C’est un vendredi chargé pour les avocats de la partie civile. Leur collègue de la ville de Dakar, Ousseynou Gaye ne les a pas ratés. Avec un verbe offensif, il a demandé à ce que l’état sorte du procès. Des propos jugés par Malick Lamotte de « violence inouïe »
Les plaidoiries continuent ce vendredi. Après le passage de l’Agent judiciaire de l’Etat qui a demandé 6 milliards 830 millions Cfa au motif que le maire et ses co-prévenus auraient détourné des deniers publics, c’est autour de l’autre partie civile d’exiger la «sortie de l’Etat dans ce procès».
Pour Me Mamadou Diaw, conseil de la ville de Dakar, «le procureur veut semer la confusion en parlant de détournement de deniers publics». Selon Me Diaw, «les fonds dont il est question n’appartiennent pas à l’Etat parce c’est les recettes de la ville de Dakar. Il faut savoir qu’il y a une différence entre l’unité de caisse qui est un compte de la mairie au trésor et l’universalité de caisse qui veut dire que l’Etat est libre d’affecter ses recettes là où il l’attend ».
Le verbe beaucoup plus offensif que celui de son collègue, Me Ousseynou Gaye explique que ce procès est une «escroquerie processuelle». Fondant sur son argumentaire sur le fait que la mairie de Dakar ne reçoit d’argent de l’Etat que par 2 moyens. Il s’agit, selon le conseil de la ville de Dakar, du fonds de dotation qui est dédié à des compétences transférées et de l’avance de trésorerie. «C’est pitoyable de constater qu’on ne parle que d’avance de trésorerie qui est une attitude malsaine de politique politicienne. L’Etat refuse de confectionner des rôles d’impôt pour que la ville ne soit pas autonome. En cas de dépense urgente, la collectivité demande à une avance à l’Etat. C’est l’objectif de l’avance de trésorerie qui est un prêt dont l’échéance ne peut dépasser une année. Comment peut-on dire que ce prêt qui sera remboursé sur un délai d’un an a pu financer la caisse d’avance ?» se demande Me Gaye. Qui a qualifié la plaidoirie des avocats de l’Etat de «concert aminé par des usurpateurs».
S’attaquant aux arguments des avocats de l’Etat Me Ouuseynou Gaye note que «l’état n’a pas le monopole des deniers publics». Il a estimé nécessaire de définir le terme. «Sont logés dans les caisses de l’Etat 2 sortes de fonds (…) Les deniers appartenant ou confiés à l’Etat ou aux autres organismes sont des deniers publics » a-t-il déclaré. Par conséquent résume-t-il « étant confiés, les deniers n’appartiennent pas à l’Etat sinon quel sens donné à la décentralisation ? Les 58 milliards de budget Dakar alimentent exclusivement la caisse d’avance. Il n’y a pas d’autres fonds qui alimentent la caisse d’avance. Les fonds de dotation sont dédiés et se font exécuter par les agents de l’Etat. Ces fonds ne sont pas logés à la caisse d’avance». Sur les ristournes qu’avait avancées l’Aje pour prouver le détournement deniers publics appartenant à lEtat, Me Gaye estime qu’il est «désolant de dire qu’elles alimentent la caisse d’avance. L’état est obligé de collecter l’impôt sur le plan national notamment sur les véhicules et de les partager avec la municipalité. Chaque partie a un pourcentage. La part de de la mairie, l’Etat veut s’en accaparer. C’est insulter notre intelligence. Si l’état avait l’esprit républicain, il n’allait pas entrer dans ce procès. En cannibalisant une place qui ne l’appartient pas. L’Etat a perdu l’occasion de signaler que ce procès n’est pas politique».
La robe noire n’a pas raté ses collègues de l’Etat. «Hier pendant toute la journée, un orchestre a aminé un concert. Les usurpateurs, c’est le nom que les conseillers de la ville les ont nommés. L’Etat du Sénégal s’occupe de petit détail parce qu’il fait dans la politique politicienne. C’est de l’acharnement. Si l’Etat voulait montrer que c’est un procès de droit commun et non politique, il devait laisser sa place à la ville» a dit Me Ousseynou Gaye. Un langage qui n’est pas au gout du juge Lamotte. Qui « n’a jamais vu Me Ousseynou Gaye avec cette attitude » tant il a été « d’une violence inouïe » qu’il a tenu à le lui dire.