Condamné pour abus de confiance à 2 mois assortis de sursis et à payer en guise de réparation 90 millions de francs, Serigne Aramine Mbacké a interjeté appel pour contester cette décision. L’homme d’affaires nie devoir à la commerçante Oumou Thiam les 548 millions qu’elle lui réclame. Les faits remontent à 2012. Selon les déclarations de la partie civile, Serigne Aramine Mbacké lui avait dit qu’il pouvait l’aider à gagner plus d’argent en l’assurant de lui trouver des lettres de créance pour 12 mille 500 tonnes de sucre d’une valeur de 7 millions de dollars, soit 3 milliards de francs Cfa. Cependant, il lui a fait savoir qu’une lettre de créance lui reviendrait à 120 millions de francs. C’est en ce sens qu’il a émis 6 lettres de créance au bénéfice de madame Thiam. Mais après plusieurs mois d’attente, la commerçante n’a pas vu la marchandise. Ainsi, elle a interpellé Serigne Aramine Mbacké qui lui a demandé de se rendre au Brésil où elle pouvait charger des containers de sucre selon son choix. En compagnie de son fils aîné, Oumou Thiam s’est rendue au Brésil. Mais après deux mois d’attente, elle n’a pas vu du sucre. Elle a reboursé chemin. Et Serigne Aramine lui a demandé encore de se rendre cette fois-ci en Gambie pour importer du sucre. Revenue bredouille du pays de Barro, le doute s’est installé dans sa tête.
Et pour en avoir une idée claire, elle s’est rendue aux Etats-Unis pour voir si les lettres de créance sont bonnes. Une fois au pays de l’Oncle Sam, Mme Thiam a appelé un certain John Simon qui travaille en étroite collaboration avec le prévenu. «Quand il m’a vue, il m’a menacée de mort, puis m’a demandé de rentrer chez moi. Ce que j’ai refusé. Au moment où on se chamaillait, son supérieur Marcel Javon nous a vus et m’a interpellée. Je lui ai expliqué la raison de ma présence dans leurs locaux. Sur ce, il m’a demandé de lui donner le numéro de Serigne Aramine Mbacké. Il l’a appelé pour lui dire qu’il veut m’escroquer, parce qu’il sait que leur agence n’émet pas des lettres de créance d’une valeur de 7 millions de dollars sans garantie», a narré la partie civile. Une fois de retour, elle a porté plainte contre Aramine Mbacké pour «faux, usage de faux, escroquerie». Mais le premier juge a estimé que le faux n’est pas établi à son encontre. Après avoir disqualifié l’escroquerie en abus de confiance, il a condamné Mbacké à 2 mois de prison assortis de sursis.
Près d’un milliard réclamé au prévenu
Serigne Aramine a nié les faits devant la Cour d’appel. Selon lui, Coumba Thiam avait sollicité son aide pour transporter du riz. Elle lui a dit qu’elle voulait s’essayer dans ce business, mais elle n’avait pas d’argent. «Je lui ai promis de lui trouver quelqu’un pour l’aider à trouver des lettres de créance», dit-il. Quelque temps après, elle est revenue lui dire qu’elle préfère se lancer dans le commerce du sucre. D’après toujours le prévenu, l’agence «Small walk», qui se trouve aux Etats-Unis, réclame à la dame 1% du montant de 7 millions de dollars. Aramine Mbacké reconnaît que la dame a versé la somme de 4 millions de francs pour l’ouverture du dossier et 88 millions de francs. «Mais comme elle n’était pas en mesure de payer l’intégralité de la somme qui lui a été demandée par l’agence, estimée à 600 millions, c’est moi qui ai complété le reste», affirme Serigne Aramine Mbacké. Il prétend aussi avoir payé la somme de 60 millions de francs pour une commande passée par la dame en Inde.
En plus de ces sommes, le mis en cause soutient avoir prêté à la commerçante des sommes d’argent variant entre 5 000 et 10 mille francs. «C’est quand le commerce du sucre a foiré, parce qu’elle ne le maîtrisait pas, qu’elle a cherché à me vilipender en soutenant que je la doit la somme de 548 millions de francs», a ajouté Serigne A. Mbacké, qui estime son préjudice à 150 millions de francs. Toutefois, il reconnaît avoir reçu des mains de Oumou Thiam la somme de 117 millions 825 mille francs.
Autre anomalie relevée par la dame Thiam, c’est le prix exorbitant du coût des sms que Serigne Aramine a estimé à 124 millions de francs. Estimant son préjudice à 535 millions de francs, elle réclame en outre 80 millions en guise de réparation.
Ce n’est pas l’avis de la défense. Pour Me Abdou Dialy Kane, les allégations de la partie civile ne sont pas fondées. Sinon, elle aurait interjeté appelé après que le Tribunal lui a octroyé la somme de 90 millions de francs en guise de réparation. Mais Me Cissé de la partie civile s’empresse de le contredire en brandissant l’appel qui, à l’en croire, a été omis par le greffe.
La défense précise aussi que dans les termes du contrat, il n’était pas question de trouver à la dame de la marchandise, mais des lettres de créance. D’après Me Kane, rien ne prouve que ce soient de fausses lettres. C’est pourquoi il a été relaxé du délit de faux, rappelle-t-il, avant de plaider l’infirmation de la peine de la première instance.
Le Parquet général qui a aussi fait un appel incident a requis l’infirmation. Selon lui, les délits ne sont pas établis. L’affaire sera vidée le 31 juillet.
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