Mamadou Oury Diallo n’est pas d’accord avec les syndicats d’enseignants qui risquent de compromettre l’année scolaire en cette veille d’élection présidentielle. «Une année électorale n’est pas propice aux revendications», considère cet enseignant vacataire au département d’histoire de l’Ucad, même s’il croit en la légitimité des doléances posées. Ce néo militant de la coalition Benno bokk yaakaar entend certainement par cette manière défendre la politique du Président Macky Sall et le pilotage du système par le ministre Serigne Mbaye Thiam.

Quelle appréciation l’enseignant que vous êtes fait-il des grèves des syndicats d’enseignants qui perdurent dans l’élémentaire et le moyen ?
Les revendications des enseignants sont légitimes, nobles, louables, mais tous les courants réformistes du syndicalisme enseignent que pour rien au monde on ne doit sacrifier l’outil de travail, de production à l’aune de nos ambitions et doléances. En Asie, il y a une manière beaucoup plus évoluée de faire la grève, de revendiquer. Quand ils sont en grève, ils travaillent plus, mais ils attachent des brassards rouges et le patronat est obligé de les appeler à la table des négociations. Il n’y a que dans le système français où quand il y a grève, des gens désertent les lieux de travail.
Aussi au Sénégal, il faut que les gens arrêtent la politique pendant tous les 12 mois de l’année ; il y a un temps pour le travail, un autre pour la politique. En 2012, les gens m’avaient traité de défaillant à la cause syndicale parce que j’étais convaincu que nous faisions fausse route. Ma conviction est qu’une année électorale n’est pas idéale pour poser des revendications. Ce n’est pas le moment propice pour aller en grève. Un régime qui veut se faire réélire va signer tous les accords, pourvu qu’il passe, qu’il gagne les élections. C’est ce qui est arrivé avec Abdoulaye Wade en 2012 et avec Macky Sall après. Ils avaient signé tous les accords avec les syndicats. Qu’est-ce qui s’en est suivi ? Rien.

Est-ce que ce n’est pas le pilotage du système par le ministère de l’Education qui pose problème ?
Au contraire, je salue le courage de Serigne Mbaye Thiam, ministre de l’Education. Parce que ce ministre a le courage de ses réformes. Il a des idées et a le courage de les défendre et de les partager avec le corps enseignant. J’ai eu à discuter avec le ministre. Il m’a dit que son combat de l’instant, c’est de redonner à l’école publique sénégalaise ses lettres de noblesse parce que lui-même, le président de la République et plusieurs autres cadres de ce pays sont des produits de l’école publique. Ils ne peuvent pas ne pas redresser ce système qui, il faut le reconnaître, est ma­lade.

Que pensez-vous du contenu de la plateforme revendicative des syndicats de l’élémentaire et du moyen ?
Les revendications sont légitimes. Considérons seulement les rémunérations appliquées dans l’Admi­nistration ! Le système des rémunérations dans la Fonction publique est très injuste. Un enseignant de la hiérarchie A1 (Bac + 6) est beaucoup moins rémunéré qu’un inspecteur des Impôts et domaines (Bac + 6). C’est injuste. Toutefois, il faut comprendre que la réforme des rémunérations dans la Fonction publique n’est pas quelque chose qui va se faire du tac au tac. Vous touchez quelque part, sans précaution, c’est tout le système qui est déréglé. Nous devons donner du temps au gouvernement tout en continuant la discussion et procéder à d’autres formes de pression. Une année préélectorale ou électorale n’est pas un moment propice pour les grèves. C’est ma conviction.

Vous vous êtes récemment lancé en politique aux côtés du député-maire Mamadou Oury Baïlo Diallo, militant Apr. Pourquoi ?
Je suis né à Vélingara et j’ai grandi ici. Je ne veux pas suivre les pas de nos aînés qui ont réussi et ne veulent pas revenir au terroir, qui préfèrent rester à Dakar et ne pas s’investir pour le développement de leur terroir. Nous, jeunes, avons l’obligation de nous investir, de partager nos connaissances, nos expériences pour le développement de Vélingara. Je me suis lancé en politique parce que j’ai constaté un fait à Vélingara. Les gens avaient l’habitude de gérer les ressources allouées aux Collec­tivités locales sans rendre compte aux populations. Je pense que ça ne doit pas continuer. Ce n’est pas bon. Il faut que les gens cultivent en eux le culte de la reddition des comptes. Que les budgets alloués par l’Etat au conseil départemental et aux communes fassent l’objet de reddition ! Que les citoyens puissent savoir comment ces budgets ont été utilisés !
J’ai aussi constaté que les jeunes s’investissent en politique sans avoir une qualification professionnelle. Comment peuvent-ils se mettre au service des populations sans emploi, sans activités génératrices de revenus, sans avoir une assise financière, une assise intellectuelle ? Si toutes ces conditions ne sont pas réunies, on ne peut pas se mettre au service de la communauté qui devrait être l’objectif de tout engagement politique. C’est ainsi que j’ai décidé d’apporter ma contribution au développement de Vélingara.
Il faut dire que j’ai été démarché par le député-maire Mamadou Oury Baïlo Diallo, président de la Commission contrôle et comptabilité de l’Assemblée nationale. Que j’aide à la réflexion et à l’orientation de ses actions pour la commune, mais aussi pour la massification de son parti, l’Apr. Je n’ai pas encore pris la carte de l’Apr. Je suis d’héritage socialiste, de par ma famille.