Avec son nouveau Règlement intérieur, l’Assemblée nationale se donne les pouvoirs de son travail. Avec la commission d’enquête parlementaire, l’institution peut entendre des magistrats et des membres du gouvernement sur autorisation du ministre de la Justice et du président de la République. En attendant, le document devant passer devant le Conseil constitutionnel pour vérifier sa constitutionnalité avant sa promulgation.Par Bocar SAKHO – 

La 15ème Législature a réussi à dépoussiérer le Règlement intérieur de l’Assemblée qui a été voté à l’unanimité. Dans ce nouveau document de 31 chapitres et 136 articles, l’institution parlementaire tente de se «moderniser» comme l’a soutenu son président El Malick Ndiaye lors de son adoption. Et elle se donne le pouvoir de ses ambitions, notamment dans la partie des commissions d’enquête parlementaires en lui consacrant des articles 53 à 58.
Si évidemment l’Assemblée nationale peut, par une résolution, créer une commission d’enquête. Et les autres préalables restent intacts, car il ne peut être créé de commission d’enquête lorsque les faits ont donné lieu à des poursuites judiciaires et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours ou qu’un jugement définitif est intervenu sur les faits. En même temps, si une commission a déjà été créée, sa mission prend fin dès l’ouverture d’une information judiciaire relative aux faits qui ont motivé sa création.

Les étapes avant la promulgation
Après avoir examiné l’opportunité et la recevabilité, le Bureau de l’Assemblée nationale s’est prononcé favorablement, la proposition est notifiée par le président de l’Assemblée au ministre de la Justice, qui a quinze (15) jours au plus pour transmettre son avis sur d’éventuelles interactions avec des procédures judiciaires en cours portant sur le même objet.
Après les différentes procédures de mise en place de la commission, il y a les pouvoirs accordés à la commission. Comme le dit l’article 56, elle peut citer devant elle, par voie d’huissier, toutes les personnes dont l’audition lui paraît utile. Elles peuvent aussi être convoquées par simple lettre recommandée ou par tout autre moyen. Et elles ont l’obligation de déférer sous peine de sanction et elle peut requérir la force et l’appui même du Ministère public. En tant que pouvoir législatif, comment la commission d’enquête parlementaire peut entendre les membres du gouvernement ? Selon le Règlement intérieur, le chef de l’Etat est saisi par le Bureau de l’Assemblée nationale, pour avis, avant la convocation d’un membre du gouvernement devant une commission d’enquête. Alors que les autorités respectivement chargées de la tutelle technique et de la tutelle financière sont informées par la commission d’enquête avant la convocation des dirigeants d’entité du secteur parapublic ou d’autorité indépendante ou d’organismes similaires. Enfin, lorsque la commission d’enquête souhaite entendre des magistrats en service, elle sollicite l’autorisation du ministre de la Justice. Pour les députés, il n’y aura pas besoin de lever leur immunité parlementaire en cas d’audition par la commission d’enquête. Par contre, les personnes convoquées doivent «informer la commission d’enquête de toute indisponibilité avec des preuves à l’appui, ainsi que de tout projet de sortie du territoire national». Face aux députés, les personnes auditionnées prêtent obligatoirement serment et peuvent être poursuivies pour faux témoignage.
Il faut noter que les personnes auditionnées sont protégées contre toute procédure en diffamation, injure, outrage et/ou sanctions disciplinaires pour les propos tenus devant une commission d’enquête, en lien direct avec l’objet de l’enquête.
Aujourd’hui, il reste encore quelques étapes à franchir pour son entrée en vigueur. Il s’agit d’une loi organique qui va passer devant le Conseil constitutionnel pour vérifier la constitutionnalité du Règlement intérieur avant sa promulgation.
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