Après avoir démenti les ministres sur les violentes manifestations : Mimi Touré invite Macky à un sursaut d’orgueil pour partir

C’est de la bergère au berger. L’ancienne Pm Mimi Touré est montée, ce samedi, au créneau pour répondre à la récente sortie des ministres de la République sur la situation sociale qui prévaut présentement dans le pays. D’après elle, la Cpi peut bien s’autosaisir et faire une enquête si le Sénégal ne mène pas une enquête sérieuse. «Monsieur Sidiki Kaba, le ministre des Forces armées, a parlé en tant que spécialiste des droits humains. Mais, il n’est pas plus spécialiste que qui que ce soit. J’ai dirigé le Département des droits humains des Nations unies pour la population pendant plusieurs années à New York. Il n’a pas la science infuse au-dessus de celle des autres. Il sait très bien que si le gouvernement du Sénégal ne mène pas une enquête sérieuse pour identifier les auteurs et les commanditaires, le procureur de la Cpi est habilité devant des preuves que nous sommes en train de collecter ou que la Société civile est en train de collecter, à se saisir, comme il s’est saisi au Kenya. Le Président Uru Kennyata a été inculpé. Mais ensuite, il y a eu une évolution dans le dossier», a-t-elle démontré.
Pour elle, «tout ça, c’est pour noyer le poisson». Mimi Touré voit à travers ces déclarations, l’expression d’une peur réelle. «Le tollé général qu’il y a aujourd’hui dans le monde entier, fait que les autorités sont obligées de sortir et de parler. Quand vous voyez le Premier ministre qui parle, c’est que l’heure est grave. La Primature est sous le sceau du grand silence. Ça cache une peur de lendemains très incertains pour tous ceux qui sont mêlés de près ou de loin à ces histoires de nervis et à la mort de nos enfants», a-t-elle ajouté.
Avant de montrer que «quand le gouvernement du Sénégal et le président de la République s’empressent de déclarer une enquête, c’est parce qu’ils savent qu’il est dit au niveau de la Cpi que si le gouvernement ne fait pas une enquête, le procureur de la Cpi va venir en faire. Mais, comme ils ont l’habitude de faire des déclarations qui n’auront aucune suite, cela ne passera pas cette fois-ci», a-t-elle promis.
«Les morts sont en train de s’accumuler. Mais quel que soit le temps, les auteurs paieront de ces crimes. Ils savent très bien que la Cpi peut se saisir», a-t-elle dit, tout en se demandant «où en est l’enquête sur les fonds Covid» qui est restée lettre morte. Alors qu’il y a des enquêtes qui sont faites avec beaucoup de célérité quand le gouvernement le veut.
D’après l’ancienne Première ministre, il n’y a jamais eu de nervis à l’Apr en sa présence. Cependant, pour répondre aux ministres de la République, elle dit avoir entendu des informations selon lesquelles il y a une commande de cartouches à la Présidence.
«Depuis quand un président de la République commande des cartouches», s’est interrogée Aminata Touré, d’après qui «ceux qui le disent sont là et vaquent tranquillement à leurs occupations». Mais «puisqu’il qu’il s’agit de médias internationaux qui ont montré des pickups de couleur blanche qui étaient devant le siège de l’Apr et qui ont identifié le nervi numéro 3, on n’ose pas s’en prendre à eux».
«Le Premier ministre, le ministre de l’Intérieur, le ministre des Forces armées et le porte-parole du gouvernement parlent de forces occultes clairement identifiées qui réussissent à tuer au nez et à la barbe de notre police et notre gendarmerie dont le professionnalisme était vanté partout dans le monde», se désole-t-elle.
«D’où viennent ces pickups de couleur blanche stationnés devant le siège du parti du Président Sall à bord desquels ces sinistres individus sont montés, comme montré par les médias internationaux», a-t-elle demandé.
Elle dit n’avoir jamais imaginé «dans mes plus sombres cauchemars que le Président Macky Sall, onze ans après, va nous parler de nervis qui tirent sur les manifestants».
A propos du rapport qui se murmure, la position de Mimi Touré est claire. «Ce n’est pas possible.» Elle renvoie les ministres à une vidéo de Macky Sall qui circule ces temps-ci, où il s’est prononcé en 2011.
«Dieu a fait que les problèmes que nous rencontrons actuellement étaient les mêmes qu’en 2011. Il avait donné des positions très claires. A l’époque, le Président Abdoulaye Wade parlait de report. Je me rappelle qu’il avait même dit que si on doit reporter les élections, on considère que le Président n’est plus légitime. Et c’est la même situation. Le Président Macky Sall, au lendemain de la péremption de son mandat, n’est plus président de la République. Il ne pourra plus prendre aucun acte valable. Il ne pourra plus nommer aux fonctions civiles et militaires, il ne sera plus chef suprême des Armées. Il ne sera plus président du Conseil supérieur de la magistrature. Ce sera terminé. Ce n’est pas un dialogue qui peut prolonger cela, c’est impossible.
Je suis revenue sur la question parce que vous avez entendu le porte-parole du gouvernement dire peut-être que le dialogue pourrait le proposer. Ce n’est pas possible. Aucun dialogue ne peut être au-dessus de la Constitution ou au-dessus du calendrier républicain», a-t-elle soutenu.
Et c’est pourquoi elle l’invite à «opérer un ultime sursaut en rassemblant toutes ses forces pour mieux préparer ses derniers moments en tant que Président». Car «la Constitution met fin à ses fonctions le 24 février 2024 et il ne préside plus à rien».
Selon elle, «il doit laisser tomber cette affaire de Justice, libérer les jeunes et les détenus politiques».
Par Justin GOMIS – justin@lequotidien.sn