Comment gérer les migrations de main-d’œuvre ? Son impact ? En l’absence de données statiques fiables et harmonisées pour comprendre pleinement, il est difficile de maîtriser les dynamiques de la migration de main-d’œuvre, qui est à la fois un défi et une opportunité économique. La Cedeao veut gommer les lacunes en matière de données sur la migration de main-d’œuvre en Afrique de l’Ouest et proposer des «solutions pour les combler, dans le but de renforcer nos capacités d’analyse et de suivi», avec un outil régional de rapportage sur cette question.Par B. SAKHO –

La Commission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) organise, depuis hier (pour 2 jours), la réunion des experts de la Cedeao sur la migration de main-d’œuvre. C’est une situation que l’on vit au quotidien avec des déplacements des citoyens ouest-africains dans leurs propres espaces. On estime que 90% des 8, 4 millions de migrants de la région proviennent des pays de la Cedeao. «Ce qui en fait la zone la plus animée de mobilité du continent africain.

L’essentiel de la mobilité intra-régionale est lié à l’activité économique. La migration de la main-d’œuvre dans la sous-région est principalement peu qualifiée, bien que l’on sache peu de choses sur les modèles de migration en fonction des compétences et des niveaux d’éducation. Il existe cependant des preuves que la migration peut avoir des effets significatifs sur le statut des travailleurs sur le marché du travail, permettant de passer d’un emploi indépendant (généralement basé sur l’agriculture) à un emploi salarié», note la Cedeao.

Cette rencontre des experts vise à présenter les résultats de l’étude régionale sur «les lacunes en matière de données sur la migration de main-d’œuvre en Afrique de l’Ouest pour examen et validation», et présenter l’outil régional de rapportage sur la migration de main-d’œuvre pour examen et validation. Ce diagnostic va permettre de gommer les imperfections dans la gestion du secteur, surtout que la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest manquent de «données fiables et actualisées sur les migrations de main-d’œuvre, et les données existantes sont difficiles à comparer et à agréger car les définitions des migrations, les périodes de référence et les systèmes de classification ne sont pas harmonisés entre les pays. Les sources de données régionales sur la migration de main-d’œuvre en Afrique de l’Ouest sont très limitées».
Aujourd’hui, la Cedeao veut avoir une vision globale des lacunes dans les rapports sur la migration de main-d’œuvre pour mieux gérer la question. Dr Alves Jorge Dalmeida, commissaire aux Affaires sociales et humanitaires de la Cedeao, explique les enjeux : «La migration de main-d’œuvre au sein de l’espace Cedeao est une réalité à la fois historique et contemporaine. Cependant, pour tirer pleinement parti des avantages de la migration de main-d’œuvre et atténuer ses défis, il est essentiel que nous disposions de données précises et complètes. Ces données, encapsulées dans ce que nous appelons des indicateurs de migration de main-d’œuvre, constituent le fondement sur lequel peuvent s’appuyer des politiques et des programmes solides.» Il insiste : «Il existe encore d’importantes lacunes qui entravent les progrès, notamment la fragmentation des données, l’indisponibilité des fonds, les capacités limitées et l’incohérence des données. Ainsi, sur la base des résultats identifiés dans l’étude, un outil de rapport sur la migration de main-d’œuvre a été développé. Les indicateurs de migration de main-d’œuvre proposés dans l’outil de rapport englobent un large éventail de mesures qui nous aident à comprendre la portée, les tendances et les impacts de la migration.»

Il y a la maîtrise des indicateurs, comme le volume et flux de migrants, le taux d’emploi et de chômage, les compétences et qualifications, les envois de fonds, la protection sociale et le bien-être des travailleurs migrants. «Bien que l’importance de ces indicateurs soit évidente, la collecte de données exactes et opportunes demeure un défi de taille. Des méthodes de collecte de données incohérentes, un manque de capacités et des ressources limitées font partie des obstacles auxquels nous sommes confrontés. Pour surmonter ces défis, il est impératif que nous renforcions nos systèmes statistiques nationaux, que nous améliorions la coopération régionale et que nous tirions parti de la technologie pour améliorer la collecte et l’analyse des données», note le commissaire de la Cedeao aux Affaires sociales et humanitaires.

Aujourd’hui, il est convenu que la main-d’œuvre migratoire est concentrée essentiellement dans l’activité économique, notamment dans les secteurs agricole et informel. «Les données existantes sont fragmentées, difficilement comparables, et les définitions, périodes de référence, ainsi que les systèmes de classification varient considérablement d’un pays à un autre. Ces lacunes freinent non seulement nos efforts pour garantir une gestion efficace des migrations, mais aussi notre capacité à élaborer des politiques basées sur des données probantes, à même de maximiser les bénéfices de la migration pour nos économies et nos populations», rappelle Karim Cissé, Directeur général du Travail et de la sécurité sociale.
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