Kadiatou Diallo est la mère de la famille d’accueil qu’Enda jeunesse action (Eja) a choisie dans le village de Nianao (commune de Wassadou) pour héberger les enfants non accompagnés qui quittent la Guinée-Bissau ou s’y rendent. Elle fait tout sur fonds propres avec enthousiasme. Tout comme le faisait Mère Teresa.

Par Abdoulaye KAMARA – Avare en paroles, Kadidiatou Diallo, la trentaine consommée, l’est moins quand il s’agit de s’occuper des enfants en mobilité risquée à travers les frontières terrestres entre le Sénégal et la Guinée-Bissau. Au forum du village de Diari­counda, samedi dernier, cette mère de 3 filles du village de Nianao (à 3 km de la Guinée-Bissau) a juste dit : «Je m’occupe des enfants non accompagnés qu’Eja me réfère, le temps de retrouver leurs parents. Je leur donne à manger et à boire. Je les blanchis et j’aide à les soigner en cas de maladie. A mes frais.» Taille de basketteuse (à peu près 1, 80m), le voile qu’elle portait ce jour-là laisse apparaître des yeux de biche, avec de rares sourires pour détendre l’ambiance de l’interview. La citoyenne de la commune de Wassadou ajoute : «Dans l’année, depuis 2016, je peux recevoir jusqu’à 8 enfants chez moi. J’ai une chambre libre réservée pour cela. Pour les garçons seulement. Quand je reçois des filles, elles passent la nuit avec mes filles. J’ai une réserve de matelas pour cela.» L’époux, un enseignant, est consentant. «Il m’aide à trouver les moyens d’acheter les ordonnances en cas de maladie.» Mise à l’aise, Kadiatou se lâche de plus en plus, en rechignant à fixer du regard son interlocuteur : «Les garçons sont les plus difficiles à héberger. Ils viennent souvent avec des blessures, en haillons et sans chaussures. Je n’ai pas de garçons pour leur prêter chaussures et habits. Toutes choses qu’on ne trouve qu’au marché hebdomadaire du village qui a lieu le mardi. Je suis obligée d’aller chez les voisins ou des proches pour leur chercher des chaussures et/ou des vêtements.»

Même après le départ de ce projet de lutte contre la migration précoce des enfants d’Eja, Kadidiatou Diallo est déterminée à faire de sa maison une famille d’accueil. Car «je le fais pour moi-même, pour la face de Dieu parce qu’aussi j’ai des enfants et des proches qui peuvent se retrouver dans la même situation, loin des leurs. Je trouve du plaisir à dépenser pour ces enfants. Un stock de chaussures et d’habits pour enfants, en plus d’un partenariat avec le dépôt de pharmacie du village, aiderait à faciliter mon travail», conclut-elle.
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