Par Dieynaba KANE – 

Le chroniqueur de l’émission Jakaarlo de la Tfm a passé hier sa première nuit en prison. Badara Gadiaga a été inculpé par le Doyen des juges d’instruction. Il est poursuivi pour discours contraire aux bonnes mœurs, diffusion de fausses nouvelles, offense à une personne exerçant tout ou partie des prérogatives du président de la République. Dans le dossier, il a été ajouté un article du Code pénal qui réprime la réception, la sollicitation ou l’acceptation de dons, présents ou subsides en vue de mener une propagande susceptible de compromettre la sécurité publique.
Badara Gadiaga a été arrêté mercredi dernier, le 9 juillet, à la suite de la polémique qui l’a opposé au député du parti Pastef Amadou Bâ, lors de l’émission Jakaarlo diffusée le 4 juillet sur la Tfm. Après plusieurs jours passés au Com­missariat central et son face-à-face avec le procureur, M. Gadiaga a vu son dossier corsé avec des charges plus lourdes.
La tournure prise par cette affaire a sidéré les avocats de Badara Gadiaga. L’un d’entre eux, Me Oumar Youm, s’est exprimé devant la presse après le placement sous mandat de dépôt de son client. L’avocat annonce que le collectif de défense n’entend pas rester inactif et va internationaliser le dossier, dénonçant «un cas de détention arbitraire de catégorie 2». «Nous allons le dénoncer au Groupe de travail des Nations unies, à la Cedeao», a-t-il annoncé. Me Youm, très remonté, souligne que «de plus en plus, le Parquet sort de son périmètre régulier légal pour entrer dans un périmètre illégal injuste dont le dessein est de museler des acteurs politiques, des chroniqueurs». Ce qui, d’après l’avocat est injuste, et c’est une honte pour le Sénégal. «Nous allons nous battre contre ces manipulations dont le dessein est de porter gravement atteinte à la liberté des citoyens», a-t-il déclaré. Poursuivant ses récriminations, il ajoute qu’il «n’appartient pas à la Justice, particulièrement au Parquet, de se transformer en police politique du parti Pastef pour régler des comptes». «Nous ne l’accepterons pas et nous allons nous battre, parce que nous sommes avant tout des militants de la liberté et de la démocratie», a-t-il déclaré avec véhémence.
Lors de ce point de presse, Me Youm a révélé qu’aucune «procédure n’a été respectée». Et de fustiger : «La police elle-même, après avoir entendu Badara Gadiaga et l’avoir mis en garde à vue, après ses investigations, a considéré que dans ce dossier, il n’y avait rien, à l’exception d’une infraction relative au discours contraire aux bonnes mœurs.»
Pour lui, «c’est une prise d’otage judiciairement organisée, une tentative de musèlement d’un citoyen honnête». «Nous n’accepterons pas que la Justice de notre République soit aussi manipulée par des hommes et des femmes qui sont tapis dans l’ombre pour faire n’importe quoi, faire tout ce qui n’est pas du Droit. On ne l’acceptera pas», a-t-il déploré.
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