Il n’était pas visible que dans les télévisions nationales. Bachir Fofana était aussi audible dans des plateformes sociales de son terroir d’origine, le département de Vélingara en l’occurrence. L’arrestation du journaliste-chroniqueur a jeté un froid dans Kibaaru bimbilaw, une plateforme de débats et d’information qui regroupe près de mille fils de cette partie de la région de Kolda. Le Quotidien a tendu le micro à quelques citoyens de cette localité.

 

Par Abdoulaye KAMARA – Combien de temps va durer le silence radio de Bachir Fofana à Kibaaru Bimbilaw, une plateforme sociale de son département d’origine, Vélingara ? La réponse sera donnée le 9 juillet après le face-à-face avec la Justice du journaliste-chroniqueur arrêté pour «diffusion de fausses nouvelles». Dans l’attente de ce verdict, Bachir Fofana, en plus de ses apparitions régulières dans les médias nationales, manque à son public de Vélingara. Car, il participait aussi à l’animation du débat public à Vélingara, à travers la plateforme de débats et d’information susnommée qui regroupe près de 1000 fils de ce terroir dans la région de Kolda. Et il ne le faisait pas si mal. Bachir était bien apprécié par ses concitoyens du Fouladou.

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Mamadou Baldé, professeur de philosophie au lycée Chérif Samsidine Aïdara, explique : «Bachir va manquer au débat public de Vélingara, dans Kibaaru Bimbilaw surtout, que nous partageons. Toutefois, le débat continue dans la plateforme. Tout en souhaitant qu’il nous retrouve vite. J’ai appris à le découvrir. Même si nous n’avons pas de rapports, je trouve qu’il a du talent, il a des aptitudes, il est très ouvert, il accepte la critique, il accepte de se découvrir. Ce qui n’est pas mauvais en soi.» Et puis, «je trouve que ce n’est pas forcément une grande expertise du point de vue juridique et d’autres points de vue, mais le seul fait qu’il accepte le débat contradictoire, que les gens l’attaquent par-ci par-là, en soi n’est pas une mauvaise chose pour le débat public.» Un conseil pour Bachir : «Il aurait mieux fait d’opérer un départ entre le professionnel, c’est-à-dire le journaliste, et le politique. Il a, à la fois, la casquette d’un journaliste et celui d’un politique. Ce qui fait que parfois, il y a comme une confusion des genres. Ce qui fait que ses adversaires politiques ne vont pas lui faciliter la tâche, d’autant qu’il ne leur facilite pas la tâche.»

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«Tout ce que je lui souhaite, c’est de retrouver sa famille, ses enfants. L’adversité politique pour moi ça se règle sur le plan politique, sur le terrain.  Par principe, je ne suis pas pour l’emprisonnement des gens pour des délits d’opinion. Encore que là il s’agit de délit de diffusion de fausses nouvelles et diffamation. Même pour ça, j’ai toujours plaidé des peines alternatives : éviter que l’inculpé aille en prison et taper là où ça fait le plus mal, c’est-à-dire à la poche. Une forte amende pour que les gens n’aillent pas en prison.»

Abdoulaye Marigo, enseignant, ajoute : «Bachir participe effectivement à l’animation politique dans Kibaaru Bim­bilaw. Bachir affiche une posture d’opposant assumé que nous comprenons, parce qu’il a perdu son emploi. Il était à un poste stratégique que les nouvelles autorités ont jugé nécessaire de reprendre et le confier à quelqu’un qui est dans la mouvance présidentielle. Il a fait le choix de s’opposer au régime et tous les choix impliquent des conséquences. De toutes les façons, nous lui souhaitons de retrouver sa famille. Bien qu’étant dans l’opposition, il est bien utile dans le débat public local. Nous souhaitons qu’il nous revienne très vite. Ses déclarations d’opposant sont souvent le fruit de recherches sérieuses. Il fait une opposition d’idées, loin des débats de pagnes, de pantalons et de sacs de premières dames que l’opposition Sénégalaise a l’habitude d’entretenir.»

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Amadou Athie, enseignant, enchaîne : «Vélingara est orphelin de Bachir, et Kibaaru est nostalgique. Bachir, dans cette plateforme, aimait partager ses connaissances, donner ses points de vue sur des sujets de politique nationale, d’économie, de finances publiques et de la Justice. Bachir nous manque beaucoup. Il faut comprendre Bachir qui a été victime d’un licenciement abusif de son poste de directeur de la Communication d’une société nationale. Malgré ses occupations professionnelles, il aimait marquer une pause pour éclairer, apporter sa contribution dans le débat public, dans les groupes WhatsApp de Vélingara. Il était un opposant assumé qui cherchait à éclairer l’opinion sur les contradictions du nouveau régime, s’il y en a. Si le régime fait de bonnes choses, il le dit également. Toujours dans la courtoisie. Il a toujours défendu Vélingara et plaidé pour plus d’investissements à Vélingara. Nous souhaitons qu’il soit libéré pour retrouver sa famille.»

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Abdoulaye Kandé, infirmier, renchérit : «Bachir manque dans le débat public local. Il est très ouvert d’esprit, très aimable. Nous constatons dans Kibaaru Bimbilaw et dans Vélingara debout, qu’il n’a pas peur d’affronter les co-débatteurs. Il argumentait et apportait les preuves de ce qu’il avançait. Il est hyper pertinent. A chaque fois qu’il y a des urgences à Vélingara, qu’un débat était en cours à Vélingara, il profitait des plateaux télévisés pour les poser publiquement. Il a Vélingara dans son cœur. Je considère que sa situation actuelle n’est pas normale. Un démenti aurait suffi à le rappeler à l’ordre. L’Etat actuel ne doit pas être allergique aux critiques. Bachir est humble, il a le courage, quand il a tort, de présenter ses excuses. Vélingara a besoin de continuer à entendre sa voix dans le débat public national et local. Nous lui souhaitons de sortir indemne de cette mauvaise situation.»
akamara@lequotidien.sn