CNLS – Elimination de la transmission mère/enfant d’ici à 2020 : Les acteurs comptent sur un engagement communautaire

Le rôle de la communauté est essentiel dans la lutte contre la Transmission mère enfant du Vih/Sida. C’est l’avis des acteurs de la lutte. Au-delà des moyens de prévention, de traitement, mis en place par le gouvernement, la communauté, notamment les époux, la famille et surtout les femmes enceintes, doit s’engager pour qu’il n’y ait plus un enfant qui naisse avec le virus du Sida. Les acteurs invitent également la société à davantage accepter les femmes séropositives et à les soutenir pour ainsi diminuer le fardeau de la stigmatisation qui pèse sur elles.
Il est inacceptable qu’en 2019 qu’un enfant naisse avec le Vih/Sida. Ainsi parlait la secrétaire exécutive du Conseil national de lutte (Cnls) contre le Vih/Sida, lors de la cérémonie d’ouverture des 2èmes journées scientifiques Vih. Dr Safiétou Thiam a sans doute raison en lançant ce cri du cœur. Car aujourd’hui, le Sénégal dispose de tous les moyens de prévention, de traitement et de suivi pour que les enfants ne naissent pas avec le Vih. Mais, le constat est que des enfants continuent de naître avec le Vih au Sénégal. Qu’est-ce qu’il faut faire ? Dr Khady Fall Traoré, en service à la Division Sida, estime qu’au-delà des moyens mis en place, il faut un engagement communautaire. «Les femmes doivent comprendre qu’une femme séropositive peut avoir un enfant sain», rassure déjà Dr Fall.
Poursuivant son propos, Khady Fall Traoré ajoute que les femmes enceintes devraient également venir très tôt dans les structures de santé. Mais, le constat est que jusqu’à présent, raconte-t-elle, «des femmes enceintes viennent tardivement faire leurs consultations prénatales (Cpn), certains ne viennent même pas. D’autres refusent tout bonnement le dépistage». Même si il faut noter un taux d’acceptation du test assez élevé de 90%. Autre difficulté soulignée, les perdues de vue. «Des femmes qui commencent le traitement et qui abandonnent en cours de chemin le plus souvent à cause de la stigmatisation car la plupart des femmes positives ne partagent pas leur statut sérologique avec le mari ou la famille», témoigne toujours Mme Fall.
Pourtant, la Ptme est très efficace de l’avis de Dr Fall. Dès que la femme est dépistée et qu’elle est positive, un paquet de services complet lui est offert et gratuitement. Aujourd’hui, pour plus d’efficacité, la Ptme a mis en place une nouvelle stratégie. Il s’agit de l’intégration des services. C’est-à-dire que les prestataires donnent le paquet de soins là où la femme s’est fait dépister. Le programme a mis en place une autre stratégie, la délégation des tâches. Celle-ci consiste à former les sages-femmes, les paramédicaux dans les postes où il n y a pas de sage-femme. «On ne réfère plus chez le médecin. Au niveau des postes on a commencé la décentralisation. Même si c’est encore timide», reconnaît Khady Fall Traoré. Et d’ailleurs, fait-elle savoir, «cette année, la bataille sera que les sages-femmes et certains paramédicaux puissent s’engager à prendre en charge les femmes enceintes séropositives : c’est-à-dire leur donner les Arv, les soutenir et les accompagner durant toute la grossesse et même après l’accouchement pour s’assurer que l’enfant est sain et sauf», révèle Dr Fall.
C’est donc un pari pour le Ptme mais aussi un pari pour la communauté et les prestataires. «Il nous faut l’engagement de tous pour booster les indicateurs», rappelle encore Mme Fall. Et c’est ce qui explique sans doute les campagnes de rattrapage initiées par le Cnls. De 2014 à 2016, malgré les interventions et les stratégies mises en place, le taux de transmission mère/enfant du Vih est stagnant passant de 3,1% à 3,16%.
Cette année, la campagne a été un peu ralentie par la grève des agents de santé. «On n’a pas pu mobiliser les femmes pour le dépistage. On a juste travaillé avec les sages-femmes», renseigne Diakhou Bâ. Maintenant que la grève est finie, «les districts vont analyser les données de 2018 et une fois les gaps connus, des stratégies seront mises en place pour atteindre les objectifs de 2019», note-t-elle.
En attendant ce bilan, les acteurs lancent un appel à la communauté. Ils veulent que les femmes enceintes, quel que soit le lieu où elles se trouvent, aillent dans les structures de santé pour faire la Cpn. «La Cpn n’a que des avantages, au-delà du dépistage, on fait faire à la femme une série d’examens pour son bien-être et celui de son bébé», rappelle Dr Fall. Les hommes également sont concernés par cet appel. Selon les acteurs, ils doivent davantage s’impliquer en accompagnant leurs femmes pendant la grossesse. Quant à la communauté, elle doit accepter les femmes séropositives. «Ce n’est pas parce que il y’a eu tel comportement ou telle attitude, c’est juste une maladie. Elles ont besoin d’être soutenues et aidées», estiment les acteurs de la lutte. En 2018, la Ptme avait lancé la campagne Ndèye Dické. Une façon pour le Programme de se battre pour garder les femmes séropositives, en leur assurant un traitement antirétroviral et un suivi régulier pour le bien de la mère et de l’enfant.