Le départ des militaires français ne sera pas seulement la fermeture des bases. Il y a la situation des travailleurs civils sénégalais. En attendant l’officialisation de la mesure, ils demandent un plan social pour assurer leur réinsertion. Par Justin GOMIS –

Depuis l’annonce des autorités sénégalaises de la fermeture des bases militaires françaises dans le pays, les travailleurs civils sénégalais ne dorment plus à poings fermés. Habités par la psychose, ils ont tenu hier une Assemblée générale, en présence du Secrétaire général de la Cnts, Mody Guiro, pour demander un plan social. «Les nouvelles autorités ont annoncé la fermeture des bases françaises. Auparavant, le Président français avait annoncé une réorganisation des bases françaises à travers l’Afrique. Nous n’entrerons pas dans les détails de ce qui a provoqué le départ des Français. Nous parlons de nos emplois», alerte Ndiogou Wade.

Pour lui, ce n’est pas une première. «Elle s’est produite en 1974-1975. Il y avait une réduction des effectifs français à l’époque. Pendant ce temps, le gouvernement du Sénégal avait repris tous les travailleurs pour les recruter au niveau de l’Administration sénégalaise et dans des entreprises nationales. En 2011, il y avait un autre plan social avec la fermeture du 23e Bima. On avait aussi négocié avec le gouvernement français pour mettre en place un plan social. Ce plan social a été financé à 100% par la France. Ce n’est pas une bonne image que le Sénégal avait montrée en laissant à la France financer intégralement ce plan social. Nous ne voulons pas que cela se répète en 2025», note-t-il.

Ndiogou Wade s’interroge : si les travailleurs perdent leurs emplois, comment vont-ils nourrir leur famille ? «Je ne pense pas qu’un gouvernement peut rompre les contrats de plus de 800 employés sans rien faire. Depuis le début, on ne parle pas des travailleurs sénégalais. Il n’y a que les influenceurs. Mais on doit en parler, il s’agit de notre travail. Le gouvernement a l’obligation de protéger ses enfants. Ils veulent être souverains, qu’ils prennent aussi en charge le problème des travailleurs», assure M. Wade.

Pour lui, l’Etat a les moyens de prendre en charge les travailleurs sénégalais en les intégrant dans l’Administration ou dans les sociétés nationales. «L’Etat est préparé pour insérer tous les travailleurs dans l’Administration sénégalaise ou les entreprises sénégalaises. Il faut des programmes de réinsertion pour les travailleurs qui seront licenciés», suggère-t-il.

En tout cas, Mody Guiro insiste auprès du gouvernement pour demander la sauvegarde des emplois des travailleurs sénégalais dans les bases françaises. «Nous tenons à la souveraineté de notre pays. Ce sont des questions qui seront traitées entre Etats. Mais ce qui nous intéresse, c’est quand on mettra en avant les procédures, il faudra tenir compte de la situation des travailleurs et des travailleuses. C’est la raison de notre rencontre d’aujourd’hui. Une annonce a été faite. Aucune décision n’a été prise en ce qui nous concerne. Nous alertons aussi bien les autorités du Sénégal que françaises parce que nous sommes des employés», a-t-il déclaré. Il sensibilise les autorités dont la responsabilité est de protéger les citoyens sénégalais, de défendre leurs emplois au Sénégal et de créer de nouveaux emplois. «Ce que nous demandons est très simple. Nous demandons au gouvernement de rester tout prêt des travailleurs, de les écouter et de prendre en compte leurs préoccupations, d’anticiper, avant de prendre des décisions pour intégrer toutes les propositions dans les démarches. Je voudrais interpeller ici le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, et le Premier ministre, Ousmane Sonko, qui sont des camarades syndicalistes, pour leur dire que la situation des travailleurs des Forces françaises du Cap Vert n’épargne personne. Il faudrait leur apporter tout le soutien nécessaire pour permettre à ces travailleurs de s’épanouir dignement», a-t-il dit, en assurant du soutien sans faille de la Cnts. «La Cnts sera à vos côtés. Nous allons vous accompagner. Nous serons avec vous. Nous ferons avec vous les propositions nécessaires pour que nos préoccupations soient préservées, pour que vous puissiez rester dignes. Nous interpellons nos autorités pour préserver le climat social national. Pour éviter ces perturbations sociales, le gouvernement doit porter une oreille attentive aux signaux que les travailleurs les envoient», ajoute-t-il.Toute­fois, les travailleurs n’excluent pas de se battre pour préserver leurs biens. «Nous avons tenu aujourd’hui une Assemblée générale, demain nous allons faire une marche puis des sit-in», a annoncé Ndiogou Wade.
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