La légende de la mode a annoncé son retrait de ses fonctions à ses équipes, après 37 ans à la tête du Vogue américain. Elle conservera toutefois ses fonctions de responsable du contenu de Condé Nast et de directrice de l’édition mondiale du magazine.

L’annonce a fait l’effet d’une bombe dans la fashion sphère. Sur les réseaux sociaux, la nouvelle se répand à grande vitesse : Anna Wintour, visage emblématique de Vogue depuis 1988, quitte ses fonctions de rédactrice en chef de l’édition américaine. Après 37 années passées à diriger d’une main de fer ce magazine mythique, cette icône, surnommée la «papesse de la mode», tourne une page majeure de son parcours. Lors d’une réunion avec ses équipes le matin du 26 juin, elle a officialisé son départ, tout en précisant qu’elle conservera ses postes de directrice du contenu chez Condé Nast et de directrice éditoriale mondiale de Vogue, supervisant ainsi les marques phares du groupe telles que Vanity Fair, GQ ou AD. Si un nouveau responsable éditorial doit désormais prendre les rênes de Vogue Us, la question reste entière : peut-on réellement remplacer Anna Wintour ? Pour certains observateurs, le temps est venu d’imposer un regard plus jeune, en phase avec le monde actuel. Un cap que la papesse de la mode semble accueillir avec enthousiasme : «Ce sera passionnant de collaborer avec une nouvelle voix qui nous mettra au défi, nous inspirera et nous poussera à repenser Vogue sous des angles inédits», a-t-elle expliqué, selon Vogue Us.

Une carrière emblématique
Cette transition marque la fin d’une ère, mais aussi le couronnement d’une carrière exceptionnelle. Née à Londres en 1949, Anna Wintour est devenue l’une des figures les plus influentes de la mode. Surnommée la «Dame de fer», elle a transformé le magazine Vogue Us en véritable avant-garde culturelle. Sous son impulsion, les mannequins cèdent peu à peu leur place à des actrices et chanteuses en couverture, à l’image de la célèbre Madonna en 1989. Pionnière également dans le numérique, elle a très tôt su adapter Vogue à l’ère digitale, en lançant un site innovant avec des diaporamas de défilés, signe de son anticipation des évolutions du secteur. Son rôle dépasse les murs de la rédaction grâce à son flair unique pour dénicher les talents qui ont révolutionné la mode : Marc Jacobs, Alexander McQueen, John Galliano… Autant de génies révélés grâce à son œil aiguisé. Conseillère influente auprès des grandes maisons, elle a parfois pesé dans le choix de directeurs artistiques, façonnant le visage de la mode contemporaine. Proche des puissants, Anna Wintour a su tisser des liens étroits avec les icônes de son temps. Amie de Lady Diana, qu’elle a soutenue à plusieurs reprises dans les pages de Vogue, elle a aussi été décorée par la Reine Elizabeth II en 2017, recevant le titre de Dame Commander de l’Empire britannique. Du côté des créateurs, elle a bâti des relations solides avec Karl Lagerfeld, Tom Ford ou encore John Galliano. A la rédaction, elle s’appuyait sur ses fidèles alliés : André Leon Talley, plume flamboyante et historique de Vogue, et Grace Coddington, sa partenaire créative, qui l’ont accompagnée dans la (re)construction du magazine.

Un style légendaire
Le style de Anna Wintour, c’est une science parfaitement orchestrée. Depuis les années 90, elle reste fidèle à un vestiaire aussi reconnaissable qu’iconique. Un carré lisse et parfaitement coupé, des lunettes de soleil oversize, portées comme une armure, et une allure toujours impeccable. Robes midi ajustées signées Chanel, Prada ou Carolina Herrera, colliers plastrons à maillons dorés, manteaux imprimés ou color block, souvent assortis à la robe. Aux pieds, une paire de slingbacks nude Manolo Blahnik et surtout, jamais d’escarpins pointus, ni de sneakers, et encore moins de jeans. Elle pratique une forme d’élégance rigide, minimalement théâtrale. Et si elle refuse l’effet de surprise, c’est que son uniforme est devenu un statement : celui d’une femme de pouvoir qui ne se disperse jamais, même dans ses imprimés floraux. Ce style redoutablement étudié, à la fois immuable et tranchant, a d’ailleurs inspiré le personnage culte de Miranda Priestly dans Le Diable s’habille en Prada.
En rupture avec un univers longtemps masculin, Anna Wintour s’est imposée avec fermeté et résilience, devenant la voix de la haute couture, mais aussi des créateurs émergents et des passionnés. Son départ marque une page importante, mais son héritage demeure indélébile. Véritable monument de la mode, elle reste l’une des figures les plus talentueuses et influentes de cette industrie en perpétuelle évolution.
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