Mbaye Dione, Secrétaire général de l’Afp : «Notre parti a été desservi sous Benno»

Mbaye Dione, Secrétaire général de l’Afp, n’a pas du tout apprécié les critiques du Pm Ousmane Sonko sur la Justice suite au rejet par la Cour suprême du rabat d’arrêt de ses avocats sur l’affaire Prodac. C’est ainsi qu’il a invité le Pm à la retenue.Par Amadou MBODJI –
Les critiques sur la Justice sénégalaise par le Pm Ousmane Sonko, après le rejet par la Cour suprême du rabat d’arrêt de ses avocats dans l’affaire Mame Mbaye Niang, ne passent pas auprès de Mbaye Dione, Secrétaire général de l’Afp. Ce dernier l’a fait savoir hier lors de son passage à l’émission «Le Grand jury» de la Rfm. «Il se permet d’attaquer un maillon extrêmement important de la Justice de notre pays. Ce n’est pas élégant, ce n’est pas ce qu’on attend de lui. En tant que Pouvoir exécutif, en tant que chef du gouvernement, il doit aider le président de la République à être le garant de la séparation des pouvoirs. Aujourd’hui, Ousmane Sonko est d’abord un justiciable sénégalais. Aujourd’hui, perdre un procès ou être débouté par une juridiction dans ce pays ne doit pas le pousser à jeter le discrédit sur une institution aussi prestigieuse. Et là, j’interpelle le président de la République», affirme le leader de l’Afp. Jugeant «grave que le chef de l’Etat ne mette pas fin aux dérives du Pm ou qu’il en soit complice».
Dione salue l’indépendance de la Justice
«Quand aujourd’hui, ce régime a utilisé sa majorité mécanique dans l’Assemblée nationale pour faire passer la loi d’interprétation sur l’amnistie et que nous autres, députés de l’opposition, avons dit attention, ils ont forcé, nous avons pris le courage d’attaquer cette proposition de loi devant le Conseil constitutionnel, qui nous a donné raison. Ça veut dire que la Justice n’est pas là, ne doit pas être là, ni pour le pouvoir ni pour l’opposition. Ousmane Sonko doit être résolu de savoir qu’avant d’être Premier ministre, il est un citoyen sénégalais. C’est un justiciable comme tout le monde. Ce n’est pas parce qu’il est Premier ministre que les procès qu’il avait perdus, il doit les gagner.
Non, la Justice ne doit pas fonctionner comme ça», fait-il savoir. La Justice n’est là ni pour le pouvoir ni pour l’opposition, selon lui.
«Je ne suis pas en phase avec lui parce qu’il dit que la Justice est aux ordres. Et si la Justice est aux ordres, il pensait qu’en venant au pouvoir, certainement, il devra la manipuler. Parce qu’aujourd’hui, en tant qu’opposant, il a perdu des procédures. En tant que Premier ministre, il a perdu des procédures. Ça veut dire que la Justice n’est pas là pour lui, parce qu’il est au pouvoir. Le Président Macky Sall a été débouté quand il a voulu prolonger son mandat pour ne pas organiser les élections», fait-il signifier. Le leader de Pastef est toujours dans la peau d’un opposant si l’on en croit le député.
«Aujourd’hui, on voit un Premier ministre qui a un comportement qui est vraiment en porte-à-faux (des normes), de ce que les Sénégalais attendent du Premier ministre. Aujourd’hui, on a l’impression que pour ce monsieur, le manteau est très large pour qu’il puisse le supporter. On a l’impression que ce monsieur se croit encore être le premier opposant de ce pays.
Aujourd’hui, dans un pays normal de démocratie respectée, on doit respecter le pouvoir et administrer dans le respect, en tout cas pour le Peuple, et dans le respect des diversités d’opinions, mais également des institutions, du respect de la liberté de presse. Au moment aujourd’hui où on aspire à un meilleur système démocratique, le Premier ministre se permet de dire, si j’étais président de la République, il y a des gens qui allaient raser les murs. C’est comme si c’est le président de la République qui doit dicter, qui doit parler oui ou non», fait-il ressortir. Il lui rappelle son passé dans l’opposition où il a été celui qui critiquait le plus le Président Macky Sall.
«Ce qu’il a dit en termes de mots grossiers vis-à-vis du Président Macky Sall, vis-à-vis des institutions, que ce soit le Pouvoir judiciaire, que ce soit l’Assemblée nationale…, je ne pense pas qu’un opposant politique ou un journaliste ou un activiste l’ait déjà dit. Il a oublié aujourd’hui que ce n’est pas à lui de réguler le jeu politique, ce n’est pas à lui distribuer la parole. Les Sénégalais doivent de façon responsable, de façon mature, mais de façon intelligente pouvoir prendre la parole et dire je ne suis pas d’accord avec la politique du gouvernement du Premier ministre Ousmane Sonko», indique le député. Il invite le Pm à plus de retenue.
«J’invite le Premier ministre à plus de retenue et de sens républicain. Qu’il sache que la République, l’Etat à ses exigences. Tu ne peux avoir tous les avantages de l’Etat et se comporter comme un opposant. Il y a des choses qu’un opposant responsable ne doit pas sortir de sa bouche, encore moins un Premier ministre qui bénéficie de la confiance du chef de l’Etat élu par la majorité», mentionne-t-il. Le député dresse par ailleurs un bilan pas du tout reluisant du régime actuel en 15 mois de présence à la tête du Sénégal.
«Après 15 mois d’exercice du pouvoir, je suis resté sur ma faim. Nous sommes loin de la rupture», constate amer Mbaye Dione. Ce dernier pense c’est comme si le système est maintenu avec le changement des hommes, avec au bout du compte «moins de résultats».
L’Afp desservie sous Benno
Le compagnonnage de l’Afp avec Benno a fait plus que desservir que profiter au parti dirigé alors par Moustapha Niasse si on suit les explications de son successeur Mbaye Dione. «Le deuxième élément c’est que la loyauté du président Moussapha Niasse, la sincérité de son compagnonnage avec Président Macky Sall nous ont causé beaucoup de problèmes. Moussapha Niasse avait beaucoup de loyauté.
Il ne demandait rien au Président Maky Sall en termes de représentation dans le gouvernement, dans les directions nationales. L’Afp était peu représentée (…)», rapporte le nouveau patron de l’Afp. Mbaye Dione dit n’avoir été demandeur de rien. «Je n’étais nullement intéressé par un quelconque poste. Pendant les douze ans du Président Macky Sall, je n’ai jamais rien demandé, je n’ai jamais rien exigé. Je sais que le président Moustapha Niasse avait la générosité de donner, mais il ne pouvait pas donner à tout le monde. Mais n’empêche, on pense que l’Afp méritait un plus grand traitement», fait savoir Mbaye Dione. Par rapport à la reddition des comptes visant d’anciens responsables sous l’ancien régime, Dione dit que son parti n’a rien à y voir. «La preuve, je rends grâce à Dieu et je touche du bois, il n’y a aucun responsable de l’Afp, au moment où je vous parle, qui est inquiété par cette soi-disant reddition des comptes», tient-il à préciser.
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