Réponse à Mamadou Faye, Dg de la Bnde

Monsieur le directeur,
Les Sénégalais n’ont pas besoin d’un énième discours de façade, mais de vérité.
Quand l’agence Moody’s abaisse la note du Sénégal à Caa1 (en difficulté), ce n’est pas une attaque politique contre le Sénégal ou contre le parti des populistes dirigé par Ousmane Sonko, c’est un constat économique : notre dette devient plus risquée, notre accès aux financements se complique, et le coût de l’argent grimpe. Voilà la réalité que vos slogans ne peuvent pas maquiller.
Vous parlez de «souveraineté financière», de «bras armé national», de «sursaut patriotique». Très bien. Mais la souveraineté ne se déclame pas, elle se finance, et les chiffres, eux, ne mentent jamais.
Aujourd’hui, pour emprunter à la Banque mondiale, le Sénégal doit accepter un spread minimum de 2, 00% sur le taux de référence. Même les financements dits «concessionnels» de l’Ida affichent des taux autour de 3, 45 à 5% selon les maturités.
A la Banque africaine de développement, les conditions varient avec le risque pays, et chaque dégradation de note se traduit automatiquement par un renchérissement du crédit.
Quant au marché régional de l’Uemoa, les dernières émissions obligataires se négocient autour de 6 à 6, 40%. C’est le coût réel du financement domestique.
Et la Brvm, malgré ses progrès, plafonne autour de 330 points, avec une liquidité trop faible pour absorber les ambitions d’un Etat ou d’une banque de développement.
Alors oui, appelons au sursaut national. Mais commençons par dire les choses :
notre pays dépend encore à plus de 60% des financements extérieurs pour ses projets structurants.
Nos marges budgétaires sont minces, nos recettes fiscales insuffisantes, et notre épargne nationale, bien qu’importante, reste peu canalisée, peu protégée, et souvent méfiante vis-à-vis des institutions financières locales.
Avant de demander aux Sénégalais de «faire bloc», commencez par leur prouver que leurs dépôts, leurs investissements, leurs efforts sont gérés avec transparence, rendement et patriotisme réel.
Qu’on arrête les formules creuses : «ensemble, entreprendre l’avenir» c’est beau, mais le futur s’écrit en bilans, pas en communiqués.
La confiance ne se construit ni à New York ni à Dakar, elle se construit dans la rigueur, la gouvernance et le résultat.
Avant de parler de «souveraineté financière» ou de «mobilisation nationale», il faut d’abord restaurer la rigueur, l’efficacité et la crédibilité de nos institutions financières. La Bnde et les autres acteurs du système ont eu le temps de prouver leur solidité. Les discours ne remplacent pas les résultats.
Ce que le Peuple veut, ce n’est pas un discours de plus, c’est la vérité des comptes, la fin des prétextes et le retour à une gestion qui ne confond pas souveraineté et autosatisfaction.
Le Sénégal n’a pas besoin d’un bras armé financier pour brandir des slogans.
Il a besoin d’un système qui respecte chaque franc épargné, d’une banque qui parle chiffres, pas incantations, et d’une élite qui cesse de s’indigner à chaque alerte au lieu de corriger ce qui ne va pas.
Alors oui, le développement du Sénégal sera financé par les Sénégalais eux-mêmes, mais à une condition : qu’on leur rende leur confiance avant de leur demander leur argent !
Président Bougar DIOUF
Union des panafricanistes sénégalais UPS