Le Sénégal est atteint de macrocéphalie, avec une grosse tête qui est Dakar, concentrant la majorité de la population du Sénégal, et un corps frêle symbolisé par les régions de l’intérieur du Sénégal désertées par les populations. C’est ce que critique avec véhémence Alioune Tine en déplorant la concentration des infrastructures et ressources dans la capitale.Par Amadou MBODJI –
La centralisation excessive des infrastructures et des ressources à Dakar fait l’objet d’une critique sévère de la part de Alioune Tine. Personnalité influente dans le domaine des droits de l’Homme, ce dernier s’est exprimé sur la question. Selon le président du think tank Afrikajom Center, cette tendance va à l’encontre des principes de décentralisation et exacerbe les inégalités.
Qualifiant cette centralisation de «véritable aberration», M. Tine souligne que concentrer les services, les opportunités économiques et les investissements dans la capitale néglige les besoins des autres régions du pays. Plaidant pour une véritable décentralisation, il estime que cela permettrait un développement plus équilibré et inclusif à travers tout le Sénégal. «Le grand problème du Sénégal, c’est l’inexistence d’une réelle vision politique en matière de décentralisation. On est resté un Etat jacobin hyper centralisé encore, où tout est presque concentré entre Dakar et Thiès. Ce n’est plus tenable, il faut développer et donner du pouvoir aux autres régions. Donner aux pouvoirs locaux les moyens humains, financiers, matériels et logistiques de se développer», soutient-il.
La décentralisation, souligne Tine, devrait intégrer une distribution équitable des ressources et des infrastructures pour améliorer la qualité de vie des citoyens dans toutes les régions. Mais devrait aussi, à l’en croire, réduire les migrations internes vers Dakar et encourager un développement harmonieux et durable à l’échelle nationale.
Les régions de l’intérieur du Sénégal disposent de ressources, mais souffrent de leur pauvreté. «Kédougou est riche et peu développée, c’est une aberration, Ziguinchor est riche, Saint-Louis, Thiès, Matam, Kolda aussi», embraie-t-il. «Quelle aberration de tout concentrer à Dakar. Il faut décentraliser audacieusement pour guérir Dakar de sa macrocéphalie et du pouvoir de l’hyper-présidentialisme», glisse-t-il. «La démocratie n’est pas seulement l’affaire des juristes et des constitutionnalistes, qui la réduisent à l’Etat de Droit. C’est aussi l’affaire des philosophes, des historiens, des sociologues, des économistes et surtout des citoyens», avance Alioune Tine. Ce dernier attend certainement des nouvelles autorités qu’elles apportent des solutions à cette équation.
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