Ouverte hier à Marrakech, au Maroc, la 12e Assemblée générale de l’Union africaine de radiodiffusion (Uar) a comme principal thème : «L’apport des régulateurs dans le processus du passage de l’analogique au numérique.» Ses membres ont longuement échangé durant la matinée sur la question. Présidente de l’Uar, Mme Keitirele Mathapi a, dans son speech, salué l’opportunité d’échanger avec les différents membres sur la question qui est devenue un aspect important dans le processus de développement des médias en Afrique.
Hôte de la 12e Assemblée générale, le Maroc vient renforcer les ambitions de l’union, dira le directeur des ressources humaines de la Snrt, Zakaria Hachlaf. A ce titre, il a estimé qu’il faudra «faire du continent, une terre d’avenir», reprenant des propos du Roi du Maroc, Mohamed VI.
Si l’échange et le contrôle de contenus est une condition sine qua non, M. Hachlaf a indiqué que «la régulation fait partie de la solution. Nous sommes appelés à ériger les points de vigilance (web, usage individualisé, la société du buzz, la société publicitaire, la pression des réseaux sociaux sur les médias public-privé). Ce qui nous attend est lourd et pertinent». Sous ce rapport, a poursuivi le Dg juridique de la Snrt, «cela passera naturellement par une grande volonté politique». Comme c’est le cas au Maroc «dans la régulation des médias avec 15 ans d’expérience, basée sur l’expertise interne».
Au cours des débats, les membres ont posé le problème de la déontologie. «Une affaire propre aux journalistes», diront certains. «La liberté est la base. Les opérateurs doivent garantir cette indépendance. Les régulateurs ne doivent jamais être à la place du journaliste», a déclaré le représentant du Mali.
Au chapitre des recommandations, pour le directeur de la Snrt, il a été question d’adapter les méthodes selon les pays, l’environnement ou encore les moyens. A ce sujet, il a été proposé la «création d’un Fonds panafricain pour l’audiovisuel (digital), le développement de l’expertise, l’accompagnement des médias nationaux». Mais aussi, «redoubler d’efforts avec l’ensemble des acteurs (crédibilité, promouvoir les synergies, consolider nos efforts, renforcement de la démocratie)».
Expériences de certains pays
Le forum a été l’occasion pour certains membres d’exposer leurs expériences. C’est le cas du Sénégal dont le représentant du Cnra, Ibrahima Sané, a évoqué l’expérience de la dernière élection présidentielle au Sénégal. Précisant que le Cnra commence à être connu du public, Monsieur Sané a souligné que «nous ne sommes pas une juridiction. D’ailleurs, nous n’avons sanctionné personne au cours de l’élection présidentielle. Nous avons su trouver un cadre afin de permettre à chaque candidat de passer son message», soulignant que ce fut «un moment intense d’activités pour le Cnra».
La situation semble différente aux Comores. Avec une courte expérience, mais riche en enseignement, la situation dans ce pays diffère d’avec plusieurs pays de l’union. La place que devraient occuper les régulateurs ne semble pas être des meilleures.
Sur ce chapitre, la forte dominance des radios publiques, au service de l’Etat et non du service public serait l’un des freins à la régulation des médias. A ce sujet, a souligné M. Ali Moindjié, le représentant des Comores et conseiller au Conseil national de la presse et de l’audiovisuel, «nous n’avons que deux radios communautaires pour jouer ce rôle de régulateur». L’absence de garanties financières, les lignes éditoriales ou encore un cadre approprié constituent également des facteurs de blocage. Du coup, malgré les efforts consentis, par exemple, sur le plan de la Télévision numérique terrestre (Tnt), «la charpente est là, mais il reste encore la partie réglementaire», dira M. Ali Moindjié. Le représentant du Mali estime qu’«il est indispensable que les autorités de régulation soient impliquées depuis le début du processus». Justement, parlant au nom des pays frontaliers souffrant du terrorisme tels que le Burkina Faso, ce dernier se désole «des mauvaises informations souvent relayées par la presse. Les nouveaux médias dénaturent l’information et cela a un impact sur l’éducation».
Si entre les deux parties, à savoir les régulateurs et les régulés, le courant passe bien, le représentant du Mali préconise un «partage des textes de régulation pour une meilleure compréhension des choses». Mais également, «une indépendance des services publics pour une bonne mission des services de régulation».
Seulement, sans un cadre juridique approprié, rien ne peut se faire. Sur ce chapitre, le Professeur Boyomo Asala du Cameroun dira que «les Etats ne peuvent plus intervenir de façon verticale. D’autant plus que c’est compliqué d’ordonner tout cela. Il faut repenser la réglementation qui est horizontale et la régulation qui est verticale. Aujourd’hui, les deux aspects sont maîtrisables en Afrique». Reste à savoir maintenant, comment penser la place de l’Afrique dans cet enjeu des convergences.
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