Règlement des contentieux économiques : Les opérateurs s’imprègnent des modes alternatifs
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Dans le cadre de la campagne de sensibilisation et d’information sur les Modes alternatifs de règlement des différends (Mard) auprès des acteurs et opérateurs économiques et financiers locaux, le cabinet Grant Thornton et l’Observatoire de la qualité des services financiers (Oqsf) ont organisé à Saint-Louis une réunion publique d’information sur la médiation, la conciliation et l’arbitrage. Cette importante rencontre, à laquelle ont participé différentes cibles, visait à promouvoir auprès de tous les acteurs économiques et financiers des régions de Saint-Louis, Louga et Matam, le recours à ces Mard, en vue de créer un environnement favorable au développement de leurs activités.Par Cheikh NDIONGUE(Correspondant) –
Dans le cadre du règlement des litiges commerciaux, un dispositif national a été mis en place par le gouvernement du Sénégal. Lequel se caractérise par des personnes ressources, des structures existantes et un cadre légal cohérent et quasiment parfait. Toutefois relève-t-on une dualité des modes alternatifs de règlement des conflits et des litiges commerciaux avec à côté des modes juridictionnels classiques, l’existence des Modes alternatifs de règlement des litiges. «Cela veut dire que les opérateurs économiques ont le choix entre porter leurs différends commerciaux devant les juridictions étatiques, notamment devant le Tribunal du commerce de Dakar qui a été créé, ou alors recourir à l’arbitrage, à la méditation et conciliation auprès des structures spécialisées», précise Cheikh Cissé du cabinet Grand Thornton. Dans le cadre de ce dispositif, l’Etat a mis en place des structures à caractère public qui sont au nombre de quatre : le Comité national de médiation et de conciliation, le Tribunal de commerce de Dakar, l’Observatoire de la qualité des services financiers (Oqsf) et les Maisons de justice et une structure privée créée par voie de décret, à savoir le Centre d’arbitrage et de médiation de Dakar sur initiative de la Chambre de commerce et du patronat.
Cependant, souligne M. Cissé, même si le Sénégal dispose de prérequis en matière de promotion des Modes alternatifs de règlements des différends, on constate que le recours à ce mode alternatif de règlement à l’amiable n’est pas totalement ancré dans la vie des opérateurs économiques. Cette situation, qu’il faut déplorer, est certainement liée, de son avis, à l’insuffisance de la promotion des stratégies de promotion de ces modes alternatifs de règlement des litiges. C’est par conséquent la principale raison qui a fait que le cabinet Grand Thornton et l’Oqsf ont voulu organiser ces rencontres publiques régionales pour sensibiliser les acteurs, avec pour principal objectif de faire la promotion de l’utilisation des Modes alternatifs de règlement des différends (Mard), au détriment des modes juridictionnels, et de communiquer avec les acteurs sur ces Mard et sur les avantages liés à leur utilisation. Des avantages qui se résument à la célérité dans le traitement des dossiers, sachant que le contentieux commercial peut prendre beaucoup de temps, alors que les modes alternatifs peuvent se faire en moins de trois mois, et permettent surtout aux parties de conserver leurs relations et de désengorger les tribunaux, en plus de la gratuité qui constitue un autre avantage. D’ailleurs, les statistiques prouvent à suffisance l’efficacité de ces modes alternatifs.
Mécanismes pour désengorger les tribunaux
En effet, en deux ans d’existence, au Tribunal de commerce de Dakar, des décisions ont été rendues sur plus de 11 mille dossiers dont le volume évalué en objet peut se chiffrer à plus de 269 milliards de francs Cfa, malgré les moyens limités de cette juridiction, alors que plus de 950 mille personnes ont sollicité les maisons de justice qui ont résolu 175 mille dossiers de litiges de leur création en 2006 à 2021, avec au moins un taux de 75% de réussite.
L’Oqsf a eu, de son côté, à traiter, depuis sa création en 2009, plus de 4 mille dossiers, avec 90% de réussite.
Amadou Kane Diallo, l’un des médiateurs désignés par l’Etat, a fait savoir que quel que soit le litige, l’Etat a prévu, en créant l’Oqsf en 2009 et en nommant aussi deux médiateurs, des mécanismes pour permettre aux Sénégalais d’essayer de régler leurs contentieux à l’amiable pour éviter d’engorger les tribunaux. C’est pour cette raison que ces réunions publiques sont organisées à travers le pays pour sensibiliser les populations et leur faire comprendre qu’au lieu d’ester en Justice, il existe un moyen de régler les problèmes en saisissant l’Observatoire qui dispose de plusieurs voies de saisine à tous les niveaux. M. Diallo a salué la grande mobilisation des acteurs des régions de Saint-Louis, Matam et Louga, qui doivent, après cette réunion, constituer des relais afin de faire comprendre à leurs membres l’existence de ces Modes alternatifs de règlement des conflits qui sont gratuits, plus rapides et économiquement plus intéressants pour le pays et qui permettent de désengorger les tribunaux et de ne pas ralentir l’activité économique.
Le Secrétaire général du Conseil départemental de Saint-Louis considère que «nous vivons dans un monde où les conflits sont en expansion. Il est donc normal de trouver des modes de règlement permettant de concilier les positions et ainsi éviter d’aller devant la Justice, sachant que les décisions de Justice peuvent provoquer des ruptures qui risquent de mettre définitivement un terme aux relations commerciales». Pour lui, la vulgarisation de telles pratiques peut permettre non seulement de préserver les relations commerciales, mais aussi par ricochet désengorger les cours et tribunaux. La représentante de la mairie de la commune de Saint-Louis a elle aussi salué la tenue de cette activité qui permet de régler en amont les litiges qui ne peuvent pas manquer dans le milieu du travail et dans les relations commerciales ou autres.
Le Secrétaire général de la Chambre de commerce considère que les règlements à l’amiable ou modes alternatifs de règlement des litiges participent à l’amélioration de l’environnement du travail et de la compétitivité des entreprises. Dans ce sens, elle a invité les opérateurs économiques à s’approprier ce dispositif qui peut leur permettre de régler leurs différends sans recourir à la Justice. D’ailleurs, assure-t-elle, la Chambre de commerce s’engage à participer à la sensibilisation et à la promotion de ces Modes alternatifs de règlement des différends.
Le président de la Chambre des métiers a également souligné le caractère important de cette activité qui intéresse sa structure à plus d’un titre, d’autant plus que certains de ses membres sont déjà impliqués dans des cas de règlement de différends à l’amiable au moment même où se tient cette réunion.
Saint-Louis est la deuxième étape après Ziguinchor qui a accueilli la première réunion publique d’information pour sensibiliser les acteurs et les opérateurs économiques et financiers locaux sur les Modes alternatifs de règlement des différends.
cndiongue@lequotidien.sn