L’image est rigolote ! Le sulfureux avocat Juan Branco, dans une combinaison de pêcheur, avec des lunettes de soleil en pleine nuit, a été arrêté dans une pirogue à Rosso. A la frontière avec la Mauritanie, le «grand avocat et justicier des causes perdues» s’est fait petit pour s’enfuir du Sénégal. Il a été acheminé sur Dakar par la Division des investigations criminelles (Dic). Entré sur le territoire national en passant par la Gambie, il a voulu sortir du pays en usant de la même méthode, mais en voulant, cette fois-ci, passer par la Mauritanie. Dans la nuit du samedi au dimanche, il a été conduit en cellule à la prison de Reubeuss. Selon Me Ciré Cledor Ly, un des avocats du leader de l’ex-parti Pastef, Juan Branco aurait refusé de s’alimenter. Extrait de sa cellule ce dimanche par les policiers de la Sûreté urbaine du Commissariat central de Dakar, l’avocat a refusé catégoriquement de parler sur procès-verbal. Selon la robe noire, «Juan Branco a été arrêté sur la base d’un mandat d’arrêt international». Il perçoit son arrestation comme un «kidnapping» qui a eu lieu «à près de 100 km de la capitale (mauritanienne), Nouakchott, par des hommes encagoulés sans aucun signe distinctif et qui l’ont blessé aux poignets». Il a aussi décidé de garder le silence et de n’autoriser aucune personne à l’assister, aussi bien durant la phase procédurale de notification du mandat d’arrêt que devant le juge d’instruction du 2ème Cabinet du Tribunal de grande instance hors classe de Dakar, qui a ouvert une information judiciaire, selon Me Ciré Clédor Ly. Qui a informé, par un communiqué, que le juge d’instruction a visé 4 infractions que sont : l’attentat -article 72 du Code pénal (1), complot -article 73 du Code pénal (2), diffusion de fausses nouvelles -article 255 du Code pénal (3), actes et manœuvres de nature à compromettre la sécurité publique ou à occasionner des troubles politiques graves -article 80 du Code pénal(4). «La première infraction est punie de la réclusion criminelle à perpétuité.»
Réactions du Syndicat des avocats
Des collègues de Juan Branco ont tenu à lui apporter leur soutien. C’est le Syndicat des avocats de Paris (Sap) qui s’est illustré le premier. Dans un post sur le réseau social Twitter devenu X, ils ont informé qu’il a «été arrêté dans l’exercice de la défense de son client». Par conséquent, c’est «inacceptable». Le Sap exige ainsi sa libération. Le Bâtonnier de Paris a rappelé le «caractère sacré des droits de la défense. Aucun avocat ne doit être entravé dans sa mission, où qu’il soit et quel qu’il soit. La situation de notre confrère, Juan Branco, incarcéré au Sénégal, nous préoccupe. Nous agissons activement pour sa libération, en concertation avec ses avocats». Dans la presse locale, des sources policières ont affirmé qu’il ne s’agit pas d’une enquête, mais d’une exécution d’un mandat d’arrêt international. Juan Branco a été éconduit du Sénégal la veille du procès pour diffamation de Ousmane Sonko contre Mame Mbaye Niang. Les autorités sénégalaises n’avai-ent pas apprécié les mots qu’il avait utilisés pour qualifier le président de la République. Depuis cet épisode, la robe noire a enclenché une procédure pour traduire certaines autorités devant la Cpi. Il a d’ailleurs déposé une plainte de 170 pages où il expose les «preuves de la commission de crimes contre l’humanité». Le gouvernement français a aussi porté plainte contre lui pour avoir divulgué les noms de deux fonctionnaires travaillant au Sénégal, lors d’une conférence de presse le 22 juin dernier, les mettant en danger. La plainte a été classée sans suite. Il a fait une apparition remarquée lors de la conférence du collectif des avocats de Sonko, au lendemain de l’arrestation de leur client. Le procureur de la République avait requis un mandat d’arrêt international, le 13 juillet passé, pour appel à l’insurrection.
Par Malick GAYE – mgaye@lequotidien.sn