Rapport – Conclusions des Assises des médias : La Cap dessine l’avenir du secteur

En l’absence des autorités étatiques, la Coordination des associations de presse (Cap) a procédé, hier à la Fondation Friedrich Ebert, à la restitution du Rapport général des Assises nationales des médias entamé depuis 2022. Le rapport, intitulé «Bâtir un écosystème médiatique performant», se veut être une feuille de route pour repositionner le secteur au cœur du développement et de la démocratie.Par Ousmane SOW –
Après deux années de travaux, le Rapport général des Assises nationales des médias a été présenté hier aux acteurs de la presse… Et pas un seul représentant de l’Etat. Pourtant, le document présenté se veut structurant, ambitieux et porteur d’une vision d’avenir pour un secteur en crise. A rappeler que depuis 2022, la Coordination des associations de presse (Cap) a tenté de remettre de l’ordre dans un paysage médiatique souvent décrit comme éclaté, fragilisé. «Bâtir un écosystème médiatique performant se traduit concrètement par l’exercice que nous continuons aujourd’hui, après 78 réunions de commissions sur deux ans, avec 1465 participants», a déclaré Matar Silla, président du Comité scientifique et ancien Directeur général de la Radiodiffusion télévision sénégalaise (Rts). A ses yeux, les médias ne sont plus de simples canaux d’information. Autrement dit, il est temps que le Sénégal reprenne la main. «L’Autorité de régulation actuelle n’est plus adaptée. Il est temps de mettre en place une instance plus moderne, capable de réguler l’ensemble des médias, y compris la publicité», a précisé Matar Silla, qui plaide pour un arsenal juridique repensé, qui intégrerait la protection des jeunes journalistes et des techniciens de l’audiovisuel, tout en tenant compte des enjeux sécuritaires liés à l’exercice du métier dans le contexte actuel.
Initié par la Coordination des associations de presse (Cap), avec l’appui de la Fondation Friedrich Ebert et de la Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest (Mfwa), le rapport de ces assises dresse un état des lieux «sans complaisance». Manque de financement, précarité des journalistes, attaques répétées contre les journalistes, formation aléatoire, textes de loi obsolètes, marché publicitaire sous perfusion… «La crise économique que traverse la presse menace non seulement la viabilité des entreprises, mais aussi la qualité et l’indépendance du journalisme», a martelé Cheikh Thiam, Rapporteur général des Assises. Faisant l’économie des objectifs stratégiques des Assises des médias, l’ancien directeur du quotidien national Le Soleil de souligner que «face à ces enjeux, les Assises ont identifié quatre axes stratégiques majeurs pour l’avenir du secteur», tout en précisant que ce présent rapport veut tout refonder, dans les règles de l’art. «Nous avons la conviction que ce rapport pourra servir de base à des décisions stratégiques permettant de repositionner les médias sénégalais comme un pilier essentiel de notre démocratie et de notre développement», dit-il, estimant que la presse ne saurait «se réinventer» sans une volonté politique forte de l’Etat.
Finalement, le rapport se veut être une feuille de route. «Le Sénégal, dans le cadre de l’Agenda national 2050, a les moyens de se positionner comme hub médiatique et technologique de référence en Afrique», estime Matar Silla. Mais cette ambition risque de se heurter à une réalité pour le monde de la presse, qui a tenu la conclusion de ses assises dans une institution étrangère, en l’absence des autorités étatiques. «Je suis gêné, doublement gêné. Je ne suis pas très fier que cette manifestation se fasse dans une structure étrangère et sans les représentants des autorités sénégalaises», déplore Elimane Haby Kane, président de Legs Africa. Pour lui, «la crise des médias, c’est la crise de la société sénégalaise». Le militant de la Société civile assimile cet état de fait à un «manque de reconnaissance de la place des médias dans la démocratie» et appelle à une mobilisation citoyenne pour sauver la liberté d’expression, qu’il qualifie de «liberté d’exister tout simplement».
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