Journée internationale de l’écrivain africain : lettre ouverte à l’Association des écrivains du Sénégal


Nous aimerions bien savoir pourquoi nous, écrivains de Saint-Louis (et peut-être aussi des autres régions du Sénégal), n’avons pas été invités à la Journée internationale de l’écrivain africain, organisée au siège de l’Association des écrivains le 7 novembre passé (en fait du 7 au 11). Nous aurions pourtant aimé y prendre part et apporter une contribution intellectuelle et littéraire significative. Nous ne dirons donc pas qu’il s’agit d’un simple «oubli», de toute façon inexcusable, mais plutôt d’un certain manque de considération à l’endroit des écrivains qui vivent et créent leurs œuvres ailleurs que dans la capitale, pour beaucoup «épicentre» de la vie culturelle et littéraire de notre pays. Au nom de mes confrères écrivains de Saint-Louis (berceau de la littérature sénégalaise contemporaine), j’invite donc le bureau nouvellement installé de l’Association des écrivains du Sénégal à faire preuve, à l’avenir, de plus de courtoisie, mais également d’ouverture d’esprit. Des évènements comme celui qui vient de se dérouler à Kër Birago, doivent être ouverts non seulement aux écrivains d’autres pays africains, mais aussi à ceux du territoire national et de la diaspora, qu’ils soient ou non membres de l’association.
Si elle veut être crédible et prise au sérieux, l’Association des écrivains du Sénégal doit s’inscrire concrètement (pas seulement par des vœux pieux ou des professions de foi dithyrambiques) dans une démarche résolument inclusive et fonctionner sur le mode de la transparence absolue. Les statuts qui la régissent doivent être mis à disposition et les portes de Kër Birago, grandes ouvertes à tous ceux qui s’intéressent à la création littéraire, à la littérature. Bien entendu, un écrivain est libre de s’affilier ou non à l’association, mais celle-ci doit éviter d’apparaître comme un repoussoir ou donner l’impression d’être un club d’amis associés en coterie. Ce qui, évidemment, l’éloignerait de sa mission première qui est de promouvoir la littérature et ceux qui la font, les écrivains.
Il faut donc inviter tous les écrivains, et non les éviter. Il faut les inviter à chaque banquet de la littérature, car elle est par excellence le lieu du partage universel des idées. Ce partage s’opère et se manifeste à travers les fictions littéraires, qui sont aussi des œuvres de beauté créées par les écrivains, ces artistes du verbe.
Soyons donc généreux et ouverts, car cette littérature que nous aimons passionnément et pour le rayonnement de laquelle nous sommes prêts à tous les sacrifices, doit avant tout refléter un humanisme profond. Elle doit être un lien indéfectible entre tous les peuples de la terre. Ensemble, faisons de la littérature un pont de lumière entre les cultures, une grande muraille de mots barrage invincible contre l’injustice, la violence, la cruauté, la barbarie et les souffrances incommensurables qu’elles engendrent. Faisons d’elle le réceptacle de nos rêves et de nos espérances, et osons croire que le monde peut être beau.
Veuillez recevoir mes fraternelles salutations.
Louis CAMARA
Ecrivain (Africain)
Grand Prix du président de la République pour les Lettres Saint-Louis

