Par Abdoulaye KAMARA (Correspondant) – 

Les producteurs de riz des périmètres aménagés du bassin de l’Anambé, dans la région de Kolda, sont inquiets : les épis de riz arrivés à maturité sont submergés par l’eau et des oiseaux granivores ont commencé à en picorer les grains. Au même moment, le bassin «dispose juste de 2 moissonneuses à chenilles adaptées aux rizières trempées. Les moissonneuses pneumatiques ne peuvent pas se risquer dans ces eaux», a dit Abdallah Diatta, producteur dans ledit bassin. Ce sont les pluies tombées au courant de ce mois d’octobre qui ont fini de semer le doute dans la tête des riziculteurs pour qui «chaque fin de saison est un cauchemar du fait du manque de moissonneuses adaptées au sol lourd de l’Anambé», a noté Souahibou Diao, producteur. «Quand le riz est arrivé à maturité, chaque jour passé, 5 g de riz sont perdus, selon les techniciens. Imaginez que si 2 mois plus tard nous n’avons toujours pas de moissonneuses pour la récolte…», s’interroge-t-il.
Et puis, selon Mme Fatoumata Sabaly, debout au milieu de sa parcelle d’1, 35 ha de riz du secteur 4, «les oiseaux granivores ont commencé leur festin. Vous les voyez survoler. J’ai placé 2 de mes enfants par parcelle. Vous savez qu’il est difficile de surveiller des hordes d’oiseaux. Si rien n’est fait pour les exterminer au plus vite, les dégâts seront énormes».
Comme solutions, Ndiobo Baldé, autre producteur, sollicite «la mise à disposition le plus rapidement possible de moissonneuses à chenilles en nombre suffisant, comme c’est fait pour la vallée du fleuve. Ensuite, que la Direction de la protection de végétaux (Dpv) déploie au plus vite ses drones pour pulvériser les nids d’oiseaux, comme ce fut le cas la saison passée, même si c’était fait avec beaucoup de retard». A en croire le jeune producteur Abdallah Diatta, «la menace est réelle sur les productions et sur la possibilité de rembourser les dettes contractées auprès des structures de crédit».

«Il n’y a pas péril en la demeure», selon la Sodagri
«Il n’y a pas péril en la demeure», a d’emblée répondu Abdoulaye Daff, interpellé par Le Quotidien par téléphone. Le Directeur technique de la Société de développement agricole et industriel du Sénégal (Sodagri) explique : «Ce ne sont pas toutes les parcelles qui sont arrivées à maturité. Il y a assez de machines à chenilles dans le bassin (au nombre de 14) pour récolter celles qui sont arrivées à maturité.» «Sensible à la situation des parcelles qui sont inondées par les dernières pluies», Abdoulaye Daff propose aux producteurs de commencer le drainage des eaux car «les moissonneuses à chenilles ne peuvent pas pénétrer dans des rizières avec une certaine hauteur d’eau».
En ce qui concerne la présence d’oiseaux granivores, le technicien confirme et ajoute : «Nous sommes en contact avec la Dpv qui doit d’ailleurs commencer, dès ce lundi 20 octobre, à déployer des drones pour cartographier les sites de nidation et les dortoirs des oiseaux. Ce n’est pas facile, car c’est dans une forêt classée et au bord d’un lac. En attendant, il faut que les paysans fassent l’effort d’être présents dans la vallée pour chasser les oiseaux. Il y a dans le bassin au total 23 moissonneuses fonctionnelles dont 9 à chenilles et 12 pneumatiques.»
Abdoulaye Daff dit avoir saisi le ministre de l’Agriculture sur la question, qui a donné des instructions pour que les mesures idoines soient prises aux fins d’enrayer les risques.
A en croire le Directeur technique de la société agricole, pour cette saison, 4354 ha sont emblavés dans les périmètres aménagés, à cheval entre les départements de Kolda et de Vélingara. Avec des prévisions de «rendement réaliste de 5, 5 t à l’ha». Dans les régions sud et sud-est du Sénégal où intervient la Sodagri, 154 000 ha sont emblavés dans les vallées. «Dans les vallées, il y a moins de problèmes. Car là-bas les producteurs ont comme tradition de récolter à la main», a renseigné Abdoulaye Daff.
akamara@lequotidien.sn