Le ministre de la Santé et de l’action assure que le décès de Astou Sokhna était évitable. Il l’impute à un dysfonctionnement interne à l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye de Louga.Par Justin GOMIS

– Le décès de Astou Sokhna pouvait être évité. «A travers une bonne évaluation du risque et une surveillance durant son séjour à la maternelle, il est considéré comme un décès maternel évitable», assure Abdoulaye Diouf Sarr lors d’une conférence de presse hier, pour évoquer ce drame qui émeut tout le pays. Selon le ministre de la Santé et de l’action sociale, les rapports de mission d’inspection administrative conduite par l’Ins­pection interne de son département, (composée de la Direction de la santé, de la mère et de l’enfant, de la Direction des établissements publics de santé) et de la Chaire de gynécologie de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, chargées de faire l’audit technique du décès de la patiente, ont montré qu’il «n’y avait pas de particularités relativement aux antécédents médicaux concernant Astou Sokhna». Quid de ses antécédents chirurgicaux ? «La patiente avait bénéficié d’une césarienne il y a trois ans, plus précisément le 30 mars 2019 à 4h 40 mn, pour hématome rétro placentaire avec naissance d’un nouveau-né décédé au 7ème jour de vie. Les rapports indiquent en outre que Madame Astou Sokhna était suivie aux services de cardiologie et de néphrologie de l’Hôpital régional de Louga, pour respecter les protocoles de suivi du syndrome vasculo-rénal», indique Abdoulaye Diouf Sarr. Il ajoute : «Durant sa grossesse, elle a fait quatre consultations prénatales qui n’ont décelé aucune anomalie. Elle a également effectué une visite de suivi le 28 mars 2022 à l’hôpital, au cours de laquelle un bilan préopératoire a été demandé en vue d’une césarienne prophylactique de prudence. Le 31 mars 2022, elle s’est présentée à l’hôpital pour des douleurs abdomino-pelviennes sur une grossesse de 9 mois, ce qui a motivé une hospitalisation.» Selon Diouf Sarr, «c’est le 1er avril 2022, à 6h 50 mn, que la sage-femme de garde a été appelée au chevet de la malade par la famille pour voir son état. C’est à ce moment qu’elle a constaté le décès, qui sera confirmé par la gynécologue d’astreinte à 7h 36 mn». D’après lui, «le dossier ainsi présenté ne met pas en évidence des éléments en faveur du premier retard, c’est-à-dire une reconnaissance des signes de danger par la patiente, ni du second retard, à savoir l’accessibilité géographique et financière sans particularité». Cependant, admet le ministre de la Santé et de l’action sociale, il y a des dysfonctionnements. «On note des éléments en faveur du troisième retard qui est lié à la structure objectivant un déficit dans la qualité des soins reçus, à type d’insuffisance de diagnostic, c’est-à-dire l’évaluation non optimale du risque et l’insuffisance dans la surveillance», expose Abdoulaye Diouf Sarr. Par conséquent, il estime que la mort de Astou Sokhna «est un décès maternel évitable».
Face à ce constat, le gouvernement a pris des mesures administratives comme le limogeage du Directeur général de l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye et la suspension des 8 employés impliqués dans le décès de la dame. Malgré la tempête provoquée par cette affaire, M. Sarr salue la qualité du personnel de santé du pays et son professionnalisme reconnu à travers le monde. «Les données en matière de santé maternelle et infantile en attestent. En effet, la mortalité maternelle a baissé, elle est passée de 392 décès pour 100 mille naissances vivantes en 2010 à 236 décès en 2017, le Sénégal est classé premier dans la zone Uemoa. La mortalité infanto-juvénile a elle aussi fortement baissé, elle est passée de 72 pour mille en 2010 à 37 pour mille en 2017. Il en est de même de la mortalité néonatale, qui est passée de 29 pour mille naissances vivantes en 2010 à 21 pour mille en 2019», indique-t-il. Par contre, il admet que la prise en charge pose problème. «Mais, des efforts seront consentis dans ce sens», rassure le ministre de la Santé. En conséquence, il promet de mettre un accent particulier sur la formation du personnel de santé, notamment à travers le projet «Investir dans la santé de la mère, de l’enfant et de l’adolescent», d’un montant de 70 milliards F Cfa. «Il permettra d’améliorer l’utilisation des services essentiels de santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile et de l’adolescent, répondant aux normes de qualité», conclut-il.
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