Aliou Bakhoum et son Ong essaient, chaque fois, de sauver les enfants migrants des Diouras. Beaucoup ont été retirés du circuit pour retrouver une paisible vie. «On avait réalisé une étude sur le pointage des enfants dans les sites d’orpaillage. Nous avons trouvé 1109 dans les Diouras. Sur ces 1109 enfants, il y avait au moins 141 en situation de pires formes de travail. Et sur ça, on a trouvé 169 enfants migrants venant du Nigeria, Burkina Faso, Ghana, Côte d’Ivoire, Mali, Guinée…dont 43 ont été réinsérés dans le circuit professionnel. Les 23 sont retournés en famille, dans la sous-région et à l’intérieur du pays. Et le reste est retourné à l’école», détaille le chef de l’antenne de l’Ong La Lumière dans la région de Kédougou. Ces enfants sont venus au Sénégal par un système de parrainage. «Pour les enfants burkinabè et guinéens, ils sont dans les sites d’orpaillage. Vous habitez avec quelqu’un à Tenkoto, il vous dit : «Partez mon enfant.» Il va gagner quelque chose. Il y a d’autres qui viennent de leur propre gré, même leurs parents ne sont pas au courant. Ils se sont parlé. Ils ont réglé leur billet pour venir dans les sites clandestins. Le mois passé, nous avons renvoyé des enfants avec l’accord du procureur : deux Burkinabè, un Malien et deux Guinéens», détaille Aliou Bakhoum. Malgré la non-implication des Etats, les Ong tentent de sauver la vie de ces mineurs. «Nous avons un programme de réinsertion des enfants hors école. Sur ce programme, il y a plus de 3000 enfants qui ont été repêchés par les classes passerelles, ces cinq dernières années. Et parmi ces enfants, nous avons proposé une liste de 160 enfants que nous avons proposé à la formation professionnelle. Nous avons discuté avec tous les centres de formation professionnelle. Donc il n’y a pas une politique de migration établie, à ma connaissance. Parce que la migration est clandestine. Un bon matin, on les voit. Au niveau des sites, il y a la porosité des frontières. Et ils arrivent sans papier», précise M. Bakhoum.

La colère de Coumba Gawlo
Lors d’une tournée de sensibilisation, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc), en partenariat avec World vision Sénégal, a organisé, en mars 2018, une caravane de sensibilisation sur l’exploitation sexuelle des jeunes filles et femmes dans les sites d’orpaillage de Kédougou. Coumba Gawlo Seck y a participé il y a quelques mois, en tant qu’ambassadrice de bonne volonté de cet organisme onusien et elle n’avait pas caché sa colère : «Je ressens beaucoup d’émotion au point que j’en perds mes mots. J’ai été, à la fois, profondément attristée, émue et choquée par tout ce que j’ai vu ici. J’ai pu me rendre compte combien, en Afrique, les droits humains sont bafoués, particulièrement ceux des femmes. En tant que femme, je suis profondément touchée. A entendre ces filles, je sens que leur désir profond, c’est de retourner chez elles et garder leur dignité. Tout cela pour vous dire que c’est abominable ce qui se passe ici.»
Coumba Gawlo martèle : «J’en veux à nos dirigeants de fermer les yeux sur des choses aussi atroces. J’en veux à tous ces hommes d’Etat africains, qui ne bougent pas le plus petit doigt alors qu’ils peuvent sortir ces filles d’ici. Mais, puisqu’ils ne veulent pas le faire, moi je m’engage à le faire.»