Affaire de la dette cachée : LA RIPOSTE DE MACKY

C’est la guerre des mots ! Après les accusations de dette cachée contre le Président Macky Sall, une nouvelle formule a été utilisée hier par l’avocat Me Pierre-Olivier Sur, qui assure la défense de l’ex-Président dans cette affaire. En conférence de presse hier, l’avocat français, qui a dénoncé le silence des autorités sur les correspondances qu’il leur a adressées pour avoir les documents relatifs à cette fameuse dette, soutient qu’il ne s’agit pas de «dette cachée» dans ce dossier, mais plutôt de «rapports cachés».Par Dieynaba KANE –
«Nous ne sommes pas dans le cadre d’un dossier de dette cachée, mais de rapports cachés.» C’est la réplique de l’avocat français Me Pierre-Olivier Sur, un des conseils de l’ancien président de la République Macky Sall dans cette affaire de dette cachée dont on l’accuse. En conférence de presse au siège de l’Apr hier, Me Sur a fait un exposé dans lequel il reproche aux autorités, qui se targuent d’être des champions de la transparence, de cacher des rapports. «Le vrai sujet, c’est celui des rapports cachés qui disent que la dette était cachée. Le premier rapport caché est celui de l’Inspection générale des finances. Macky Sall, en décembre 2012, a pris une loi de transposition des règles supra sénégalaises selon lesquelles la transparence devait s’imposer dans la continuité de la gestion des équipes au pouvoir. (…) Ce même mot, transparence, figure dans une loi très récente du 24 aout 2025 sur l’accès de tous les documents administratifs, judiciaires pour les citoyens qui en feraient la demande. Le rapport de l’Inspection générale des finances, qui est le premier à mettre le feu aux poudres, le premier à parler de dette cachée, ce rapport est caché, nul d’entre vous ne peut nous indiquer l’avoir eu entre ses mains. Pourtant, vous êtes la presse, vous êtes la garantie de la transparence de la démocratie. Nous juristes, on passe après. On l’a demandé, on ne l’a pas eu», a-t-il d’emblée fait savoir.
Poursuivant ses propos, l’avocat français note qu’après «ce rapport de l’Igf, il y a eu un pré-rapport de la Cour des comptes», mais celui-ci également est caché. Comme pour le premier, il prend les journalistes comme témoins. «Nul d’entre vous ne l’a eu entre ses mains, pourtant vous êtes la présentation de la transparence et de la démocratie. Nous aussi, nous n’avons pas eu ce document, en dépit des lettres que j’ai adressées il y a maintenant 15 jours au président de la Cour des comptes, au ministre des Finances. Voilà deux rapports cachés. Il y a un troisième rapport caché dont on dit qu’il est d’un cabinet indépendant (Forvis) Mazar. Là aussi, vous l’avez sur les lèvres, vous ne l’avez pas entre vos mains. C’est le rapport d’un cabinet d’audit international qui se dit indépendant», a-t-il fustigé.
S’agissant du rapport définitif de la Cour des comptes, Me Olivier Sur a critiqué le document sur la forme, parce qu’il n’a pas été signé. Et de déplorer : «Sur le rapport de la Cour des comptes, la première chose que j’aurai regardée, c’est la forme : qui l’a signé ? J’apprends par des indiscrétions qu’il n’aurait pas été signé par l’Assemblée plénière, mais par une des chambres. Mais la certitude, nous l’avons par le rapport finalement définitif dont on a eu connaissance. Si toutes les signatures n’y figurent pas, ne serait-ce pas parce qu’un des signataires a refusé de signer ?» Me Olivier Sur, qui regrette le silence des autorités concernant les documents demandés, assure toutefois qu’il n’est pas, pour eux, «question de faire de procès à l’Etat», mais d’intervenir «dans une continuité de l’Etat». Et ce, prévient-il, «dans le respect de ce qui a été fait avant». «Si nous n’avons pas ces documents, nous engagerons une réponse à la non-réponse de l’administration (…)», a-t-il déclaré.
Lors de cette conférence de presse, il a été posé aux avocats de l’ancien Président Sall, s’il y avait une procédure engagée contre lui. Sur ce point, Me Amadou Sall a été catégorique : «Il n’y a aucune procédure engagée contre le Président Macky Sall. Ce qui le fait réagir, c’est une seule chose : l’information des Sénégalais, parce qu’ils ont le droit d’être informés juste. C’est sa seule préoccupation. En dehors de cela, il ne se place dans aucune autre perspective.»
Présidente du Groupe parlementaire Takku Wallu, Me Aïssata Tall Sall a accusé, lors de cette rencontre, l’Etat d’avoir «violé la loi en refusant de communiquer les documents». Et la députée de s’interroger : «Et pourquoi ils ne les donnent pas, qu’est-ce qu’il y a à cacher ?» Pour elle, il s’agit de «documents cachés délibérément par l’Etat du Sénégal». Concernant la procédure de clarification entamée par l’ex-président de la République, Aïssata Tall Sall y voit un acte de courage à saluer. «Vous pensez qu’il est agréable pour un ancien président de la République d’avoir en face de lui une administration dont il a été l’un des grands chefs, lui dire «je sollicite des documents»», et que cette dernière «refuse, et qu’il soit obligé de faire recours à des avocats. Je n’ai jamais vu un exemple du genre dans le monde, mais il a fallu beaucoup de courage moral au Président Macky Sall pour faire ça», a-t-elle déclaré. La présidente du Groupe parlementaire Takku Wallu assure que Macky Sall et ses partisans ne lâcheront pas parce que, souligne-t-elle, «il est facile d’accuser les gens, il est facile, après avoir accusé les gens, d’aller chercher des preuves». «On ne lâchera pas parce qu’on est dans le vrai», a-t-elle assuré.



