Sonorités africaines, l’a bien compris. Depuis plusieurs années, il promeut la destination Louga par la promotion d’échanges et d’expressions culturelles entre sa région et le reste du monde.
Immigré, originaire de Louga, Babacar Dieng est un artiste-percussionniste, manager du groupe Sonidos de Africa ou encore Sonorités africaines et président de la Fondation culturelle et sociale qui porte le même nom. Il est par ailleurs le représentant de la Fondation mémorial de Gorée au sein de la diaspora. En bon «Baye Fall», comme il se réclame, Babacar attache en queue de cheval ses dreadlocks que contient à peine sa tête. Yeux dissimulés discrètement derrière ses lunettes, il a bonne mine et respire l’assurance avec un petit sourire taquin quand il parle. D’emblée, il lance : «La culture aide beaucoup les immigrés africains, notamment sénégalais, à s’intégrer dans les communautés d’accueil à l’étranger.» C’est pourquoi, se convainc-t-il, «on ne doit et pour rien au monde perdre nos valeurs et notre culture». A l’en croire, en plus d’éveiller, la culture est un puissant instrument de dialogue entre les cultures et les peuples. Avec sa fondation, Babacar travaille beaucoup dans le social et le développement des expressions culturelles. Depuis plusieurs années, il développe à Louga, le tourisme social et culturel en faisant venir des citoyens du monde chez lui (Louga). Revenant sur son parcours migratoire, il explique : «J’ai quitté pour la première fois le Sénégal en 1989 pour me rendre en France. C’était pour participer à un festival francophone et celui d’Angoulême.» De retour au pays après deux ans passés en Europe, il repartira en 1991, sur invitation cette fois-ci, pour prendre part au Festival de Monastir, à Tunis. Avant de lancer sa fondation, en 1995 avec Diengoz, ils foulent le sol de l’Espagne où ils s’implantèrent avant d’enchainer avec des tournées dans toute l’Europe.
Quelques années plus tard, confie notre interlocuteur, «on a changé pour se produire de l’autre côté des Caraïbes». De retour à Louga, il a investi dans le tourisme (hôtel) car, selon lui, «on ne peut pas dissocier le tourisme de la culture. Les deux vont de pair». Cependant, son retour n’a pas été facile. A l’en croire, «il n’est pas facile d’investir chez soi» et pour cause, dira-t-il, «il y a d’un côté ceux qui te découragent, de l’autre côté la famille qui te met la pression pour repartir». En fin de compte, confesse-t-il, «c’est comme si tu n’étais plus du pays et que les gens veuillent te renvoyer».
Conscient du potentiel culturel du Sénégal, notamment de sa région, Louga, Babacar d’affirmer que «la culture n’est pas que chant et danse». Si elle est bien développée et organisée, elle peut, selon lui, «prévenir» l’émigration irrégulière d’une part, et d’autre part, être un vecteur efficace de communication et de sensibilisation. D’ailleurs, pour montrer l’importance de développer le tourisme culturel pour prévenir la migration irrégulière et accompagner le développement, il informe : «Nous rencontrons beaucoup de personnes, des organisations qui souhaitent venir en Afrique, notamment au Sénégal. Soit pour visiter, soit pour investir.» Suffisant pour M. Dieng de plaider pour que l’Etat améliore son offre touristique en développant le tourisme culturel comme créneau porteur. «Les Caraïbes abritent une forte concentration de populations afro-descendantes qui cherchent à renouer avec leur terre d’origine, la terre de leurs ancêtres. L’Etat pourrait faciliter cette connexion par exemple en mettant en place une desserte aérienne entre le Sénégal et les Caraïbes», plaide Babacar Dieng. En plus, il demande à ce que le gouvernement puisse accompagner les activités culturelles qu’il organise à l’étranger, car cela participe «à la valorisation de notre culture, mais aussi à la création d’opportunités pour le Sénégal».
Par ailleurs, selon l’Unesco, la diversité culturelle renvoie à la multiplicité des formes d’expression culturelle, des groupes et des sociétés. Ces expressions culturelles se transmettent au sein des groupes et sociétés, et entre eux, ainsi que de génération en génération. La diversité culturelle se manifeste non seulement dans les nombreuses formes à travers lesquelles le patrimoine culturel de l’humanité est exprimé, enrichi et transmis, mais aussi à travers divers modes de création, de production, de diffusion, de distribution et de jouissance artistique, quels que soient les technologies et moyens utilisés. Sachant que la migration des hommes et des peuples a toujours existé en Afrique et partout dans le monde. De tout temps, l’humain a senti le besoin de se déplacer vers des terres plus propices à la sécurité, au commerce, à l’extension du patrimoine, au tourisme, au confort, etc. Ban Ki-Moon, ancien Secrétaire général de l’Onu, explique que la migration est «l’expression de l’aspiration humaine à la dignité, la sécurité et un futur meilleur. Elle fait partie du tissu social, de notre construction en tant que famille humaine».
Réalisé par Pape Moussa DIALLO