Daaray Sembene, Ecole populaire de 7 à 77 ans, porte l’héritage social du père du cinéma africain, disparu le 9 juin 2007, selon sa directrice Dr Hadja Maïmouna Niang. Elle forme en français appliqué par la pédagogie de l’image et Ecole et langues nationales (Elan) des centaines de personnes, en particulier des chauffeurs, commerçants, ouvriers, entrepreneurs…qui ne savaient ni lire ni écrire.

Alliant la craie à l’écran, Dr Hadja Maïmouna Niang continue de faire vivre l’œuvre du père du cinéma africain à travers son école. De sa fonction d’enseignante-chercheure à l’Université de Thiès où elle dirige depuis quatre ans le département Lettres à Daaray Sembene, Maison de la pédagogie de l’image (Mpi) qui ambitionne de faire scolariser tout Sénégalais de 7 à 77ans. «Daaray Sembene, fondée en 2008 est la concrétisation d’un souhait sous-entendu de Sembene formulé en 1962 dans son film, La Noire de…, premier long métrage d’Afrique noire francophone, où Sembene joue le rôle de l’enseignant dans un espace où il est écrit Ecole populaire», explique Mme Niang, qui relève que «Daaray Sembene est une Ecole populaire de 7 à 77 ans et reçoit des personnes qui n’ont jamais fait l’école ou qui ont abandonné tôt les études». En clair, «dans cette Ecole populaire, des adultes sont les apprenants». Et cette mission de l’inclusion sociale chère à Sembene Ousmane, selon l’écrivaine-réalisatrice et universitaire, a fait que Daaray Sembene a formé en 2018 durant deux mois des sourds-muets en collaboration avec trois étudiantes françaises en master didactique de l’image à l’université Paris 3 Sorbonne en stage à l’école. «C’est la plus riche expérience que nous avons eue, car nous avons formé des sourds-muets par la pédagogie de l’image et actuellement, ils utilisent bien les réseaux sociaux et arrivent même à identifier leurs besoins dans les services médicaux et publics». Aussi et pour protéger l’idéologie de l’écrivain et cinéaste sénégalais, «l’Ecole populaire a formé en français appliqué par la pédagogie de l’image et Ecole et langues nationales (Elan) des centaines de personnes, en particulier des chauffeurs, des commerçants, des ouvriers, des entrepreneurs, et même des fonctionnaires qui ne savaient ni lire ni écrire, et qui, au bout de leur formation, font mieux fonctionner leurs activités». Une façon, selon ce titulaire d’un master professionnel didactique de l’image à l’université Paris 3 Sorbonne nouvelle, Hadja Maïmouna Niang, de maintenir le souvenir de Sembene à travers cette école. «Il y a un souvenir idéologique de Sembene, selon lequel les études sont primordiales et qu’il faudrait l’école pour toutes et pour tous. Je rappelle que Sembene Ousmane a quitté les bancs à l’âge de 11 ans suite à des démêlés qu’il a eus avec son instituteur. Il est ainsi fiché, interdit de l’école publique. Il s’est inscrit à l’école du soir, en quelque sorte l’école du quartier.» «Mon souhait c’est que tout Sénégalais apprenne au minimum à lire et à écrire. Et qu’on commence par le français, la langue d’usage employée dans les activités quotidiennes au Sénégal, en attendant l’usage du wolof appliqué.»
Au-delà des enseignements qui y sont dispensés, Daaray Sembene dispose également d’une Bibliothèque populaire où les films et les œuvres littéraires du père du cinéma sont exposés. «Nous sauvegardons les films de Sembene. Quant à la protection, elle revêt d’office un aspect juridique et Daaray Sembene n’est pas habilité, car il n’est pas un ayant droit. La protection peut aussi revêtir un aspect technique, et c’est là que Daaray Sembène souhaite aussi intervenir dans le futur par un procédé de numérisation des films de Sembene Ousmane et ceux du cinéma sénégalais, voire africain». Car de l’avis de Mme Niang, «sans la protection technique, le Sénégal risque de perdre ses documents audiovisuels». Elle a donc demandé l’Etat, «d’intervenir pour préserver le patrimoine cinématographique et audiovisuel. La protection des films de Sembene Ousmane peut être aussi d’ordre idéologique».