Accès des femmes aux terres : La précarité des droits fonciers décriée
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Par Khady SONKO –
La Journée internationale de la femme rurale a été célébrée hier sur le thème : «Les femmes rurales cultivent une bonne nourriture pour toutes et tous.» Ce sujet met en relief le rôle essentiel que jouent les femmes et les filles rurales dans les systèmes alimentaires du monde. Au Sénégal, la femme rurale est marquée du sceau de la précarité en termes d’accès et de jouissance effective aux ressources foncières. A ce jour, l’accès des femmes rurales aux ressources foncières et aux autres facteurs de production reste une forte préoccupation pour répondre aux objectifs du développement durable eu égard au contexte de la gestion responsable des ressources naturelles et de la réduction de la pauvreté.
Des études montrent que seulement 11% parmi elles possèdent les terres agricoles qu’elles exploitent alors qu’elles représentent plus de la moitié de la population nationale. «Cette situation est injuste et fragilise les droits fonciers des femmes. Cette fragilité est source d’insécurité alimentaire et de plusieurs défaillances des systèmes de production», lit-on dans un communiqué de l’Alliance nationale pour la promotion des droits fonciers des femmes.
La situation économique et sociale des femmes génère et consolide la tendance à la féminisation de la pauvreté dans ce pays. «Elle est exacerbée par la faible implication des femmes rurales dans les institutions foncières, à commencer par l’échelle de la famille, le village et la collectivité territoriale», regrette l’Alliance des femmes.
Pourtant, la Constitution du Sénégal stipule que «l’homme et la femme ont le droit d’accéder à la possession et à la propriété de la terre dans les conditions déterminées par la loi».
Divers mobiles expliquent la précarité des droits fonciers des femmes rurales. A côté des règles et pratiques coutumières, il faut faire cas de la pauvreté des femmes qui n’ont pas souvent les moyens de payer des droits de bornage ou encore la capacité financière de mettre en valeur les terres. Aussi, la législation foncière, au-delà de la méconnaissance des procédures, n’est pas souvent en faveur de la femme du fait de sa double identité de femme appelée à se marier et à quitter la maison familiale. On estime que, dans ce cas, lui donner la terre entraîne la dislocation du patrimoine foncier familial. En outre, la femme est aussi désavantagée par la loi, notamment en cas de veuvage suite au décès du mari, sachant que la demande de réaffectation doit être introduite sous trois mois, alors que la femme doit observer le veuvage sur un délai de quatre mois.
Alors qu’au Sénégal, le contexte reste marqué par le débat politique sur l’emploi et/ou l’employabilité des jeunes et des femmes, l’accès et le contrôle des ressources foncières apparaissent comme une solution incontournable. En effet, le secteur agro-alimentaire et ses activités connexes constituent le principal secteur pourvoyeur d’emplois en milieu rural.
l’Alliance nationale pour la promotion des droits fonciers des femmes appelle l’ensemble des acteurs à œuvrer pour un Sénégal où les hommes et les femmes sont conscients de l’importance du respect des droits des femmes en termes d’accès, de contrôle effectif, de sécurisation et de valorisation des ressources foncières et agissent en conséquence. cette plateforme nationale invite l’Etat du Sénégal et les partenaires au développement à intensifier leurs efforts pour une gouvernance équitable, égalitaire et transparente des ressources foncières mais aussi à donner corps à la recommandation des chefs d’Etat de l’Union africaine d’affecter au moins 30% des terres de manière documentée aux femmes…
ksonko@lequotidien.sn