L’artiste franco-italo-togolaise a déjà eu plusieurs vies dans une seule vie. Toujours portée par son esprit créatif, l’ancienne danseuse professionnelle Djeneba Aduayom a dû quitter sa passion de jeunesse après quelques soucis physiques, pour s’épanouir dans un tout autre champ, la photographie. Exposée aux quatre coins du monde et actuellement basée en Californie, Aduayom se veut une artiste mêlant les expressions de l’imagination, de la nature, avec en toile de fond ses origines européennes et africaines. Portrait. 

Une épreuve de la vie peut détruire à tout jamais, ou permettre de prendre un nouveau départ, d’écrire un nouveau chapitre, et d’avancer. C’est selon cette perspective que l’artiste Djeneba Aduayom a approché, progressivement, sa vie après une grosse blessure subie durant sa carrière de danseuse, alors qu’elle était en pleine tournée mondiale. «Ça a été un choc au début, mais petit à petit, j’ai compris que c’était un moment important de mon parcours créatif personnel», explique-t-elle, «même si, sur le moment, je ne l’avais pas vu venir. Basculer vers la photographie a été une nouvelle page de ma vie, qui me permet d’explorer des aspects de mon expression créative d’une manière que je n’avais jamais imaginé auparavant». Née dans un noyau familial multiculturel, français, togolais et italien, Djeneba exprime sa créativité dès son plus jeune âge, en écrivant des poésies, en se plongeant dans de nombreuses lectures, mais aussi en s’intéressant au design, à la mode et à la danse. «J’ai toujours eu une nature créative, depuis toute petite, et comme la danse était ma passion, je m’y suis mise à fond, tout en gardant mes yeux sur d’autres formes d’art», précise-t-elle. Elle grandit entre Paris et Togo, et le constant mélange de cultures lui permet de s’ouvrir, d’apprendre et de naviguer dans différents contextes, mais aussi d’exprimer sa créativité sous l’influence constructrice de ses origines. «De par mon héritage culturel, je vois le monde sous différentes perspectives, ce qui me permet de naviguer dans différents contextes, de m’adapter, tout en trouvant l’inspiration dans des champs, des lieux, des espaces où les différentes cultures se mélangent, convergent ou divergent. Cette double culture est un outil central dans ma vie, dans mes projets artistiques, depuis toujours.» La jeune artiste touche son premier appareil photo à l’adolescence, et après plusieurs années à tourner avec une troupe professionnelle, le destin lui fait se lancer dans la photographie. «J’ai commencé et je me suis prise au jeu. La photo est devenue pour moi ce puissant instrument pour capter des moments, des gens, des paysages, des émotions», explique l’artiste. Sa carrière derrière l’appareil est lancée, et Aduayom veut explorer ce moyen d’expression à fond, «et communiquer visuellement des choses que même les mots ne permettent pas souvent d’exprimer». Elle s’installe de ce côté de l’Atlantique, et devient photographe professionnelle.

Levi’s, Dior, le New York Times et Kamala Harris 
L’artiste grandit dans son nouveau milieu de prédilection et enchaîne les projets, en solo, en groupe, et des travaux pour de grandes entreprises, publications et des personnes de renom. Le New York Times, Time, Vanity Fair, Elle, mais aussi Dior, Aveda, American Express, Apple et des personnalités comme Kamala Harris, l’actuelle candidate à la Maison Blanche côté démocrate, André 3000, la star du groupe OutKast, et l’actrice Issa Rae passent devant l’objectif de Aduayom, qui veut toujours garder sa philosophie de travail et de créativité en tête.
«Quand je travaille avec des personnes, j’aime bien les pousser à exprimer leurs émotions d’une façon dont elles ne sont pas habituées, au-delà des limites habituelles de l’expression émotionnelle de chacun», précise-t-elle.
Ses expositions Also Known as Africa (2018), The New Black Vanguard (2019), mais aussi Réflexions intérieures (2021) sont visibles à Paris, Londres et New York, et la photographe ne se fixe aucune limite, car pour elle, l’image n’en a pas. «La photo, la vidéo, c’est un champ infini de possibles, et l’image permet d’explorer la réalité, mais aussi l’imagination, en mélangeant les deux par moments. C’est une exploration sans fin», dit-elle. Elle est à des milliers de kilomètres de Paris et de Lomé, mais travaille sur des projets sur l’Afrique, et veut aider, à sa manière, à mettre la lumière sur les artistes issus de la diaspora et faire parler du continent. «Il est super important de présenter l’Afrique par les divers talents issus ou liés au continent, et la montrer selon différents angles, selon les perceptions de ses artistes», estime-t-elle. «Les cultures, les identités, la beauté, mais aussi la complexité de l’Afrique doivent être explorées, par la photo ou n’importe quelle autre forme d’art, pour que ses artistes soient plus considérés, plus visibles et mieux reconnus.»
Une mission dont elle participe dans son art, comme lors de sa plus récente exhibition, Insight/Within, aux côtés de l’artiste franco-sénégalaise Delphine Diallo, et qui a été exposée durant l’été au studio Picto à New York, où Aduayom a travaillé sur des clichés sur la femme et la nature, en noir et blanc. «J’adore le lien entre l’homme et la nature, et sortir du cadre classique. Toujours avec l’Afrique en tête.»