L’objectif du dialogue national est d’occuper la classe politique au cours de l’ajustement structurel. C’est le sentiment de Abdoul Mbaye qui s’attend à une année de «tensions économiques et sociales en 2020».
«L’ajustement structurel est inévitable.» Comme son kaftan bleu sombre, Abdoul Mbaye a dépeint une situation économique sénégalaise peu reluisante. En conférence de presse hier, le leader de l’Alliance pour la citoyenneté et le travail (Act) s’est attaqué aux «mauvaises options» de Macky Sall. L’ancien Premier ministre s’appuie sur «une économie non dynamique qui génère un déficit budgétaire en augmentation et qui a atteint 3,6%, dépassant le critère de l’Uemoa». Il dit : «Il y a aussi l’accroissement du déficit des paiements extérieurs. C’est le cas de l’économie sénégalaise. Vous êtes obligé de réajuster.» Le premier Pm de Macky Sall s’est basé sur la hausse de certains prix du secteur énergétique pour étayer son argumentaire. «Quand on réduit le pouvoir d’achat des ménages, on a un effet positif sur les paiements extérieurs. Pour ce système d’ajustement structurel qui se met en place et chapeauté par le Fmi, il faut que le Sénégal accorde la priorité au remboursement de la dette extérieure. Si vous voulez qu’on vous accompagne, il faut privilégier le remboursement de la dette extérieure. Or celle du Sénégal a atteint des sommets excessifs. On restera dans l’ajustement structurel pendant 2 ou 3 ans», a dit M. Mbaye qui prédit aussi que «l’année 2020 sera une année de tensions économiques et sociales».
«Le dialogue national a un objectif d’occupation de la classe politique pendant l’ajustement structurel»
Pour l’opposant, le gouvernement est dans une logique d’augmentation des recettes en passant par l’impôt et la fin des subventions. C’est ce qui explique, d’après le président de l’Act, cette décision de mettre fin à la politique d’orientation des étudiants dans le privé. «Mais quand vous devez resserrer, vous ne pouvez pas tout de suite licencier des fonctionnaires. Vous ciblez les dépenses d’exploitation que vous pouvez réduire. On essaie de bousculer les capacités d’accueil des universités publiques. Les entreprises n’ont qu’à se préparer parce qu’elles vont recevoir des visiteurs très sympathiques dans les mois à venir», a-t-il ironisé.
Ainsi, le dialogue national devrait permettre, selon Abdoul Mbaye, de détourner les politiques de l’essentiel. «Famara Ibrahima Sagna est une personnalité de grande qualité. Il n’est pas le problème. Mais on a vu les travaux de Amadou Makhtar Mbow. Macky Sall les a jetés à la poubelle. On a un régime qui s’est spécialisé dans le gâchis de compétences. Je juge le dialogue national en fonction de son initiateur qui est le Président Macky Sall. C’est son 3ème dialogue national et il nous a, à chaque fois, trompés. Donc, je suis pessimiste. Le dialogue national a un objectif de diversion et d’occupation de la classe politique pendant que l’ajustement structurel se déroule», a-t-il conclu.
Remplacement annoncé du franc Cfa par l’Eco : Abdoul Mbaye y voit «la victoire de la jeunesse et des activistes»
Le remplacement annoncé du franc Cfa par l’Eco est une «victoire de la jeunesse et des activistes», d’après Abdoul Mbaye. Le leader de l’Act qualifie cette réforme d’«importante» et «historique». «Elle satisfait à notre réclamation de dignité de la part de notre jeunesse. Mais la réforme doit se poursuivre parce qu’il y a des aspects qui ne sont pas abordés et la parole doit être donnée aux opérateurs économiques de nos pays», a-t-il souligné lors de sa conférence de presse hier. L’ancien Premier ministre considère que les polémistes ont obtenu gain de cause avec le départ de la France des organes de la Bceao. En revanche, le banquier de profession ne trouve «pas essentiel» le débat sur l’arrimage de l’Eco à l’Euro. «La fixité à l’Euro est différente d’une fixité par rapport au franc français. Le Maroc a une sorte de fixité à l’Euro. Ce pays gère au jour le jour ses transactions économiques. Ce n’est pas un débat majeur», estime-t-il.
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