Le secteur des assurances sénégalais enregistre une croissance continue, mais son taux de pénétration reste faible. Réunis autour de l’Observatoire de la qualité des services financiers (Oqsf), les acteurs, en conclave à Saly, appellent à une mobilisation collective pour améliorer l’éducation financière, la qualité des services et la régulation du marché.

Par Alioune Badara CISS(Correspondant) – Le secteur des assurances au Sénégal affiche des performances encourageantes, avec un chiffre d’affaires passant de 243 milliards de francs Cfa en 2022 à 290 milliards en 2024, soit une progression de 10% en trois ans. Pourtant, cette embellie cache un taux de pénétration encore faible, estimé à seulement 1, 46%, contre 3, 3% en moyenne en Afrique et 8% dans le monde.
Face à ce constat, l’Observatoire de la qualité des services financiers (Oqsf) a réuni, à Saly, en collaboration avec la Direction des assurances, les différents acteurs du secteur pour analyser les résultats d’une enquête nationale et définir des pistes d’amélioration. L’objectif est clair : «renforcer la confiance vis-à-vis des acteurs financiers», a déclaré Pape Amadou Diagne, Secrétaire exécutif de l’Oqsf. Il juge «essentiel que les populations soient éduquées financièrement, afin de comprendre l’importance de l’assurance et comment elle peut les protéger».

Dans cette optique, l’Oqsf a mis en place un dispositif de médiation spécifique au secteur des assurances, visant à résoudre les litiges entre assurés et compagnies.

Le diagnostic est partagé par Aliou Badara Ndiaye, commissaire contrôleur représentant la Direction des assurances. «Il est essentiel d’évaluer la conformité des services rendus aux dispositions réglementaires», estime M. Ndiaye. Lequel rappelle que son service effectue des contrôles permanents pour garantir la protection des assurés.

Malgré les avancées, des efforts restent à fournir. Le Sénégal, qui a grimpé de la quatrième à la deuxième place en chiffre d’affaires dans l’espace Uemoa, est encore loin des standards régionaux. «La Côte d’Ivoire reste en tête, mais nous pouvons faire mieux», soutient M. Diagne.

Momar Diop, président du Conseil d’orientation de l’Oqsf, représentant le ministre des Finances et du budget, se veut clair : «Le constat est préoccupant. Le secteur de l’assurance est en difficulté, et la situation est encore plus critique à l’échelle du continent africain.» Il considère que l’enquête menée par l’Oqsf constitue une «véritable base de données» qui, bien exploitée, pourrait contribuer à redynamiser le secteur.

Il appelle aussi à une prise en compte accrue des secteurs économiques clés tels que l’agriculture et l’élevage, encore largement exclus des mécanismes d’assurance. «Il est préoccupant que ces secteurs moteurs de croissance soient laissés pour compte», a-t-il insisté.

La qualité des produits et services offerts est également au cœur des préoccupations. «Les compagnies d’assurance doivent faire des efforts concernant la gestion des sinistres, notamment les délais de règlement», a ajouté M. Diagne.

L’Etat, pour sa part, a entrepris des mesures incitatives, à travers des subventions et des renoncements fiscaux dans les secteurs les moins couverts. Mais cela ne suffira pas sans une réforme en profondeur du rapport entre les assureurs et les assurés, fondée sur la transparence, l’efficacité et la pédagogie.

Ainsi, le secteur sénégalais de l’assurance se trouve à un tournant.
Selon les acteurs, si la croissance est bien réelle, elle ne pourra s’inscrire dans la durée qu’à condition d’investir dans l’éducation financière, d’améliorer la qualité des services et de rétablir la confiance avec les usagers.
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