Les obligations en dollars du Sénégal continuent leur chute inexorable. Cette chute occasionne des pertes pour les investisseurs. Elles sont estimées à 7, 3% selon une dépêche de Reuters citant JP Morgan. Il est bon de rappeler que cette dépréciation des obligations en dollars du Sénégal a pour origine les déclarations dénonciatrices et inopportunes de Ousmane Sonko sur l’état de dégradation avancée des finances publiques sénégalaises, en plus d’un maquillage des chiffres jusqu’ici publiés. La tentative de confirmation de ces accusations au moyen d’un rapport, contesté et contestable, de la Cour des comptes n’a fait qu’empirer cette situation, notamment en renforçant la méfiance des marchés internationaux de capitaux et en accroissant le scepticisme des institutions internationales. En effet, Ousmane Sonko et son gouvernement se montrent incapables d’apporter des preuves irréfutables de leurs allégations issues d’un réel audit des finances publiques mené sur la base des normes et règles de l’art qui font autorité en la matière au plan international.

On se rend compte, quelques mois après sa publication, que le rapport de la Cour des comptes ne servait qu’à alimenter le débat politicien à l’intérieur du Sénégal. Une stratégie dont Ousmane Sonko a usé et abusé pour alimenter des polémiques politiciennes stériles qui ne profitent qu’à lui et à ses intérêts partisans. Les récentes déclarations de la directrice du Département des communications du Fmi laissent apparaître, de façon claire, que le Sénégal ne pourrait pas compter sur un décaissement du Fmi tant que les résultats d’un véritable audit ne lui seraient pas remis. Donc, la marge de manœuvre sur le levier «ressources» se rétrécit, de jour en jour, comme peau de chagrin, en dépit des fréquentes opérations de soul buki, sulli bouki pour lever des fonds sur le marché obligataire ouest-africain. Il ne reste, alors, qu’à agir sur le levier des «dépenses». Ce que Ousmane Sonko et son gouvernement ne semblent pas être prêts à faire.

En effet, aucun signe extérieur ne montre une réduction du train de vie de l’Etat. Depuis avril 2024, les recrutements dans la Fonction publique ne cessent de croître. Si certains pourraient se justifier (Fds, enseignants, etc.), nous assistons à des pratiques de recasement massif d’une clientèle politique naguère fortement décriées par Ousmane Sonko et son parti. Des institutions inutiles et budgétivores sont maintenues, contrairement aux promesses de rationalisation, parce qu’elles offrent l’opportunité, tout simplement, de récompenser les militants(es) et soutiens de postes de Pca et de Dg. Autrement dit, un partage du gâteau autrefois véhémentement dénoncé ! Plus de 8 milliards de nos pauvres francs dévalués sont utilisés pour l’achat de véhicules au profit des parlementaires qui bénéficient déjà d’une indemnité de transport très substantielle, susceptible de leur garantir, facilement et individuellement, un prêt automobile auprès de n’importe quelle institution financière de la place. Plus de 5 milliards de francs Cfa ont été ponctionnés de nos ressources publiques pour «indemniser», sans décision de Justice, des condamnés et prévenus liés à la dégradation de biens publics et privés, de violences et voies de fait sur des personnes et de meurtres comme ceux des deux sœurs brûlées vives dans un moyen de transport public. Des dizaines de milliards de francs Cfa continuent d’alimenter les fonds politiques, rebaptisés fonds spéciaux, en dépit des promesses de réforme, voire de leur suppression. Ousmane Sonko vient de se permettre une virée diplomatique (pour rappel, la diplomatie est un domaine réservé au chef de l’Etat) par jet privé dont nous n’avons aucune idée sur les coûts subséquents. Aujourd’hui, c’est le Président Bassirou Diomaye Faye, au mépris des règles de rationalité et d’économie, qui s’est déplacé à Saint-Louis à bord de l’avion de commandement alors que le trajet s’effectue facilement à l’aide d’une escorte de l’escadrille présidentielle. Autant de dépenses inutiles, voire somptuaires, qui contrastent avec la rupture chantée et promise. Hélas, le «nguru» est en train de prendre le pas sur l’engagement de rupture.
Pr Cheikh FAYE