Il est venu à la barre pour étaler ses regrets. Poursuivi pour apologie du terrorisme et menace d’actes terroristes, Saër Kébé, qui avait envoyé des messages aux ambassades d’Israël et des Usa pour les menacer, encourt 5 ans de travaux forcés. Son jugement sera rendu le 10 avril prochain.

«Je demande pardon.» Saër Seck s’est excusé hier à la barre de la Chambre criminelle où il comparaissait pour apologie du terrorisme et menace d’actes terroristes. Pour ces faits qui remontent à 2015, il risque 5 ans de travaux forcés. Sa vie a basculé à cause d’une publication sur son compte Facebook. «Vous soutenez Israël, mais vous le regretterez et nous les jeunes sénégalais révolutionnaires, nous attaquerons tous vos intérêts et Israël sera détruit. Vous êtes des terroristes. Nous préparons des attentats contre l’ambassade d’Israël au Sénégal à Dakar… Et vous serez détruit. Vive le Hamas, vive le Hezbollah, vive Hitler», écrit-il vaillamment pour menacer les autorités américaines, qui ont saisi celles du Sénégal. C’est ainsi que l’élève, qui devait passer son Bac, a été interpellé. Devant la barre, il a nié être un terroriste. «Je ne suis pas un terroriste et je ne fréquente pas les terroristes», a-t-il martelé avant de justifier son acte. «J’ai posté des commentaires parce que je devais faire un exposé sur l’erreur des Etats-Unis sur le processus de paix au Proche-Orient. C’est ainsi que je suis allé sur You Tube où j’ai vu des images qui m’ont choqué et troublé.  J’ai vu des femmes éventrées, des enfants innocents tués de façon atroce», explique-t-il. Ces explications n’ont pas convaincu le juge, qui lui a rappelé qu’il a posé son geste au lendemain des attentats de Charlie Hebdo sur la page Facebook.  Saër Kébé réplique qu’il a écrit ce message par ignorance et qu’il n’est pas un révolutionnaire. Selon le juge, l’accusé ne peut pas ignorer ce qu’il a fait après avoir fait des recherches sur le conflit israélo-palestinien, sur l’histoire des juifs et du sionisme. «Quelle était votre intention sur la préparation des attentats contre les Etats-Unies et Israël ? Qu’est-ce que vous incarnez», questionne-t-il. Saër Kébé répond : «Le sionisme fait partie de notre programme d’histo-géo. Je voulais dénoncer l’injustice et non attaquer une personne ou un pays.» Resté sur sa faim, le magistrat insiste : «Tout effet a une cause. Ne nous fait pas croire que tu l’as fait dans le néant.» Il l’invite à sortir de son silence après avoir commis des faits graves en lui rappelant qu’il a posté 10 fois des commentaires via les réseaux sociaux. Selon lui, ces messages ont été internationalisés. Mais pire, l’accusé a alerté la presse africaine.  Il a envoyé ce message, informe-t-il, au groupe West Africa democratie radio dont le contenu est le suivant : «Nous vous informons des attaques du mois prochain à l’ambassade d’Israël et des Usa au Sénégal. Nous ne voulons plus des Fran­çais, des Israéliens et des Amé­ricains dans nos pays.» «C’était pour dénoncer l’injustice», répète l’accusé. «Est-ce que vous mesurez la portée et la gravité de ces menaces alors qu’on n’a jamais connu ça ? Que pensez-vous de ce vous avez fait ? Est-ce que vous jouiez et si tel est le cas, vous jouez avec le feu», persiste le juge.
Malgré les multiples relances, M. Kébé est resté muet comme une carpe. Cependant, il juge justifiées les plaintes des Etats-Unis  contre lui. «C’était une erreur», persiste le jeune homme, qui regrette fort son acte. «Je regrette mon geste. Ma réputation est ternie, ma famille est dans la boue. J’avais 20 ans. Mes propos ont dépassé ma pensée. Je voudrais continuer mes études afin d’aider ma famille. D’ailleurs, je ne connais pas où se situent les ambassades des Usa et celle d’Israël», dit-il. Selon le Parquet, Saër Kébé a franchi le Rubicon. Il a requis 5 ans ferme à son encontre. La défense parle d’un jeune qui n’est pas en mesure de gérer ses pulsions, mais elle reste persuadée qu’il n’y a pas d’actes terroristes. Elle a plaidé l’acquitte­ment.  Déli­béré au 10 avril prochain.
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