La commune de Mboro, dans le département de Tivaouane, a étrenné, ce samedi, son premier centre de formation en langue et signes dénommé «Yaakaar». A l’initiative de l’Association hu­manitaire Mboro en partenariat avec l’Association pro Sénégal (Aprosem) et l’Association pour l’intégration des personnes handicapées, le centre, selon Abdallah Diaw, a été érigé pour donner «un brin d’espoir» aux enfants sourds-muets. En effet, constate le pharmacien et président de l’Aprosem, «pendant les sept ans que nous organisons des journées de consultation avec des audioprothésistes, des orthophonistes et des ophtalmologues, nous recevons plein de monde surtout des enfants malentendants. Lesquels ont été équipés en appareil auditif pour améliorer leur écoute. Mais malheureusement pour ceux qui étaient sourds-muets on ne pouvait rien faire. Il fallait donc trouver une alternative». D’où l’idée, selon M. Diaw, de construire un centre «qui enseigne le langage des signes pour ces enfants». Outre le centre éducatif, la construction d’une école de formation professionnelle est prévue, selon le Président de l’Aprosem. Parce que à l’en croire, «le niveau de l’éducation en langage des signes s’arrête en 3e secondaire. Et après ce niveau il n’y a pas encore dans le circuit scolaire des établissements qui peuvent accueillir les enfants sourds-muets pour que ces derniers puissent bénéficier des études supérieurs». Abdallah Diaw insiste sur la nécessité de créer une école de formation professionnelle pour l’intégration des sourds dans le circuit professionnel. A sa suite, le président de l’Association humanitaire Mboro, Thibault Dumoulin, a salué la pertinence du projet qui entre dans le cadre de l’amélioration de la prise en charge de la santé notamment «dans les oreilles et dans les lunettes». Il dit : «Depuis toutes ces années que nous intervenons ici, on appareille les petits enfants avec, pour certains, de très bons résultats. Ils peuvent réintégrer le cadre de l’école normale. Mais dans d’autres cas ce n’est pas possible parce qu’ils ont une surdité qui est trop importante. Du coup, soit on les laisse comme ça, et ils n’ont aucune possibilité de communiquer ni avec leurs familles ni avec leurs amis, soit on essaye de leur donner une chance d’apprendre un nouveau mode de communication qui est le langage des signes.» M. Dumoulin signale en outre : «Il existe plusieurs écoles dans le Sénégal mais aucune dans ce département.» Alors que, estime-t-il, «il y a énormément d’enfants sourds, comme partout dans le monde. Sauf qu’ailleurs on arrive à les prendre en charge très tôt et qu’ici comme ils ne sont pas pris en charge en étant petits, une fois adultes ils n’ont pas de moyens de communication». Au total près d’une centaine d’enfants sourds ont été recensés, d’après le président de l’Association humanitaire Mboro, dans la commune lors d’une campagne de sensibilisation dans tous les villages aux alentours de la localité. Mais, précise-t-il, «pour espérer donner la meilleure éducation possible et plus de chance à ces enfants, il a fallu poser des critères notamment l’âge et les handicaps associés. C’est-à-dire tous les enfants qu’on a pris au niveau du centre ils sont uniquement sourds. Il n’y a pas de handicapés mentaux ni psychiques etc.». Une initiative largement saluée par le directeur du centre «Yaakaar», Ndiougua Minty. Surtout que, fera-t-il noter, l’éducation des sourds-muets a été depuis toujours le parent pauvre du système éducatif. «Ils sont les seuls handicapés margina­lisés au Sénégal», dit-il. Aussi, ajoute-t-il, «les parents des sourds dépensaient près de 1,2 million de f Cfa par an pour la prise en charge de leur éducation à Thiès qui abritait le seul centre dans la région». Ainsi, il a plaidé à plus de réflexion pour élargir l’enseignement professionnel pour les enfants sourds pour que ces derniers puissent aller à l’université. Egalement, la construction de plus de centres en langage des signes.

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