Les cheminots retraités qui exigent le paiement de leurs indemnités de départ à la retraite ont bloqué hier, pendant une heure, le trafic du Petit train de banlieue Tivaouane-Thiès-Dakar à la gare ferroviaire de Thiès.

«On ne va plus laisser Thiès qui est ville cheminote entre des mains d’opportunistes, de politiciens véreux. Nous allons descendre sur le champ politique pour nous faire entendre.» Cette déclaration a été faite hier par quelque 200 cheminots retraités de Dakar-Bamako-ferroviaire qui se sont allongés sur les rails afin de bloquer le Ptb Tivaouane-Thiès-Dakar, à hauteur de la gare ferroviaire de Thiès. Ces ex-travailleurs du rail qui ont presque tous totalisé plus de 40 ans de service réclament le paiement de leurs indemnités de départ à la retraite estimées à environ 800 millions de F Cfa. Madiodio Diagne pense que «réclamer des indemnités deux ans après notre départ, c’est trop». Il s’étrangle : «Déjà, sur la liste de près de 200 ex-travailleurs que nous sommes, plus de 20% sont décédés, d’autres sont gravement malades et ne peuvent pas se soigner. Pendant que nos autorités sont plus promptes à régler des problèmes de moutons morts par-ci, des détails autour des billets pour le pèlerinage à la Mecque par-là, nous, nous ne faisons que réclamer un dû, un droit et pas une faveur.» Pour l’ex-cheminot, «les autorités, pendant qu’elles sont en train de dilapider l’argent du pays dans des futilités, dans la chose politique, auraient dû consacrer leurs efforts à la relance du chemin de fer. C’est une honte pour notre pays». Et de cracher : «Le pays est en danger, le Peuple doit tourner le dos au Président Macky Sall» ; d’où leur implication, désormais, dans le champ politique. «Nous serons-là et nous ferons face pour qu’on nous paie notre dû. Ce qu’on a constaté aujourd’hui au Séné­gal, c’est que si tu ne fais pas de la politique, tu es foutu. Maintenant, les cheminots vont désormais parler à leur nom, vont se manifester», avertit Mamadou Madiodio Diagne, porte-parole du jour. Le membre du Collectif des retraités de Dbf/Sénégal se veut catégorique : «On est en train de changer de façon de faire, c’est une autre façon de lutter et ça va aller crescendo. Aujourd’hui, on a bloqué les rails, donc on a garé les trains. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que les cheminots ne vont plus se laisser faire, personne ne parlera à notre place, on va prendre en main notre destinée, on ne va plus laisser notre avenir ou celui de Thiès entre ces soi-disant politiciens qui font tout sauf de la politique, parce que la politique, c’est l’art de bâtir la cité.» Il ajoute : «Si aujourd’hui on parle de Thiès, c’est grâce au chemin de fer. Mais tout le problème des politiciens, c’est d’enterrer le chemin de fer. Maintenant avec le recul, on s’est dit que ce qu’il faut, c’est de descendre sur le champ politique et prendre notre destin en main. Et très bientôt les Séné­galais seront édifiés. Et nous avons décidé de s’engager en politique pour battre campagne contre le gouvernement de Macky Sall.» Madiodio Diagne et ses camarades se plaignent surtout du fait que «voilà 2 ans et 6 mois que nous courons après notre dû et nous avons remarqué que nos autorités n’ont pas la volonté de nous payer notre argent». Et de remarquer : «Elles veulent nous pousser vers la grève de la faim et le syndrome des étudiants pour qu’on puisse tuer l’un d’entre nous pour pouvoir ensuite solder. On ne va pas les suivre sur ce chemin.» Mais, soulignent-ils, «ce qui est sûr, c’est qu’à partir d’aujourd’hui, on va prendre notre destin en main, on va descendre sur le champ politique et elles verront que nous sommes aptes à faire face. Les cheminots se sont maintenant réveillés, ils sauront, en tant que Sénégalais à part entière, montrer de quel bois ils se chauffent, d’autant que le rendez-vous du 24 février 2019 n’est plus loin». L’ex syndicaliste du Sut/Rail qui pense que «s’engager en politique est le seul chemin pour régler nos problèmes» s’offusque du fait que «le drame est que même l’opposition n’a pas parlé pour le chemin de fer». Ayant hérité la politique de «nos anciens grâce à qui aujourd’hui le Sénégal est indépendant», les retraités de Dbf, qui estiment que «la situation est extrêmement critique», demandent à tous les cheminots d’«aller en campagne contre le Président Macky Sall». Ils informent que «le chemin de fer est à l’arrêt depuis plus de sept mois» et ne manquent pas de rappeler que «le ministre Abdoulaye Daouda Diallo était là, il y a quelque quatre mois, avec des promesses fermes, mais qu’il n’a jamais tenues».
Les cheminots ont mis fin à l’arrêt du trafic après avoir négocié avec le commissaire central de Thiès qui dit, à travers son intervention, avoir agi au nom du ministre de l’Intérieur. Et finalement, le train a repris ses mouvements avec un retard d’une cinquantaine de minutes. Les cheminots, qui ne décolèrent toujours pas, ont ensuite perturbé le forum sur la reprise du chemin de fer organisé à l’auditorium de l’Université de Thiès.
nfniang@lequotidien.sn