Surmontée de son immense ballon au milieu du grand bassin rond, depuis qu’elle a été «enflammée» par les légendes du sport français Marie-José Pérec et Teddy Riner, la vasque, et sa flamme olympique, attire chaque quart d’heure des centaines de personnes, au moins 10 000 par jour. «Une flamme 100% électrique, sans combustible grâce à Edf, faite d’eau et de lumière», précisent les organisateurs, installée dans un jardin datant de l’époque de Catherine de Médicis, au XVIe siècle, et entièrement repensé au siècle suivant par Le Nôtre.

L’emblème des Jeux Olympiques
Les lieux sont accessibles entre 9 heures et 17 heures Tu, actuellement. Alors que les 100 000 premières places disponibles gratuitement ont été écoulées en moins de 48 heures, les nouveaux créneaux ouverts par le Cio chaque matin sont déjà pris d’assaut. «C’est une idée incroyable», souffle un touriste venu de Vilnius, en Lituanie, et qui vit ses premiers Jo. Avant d’accéder à la vasque, portable à la main afin de montrer son e-billet, le public profite des arbres pour s’abriter du soleil ravageur, souvent avec un brumisateur en poche. A côté, des gamins se jettent sous des jets d’eau pour se rafraîchir. «C’est une fierté pour moi de voir autant de monde réuni ici. Tout est super bien organisé», glisse une Parisienne. «La vasque, c’est l’emblème des Jeux Olympiques, et c’est très bien qu’elle soit visible autrement que dans un stade. Comme ça, tout le monde peut en profiter», souligne un jeune homme venu d’Agen, installé dans la capitale depuis dix ans. Juste au bout du jardin des Tuileries, chaque soir ou presque, des milliers de personnes se réunissent pour voir la vasque s’élever dans le ciel, au moment où le soleil se couche sur Paris. Elle monte à 60 m du sol jusqu’à minuit Tu. Elle est alors visible à plusieurs centaines de mètres à la ronde. Au Brésil, lors des Jo de Rio en 2016, c’était le coucher du soleil qui faisait office de spectacle nocturne le long de la fameuse plage de Copacabana. A chaque édition des Jeux son symbole.

La ville de Paris, la France et les ballons
Mathieu Lehanneur, designer de la vasque, a expliqué que son «anneau-flamme» de 7 m de diamètre, surmonté d’un ballon gigantesque de 30 m de haut et 22 m de diamètre, n’était autre qu’un hommage au premier vol en ballon à gaz gonflé à l’hydrogène. Il avait été effectué quelques années avant la Révolution, en décembre 1783, par deux de ses inventeurs français : le physicien Jacques Charles et l’un des deux frères Robert. Le décollage avait eu lieu dans le même jardin des Tuileries. S’élever dans le ciel comme l’oiseau, c’était un vieux rêve pour l’humanité, sans aucun doute partagé dans les quatre parties du monde, et en tout cas par Léonard de Vinci ou Bartolomeu Lourenço de Gusmao. Juste avant les prouesses du tandem Charles-Robert, d’autres premiers grands exploits en vol aérostatique, bien documentés, ont lieu par ici. (…)

L’escapade Gambetta en montgolfière
Ces exploits allaient lancer un véritable engouement dont on retrouve encore les traces aujourd’hui avec cette vasque olympique, le Ballon de Paris, ou par exemple en Ardèche. Dans le Pas-de-Calais, se trouve par ailleurs la colonne Blanchard, pour la traversée de la Manche. Toutes ces aventures préfiguraient surtout un fait politique méconnu, qui allait survenir en 1870 dans la capitale, suite à la défaite de Sedan, après la chute du Second Empire et la proclamation de la IIIe République française. Le 7 octobre, un certain Léon Gambetta, ministre de l’Intérieur du gouvernement provisoire, met en application un roman de Jules Verne, Cinq semaines en ballon, et s’inspire peut-être aussi du Général nordiste américain Ulysse Grant, de la Guerre de Sécession, peut-on lire dans cette tribune du Figaro. Alors que l’Armée prussienne assiège la capitale, bloquant routes et cours d’eau, il quitte Paris en montgolfière, décollant de la butte de Montmartre, où a été confectionné son engin. Il rallie Tours, ville d’où s’organisera la «résistance». La scène est immortalisée dans le Monu-ment aux aéronautes en ballon du siège de Paris, aux héros des postes, des télégraphes et des chemins de fer, inauguré deux ans après la mort de son sculpteur, au début du XXe siècle. Ce dernier n’était autre que Auguste Bartholdi, le père de Liberty. Son œuvre a aujourd’hui disparu ; elle a été fondue par Vichy. La maire de Paris, Anne Hidalgo, a laissé entendre, lundi 29 juillet chez nos confrères de France Bleu, que la vasque olympique pourrait bien être conservée après la fin des Jeux. «Dans mes rêves les plus fous, j’aimerais qu’elle reste», confie aussi Mathieu Lehanneur. La Tour Eiffel, installée pour l’Exposition universelle de 1889 par une bonne connaissance de Bartholdi, à savoir Gustave Eiffel, devait disparaître, et a finalement été repensée pour durer, avant de devenir le symbole numéro un de la capitale et de toute la France, comme plus tard l’Atomium de Bruxelles. Alors, si la foudre le permet, pourquoi la vasque des Jo 2024 ne resterait pas ?
Avec Rfi