Le député Ousmane Sonko sera convoqué sous peu par la Commission ad hoc chargée de travailler sur la levée de son immunité parlementaire. Une procédure qui, selon l’opposition parlementaire, bafoue déjà les droits du leader de Pastef, accusé de «viols suivis de menaces de mort» par une masseuse de 20 ans.
Dans la marche vers la levée de l’immunité parlementaire du député Ousmane Sonko, l’Assemblée nationale a posé un nouveau pas hier. Les 11 députés composant la Commission ad hoc ont reçu l’approbation de l’institution législative pour démarrer les travaux dans cette affaire concernant le leader de Pastef accusé de «viols suivis de menaces de mort» par la masseuse, Adji Sarr, 20 ans. Le groupe Liberté et démocratie et les non-inscrits, à l’exception des députés de Rewmi et du Pur, n’ont pas assisté à la fin des travaux.
La cause ? Le président de l’Assemblée nationale a précisé qu’un débat ne pouvait avoir lieu, se référant au Règlement intérieur régissant le fonctionnement de l’Hémicycle alors que des parlementaires de l’opposition ont voulu prendre la parole. Le seul débat qui vaille, selon Moustapha Niasse, c’était la ratification de la liste des membres de la Commission ad hoc chargée d’auditionner l’ancien candidat arrivé 3ème à la dernière élection présidentielle.
Bamba Dièye : «X a voyagé secrètement jusqu’à l’Assemblée nationale pour devenir Ousmane Sonko»
Faisant bloc derrière le leader de Pastef qui, bien entendu, n’a pas assisté à la rencontre, les protestataires ont pointé l’absence d’identification dans le réquisitoire introductif du procureur de la République, Serigne Bassirou Guèye, ainsi que dans la lettre du juge d’instruction du 8ème cabinet. «Le juge d’instruction n’a entendu personne. Il s’est basé sur des Pv de la Section de recherches de la gendarmerie et c’est dans ces Pv qu’il a été dit qu’ils sont à la recherche d’un X. C’est ce X qui a voyagé secrètement jusqu’à l’Assemblée nationale pour devenir Ousmane Sonko. Ce que nous n’acceptons pas. Il faut que le juge fasse son travail et aille chercher ce X», a dit Cheikh Bamba Dièye qui finalement a représenté les députés non-inscrits, à la place de la Rewmiste Fatou Ndiaye, récusée par le groupe.
D’après l’ancien maire de Saint-Louis, la majorité parlementaire est dans une logique de violer les droits de Ousmane Sonko. «Je pense que le pire des criminels a droit à un procès équitable et un règlement de son dossier dans la transparence et l’équité pour faire préserver ses droits. Si vous voulez attenter à la liberté d’un député en massacrant ses droits, vous ne consolidez qu’une dictature et vous niez ses droits. On ne peut pas lever l’immunité parlementaire d’un député dans de telles conditions», a estimé le leader du Fsd/Bj.
La présidente de la Commission des lois : «La nature de la plainte contre X importe peu…»
Dans le rapport fait par la Commission des lois sanctionnant les travaux de la mise en place de la Commission ad hoc, certains députés ont relevé que les membres du Bureau de l’Assemblée nationale n’ont pas reçu copie du dossier transmis par le ministre de la Justice pour demander la levée de l’immunité parlementaire. Il en est de même des membres de la Commission des lois à qui il incombe de statuer sur la mise en place de cette Commission ad hoc. Présidente de la Commission des lois, Dié Mandiaye Ba a estimé que «la nature de la plainte contre X ou dirigée contre M. le député Ousmane Sonko importe peu pour la commission».
De même, la responsable de l’Apr à Nioro a rappelé qu’il n’appartenait pas à la Commission des lois «d’examiner l’affaire au fond, ni de se prononcer sur l’exactitude des faits encore moins sur la culpabilité ou non» de Sonko. En attendant de fixer la date de l’audition du leader des Patriotes, la Commission ad hoc a composé son bureau. Elle sera dirigée par Pape Birame Touré, député Benno bokk yaakaar. Le maire de Diakhao et membre de l’Apr aura comme premier 1er vice-président l’opposant, Moustapha Mamba Guirassy, qui a déjà affiché son soutien à Sonko. La deuxième vice-présidente s’appelle Dié Mandiaye Ba. Le jeune socialiste Mame Bounama Sall complète le bureau de la Commission ad hoc en tant que rapporteur.
Le journal Les Echos a révélé hier que Sonko a réuni mardi les députés qui le soutiennent, à l’Institut africain de management (Iam) de Moustapha Guirassy, pour peaufiner sa stratégie. L’opposant de 46 ans a déjà désigné Aïda Mbodj pour assurer sa défense le jour de l’audition. En prenant une telle mesure, le leader de Pastef semble être dans les dispositions de déférer à la convocation de la Commission ad hoc. Cette dernière fera un rapport qui sera examiné lors de la plénière, qui va entériner en dernier ressort la levée de l’immunité parlementaire de Ousmane Sonko.