Le Sénégal n’est pas prêt à atteindre une souveraineté alimentaire, faute d’une bonne politique agricole. C’est l’avis de Aliou Ndiaye, Secrétaire général de l’Union des travailleurs de l’agriculture, de l’alimentation, du commerce et similaires, par ailleurs président de l’Union internationale des syndicats des travailleurs de l’agriculture, de l’alimentation, du commerce et similaires (Uistaac). Par Alioune Badara CISS(Correspondant) –

L’Union internationale des syndicats des travailleurs de l’agriculture, de l’alimentation, du commerce et similaires (Uistaac) a clôturé hier sa 5ème conférence annuelle tenue du 10 au 14 avril à Saly Portudal. Interpellé sur la situation alimentaire du Sénégal, le président de l’Uistaac soutient que «le Sénégal vit l’insécurité alimentaire». «Le Sénégal n’a pas atteint sa souveraineté alimentaire, malgré toutes les politiques alimentaires qui se sont succédé, notamment la Grande offensive pour la nourriture et l’abondance (Goana) lancée sous le régime du Président Abdoulaye Wade, l’autosuffisance alimentaire en riz sous Macky Sall… Le Sénégal n’est pas prêt, parce que pour atteindre une souveraineté alimentaire, il faut nécessairement une politique de souveraineté agricole, malheureusement le Sénégal n’en a pas», se désole Aliou Ndiaye. Pour lui, la politique agricole n’est rien d’autre que la formation et la protection du producteur jusqu’à l’écoulement du produit. «Est-ce que ce processus existe au Sénégal ? Non ! Au Sénégal, l’agriculture familiale est la plus pratiquée, mais nous ne sommes pas encore prêts à atteindre la souveraineté alimentaire. Ce n’est pas avec une agriculture de 2 à 3 mois qu’on va atteindre la souveraineté alimentaire», dit-il. Le syndicaliste reste toutefois optimiste avec ce nouveau régime. «Aujourd’hui, l’alimentation est devenue une arme pour les grands pays capitalistes, alors que la terre devait revenir à ceux qui la cultivent. Ceci est un phénomène que nous vivons tous. L’Afrique renferme 52% des terres arables du monde et reste l’un des continents les plus arrosés. Comment imaginer qu’il y ait de la faim et de la malnutrition dans ce continent ? Ce qui revient à dire qu’en Afrique, on n’a pas une bonne politique agricole», analyse Aliou Ndiaye.

L’Uistaac se fixe ainsi comme premier objectif la souveraineté alimentaire de tous les peuples, mais également de permettre à toutes les populations de manger à satiété. Le président de l’Uistaac a aussi dénoncé les nombreuses fermetures d’entreprises agroalimentaires au Sénégal et les conventions collectives qui régissent ce secteur. «Plusieurs entreprises agroalimentaires ont fermé et n’ont jamais été rouvertes. Et les travailleurs courent après leurs droits. On a toujours réclamé les droits des travailleurs des entreprises en liquidation et des entreprises liquidées», fustige-t-il. Avant de pointer du doigt les lois et règlements qui régissent ce secteur. «La convention collective des travailleurs de l’agroalimentaire est obsolète. Elle date de 1958, ce qui veut dire que tous les nouveaux métiers ne sont pas répertoriés dans cette convention. Et ça, c’est un recul pour les travailleurs sénégalais. Il faut revisiter la convention, ses annexes de classification et revoir les barèmes de salaire, parce que quoiqu’on dise dans  l’agroalimentaire, le secteur primaire reste le socle de vie d’une personne», plaide le président de l’Union des travailleurs du secteur agricole. Julien Hucks, le Secrétaire général de l’Union internationale des travailleurs de l’agriculture, l’alimentation, le commerce, qui est une branche la Fédération syndicale mondiale (Fsm), a, quant à lui, présenté une situation chaotique de l’agriculture dans le monde.

«L’agriculture dans le monde entier va mal, notamment dans la politique publique du monde capitaliste. Aujourd’hui l’agriculture n’est plus considérée comme un bien vital pour les populations, un bien public, mais elle est un produit commercial, une marchandise. Ce qui prive les populations à travers le monde de leur capacité de se nourrir et constitue un grave danger.

Il y a aussi le phénomène d’abandon des cultures vivrières dans beaucoup de pays au profit des cultures d’exportation.»

Mais malgré tous ces
problèmes que l’agriculture rencontre, il précise que c’est possible d’inverser la tendance.
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