Malgré un débat tendu et des heures de heurts, l’Assemblée nationale a voté le projet de loi autorisant le président de la République à ratifier l’accord de coopération inter-Etats sur le développement et l’exploitation des réservoirs du champ Grand Tortue/Ahmeyim (Gta). Les prévisions sont estimées à 560 milliards de m3 de gaz.

La signature des accords le 9 février dernier à Nouakchott sur le gaz avait suscité les critiques de l’opposition. C’était aussi le cas hier à l’Assemblée nationale lors du vote du projet de loi pour le partage inter-Etats des découvertes gazières. Malgré le non-assentiment de l’opposition, le texte est passé. Ce qui prévoit le partage des ressources gazières évaluées à près de 560 milliards de m3 localisées entre les deux pays. Le ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur explique les enjeux : «L’objet du présent accord est de définir le cadre pour faire une exploitation future d’un don de Dieu. Et c’est du temps de Macky Sall, un homme de dialogue. Il appelle tous les segments de la société dans le cadre d’une discussion pour dire ce que nous allons faire.» Sidiki Kaba opte pour une gestion intelligente dans la mesure où il s’agit d’un bien commun. «C’est un accord équilibré et gagnant-gagnant. Rien n’est vendu, rien n’est encore exploité. C’est la transparence, le Sénégal a signé l’ensemble des contrats pétroliers. Il y a une communauté d’intérêts et il faut une zone d’unitisation (sic) et personne n’a choisi la zone d’apparition ; ce pétrole est à cheval entre les deux frontières. On ne peut pas le nier. Nous l’exploitons ensemble. Le contraire pourrait conduire à des tensions. L’eau et les ressources naturelles sont souvent sources de conflits», assure-t-il, tout en affirmant que l’accord bipartite favorise la paix et évite un héritage de paix aux générations ; d’où son slogan : «Paix, piété et pardon».

Sonko exige 80% pour le Sénégal
Tous deux habillés en blanc, c’était chaud entre le leader de Pastef et le président de l’Assemblée nationale Moustapha Niasse. Tout est parti de cette déclaration du dernier nommé : « J’ai trois correspondances dont celle de Ousmane Sonko qui parle de question préjudicielle. Notre Règlement ne prend pas en compte cet aspect. Donc, il reste celles de Cheikh Bamba Dièye et de Cheikh Abdou Mbacké.» Suffisant pour que son collègue Ousmane Sonko se lève, se dirige vers lui avec son boubou traditionnel et son bonnet. Un tête-à-tête avant que le président de l’Assemblée ne boude la salle. «Il faut que Niasse sache que l’Assemblée nationale ne lui appartient pas», lance Ousmane Sonko, avant de regagner sa place. 27 minutes après, Niasse revient le sourire aux lèvres avec les applaudissements de plusieurs parlementaires. Pour lui, cet accord est une poudrière dans la mesure où la Mauritanie a une population de 3 millions d’habitants. «Ceux qui parlent de voisinage sont des hypocrites. La plus grande partie des ressources se trouve au Sénégal. Je propose 80% pour le Sénégal», dit Sonko.

Cheikh Bamba Dièye parle de complaisance
L’ancien maire de Saint-Louis est dubitatif concernant les découvertes gazières. Il s’offusque de la soumission «précipitée» de l’accord au Parlement : «Nous devons voir si les termes de l’accord sont compatibles avec nos intérêts. Les ressources naturelles appartiennent à des générations. Par le passé, nos gouvernants ont fait preuve de largesse à l’endroit de nos voisins. Le bon voisinage est que chacun prenne ce qui lui appartient et qu’on se partage ce qui est au milieu. Nul n’a le droit d’aliéner le patrimoine national. On ne doit rien offrir. La rigueur s’impose, mais pas la complaisance. Je demande l’ajournement de la séance pour qu’on étudie davantage la question. Le questionnement est important actuellement.»
Pour Madické Niang, président du groupe parlementaire Démocratie et liberté, les deux pays doivent se concerter en prenant en compte les préoccupations des Peuples. «Je recherche un débat sincère. Macky Sall doit d’abord discuter avec le Peuple avant de prendre une quelconque décision», dit-il.

Sonko, Déthié Fall et Mansour Sy Djamil n’ont pas voté
Ces députés de l’opposition ont, dès les premières heures de la journée, affirmé leur opposition à cet accord. Ils s’en sont pris au ministre des Affaires étrangères et au président de l’Assemblée nationale. Les députés Ousmane Sonko et Mansour Sy n’ont eu droit qu’à une prise de parole avant de quitter la salle pour ne jamais revenir. Le vote a donc eu lieu sans eux.