Saliou Sarr, expert agricole, spécialiste en questions rizicoles, réagit ici par rapport aux productions record annoncées dans certaines spéculations pour battre en brèche les déclarations officielles. Pour lui, même dans deux ans, le Sénégal ne sera pas en mesure de réaliser l’autosuffisance en riz, telle que souhaitée par les pouvoirs publics. Et il explique une fois de plus ce qu’il considère comme la voie à suivre.
Vous avez entendu le président de la République dire que l’autosuffisance en riz était repoussée de 2017 à d’ici 2 ans maximum. Quel a été votre sentiment par rapport à cette déclaration.
C’était une déclaration de regret, en ce sens qu’il y a plus d’un an, dans votre journal en début 2016, je demandais au ministère de l’Agriculture et au gouvernement de s’arrêter pour faire, avec tous les acteurs de la filière, un bilan d’étape du Programme national d’autosuffisance en riz (Pnar) qui avait démarré en 2014. Et je disais que, pour ce programme d’autosuffisance en riz version 2 du ministre Pape Abdoulaye Seck, on pensait atteindre l’autosuffisance en 2017 au lieu de 2018 du Pnar de 2012 (du gouvernement du Pm Abdoul Mbaye), par un changement fondamental au niveau des hypothèses. Ce changement consistait à cibler la double culture pour le système irrigué. Par exemple, dans la vallée du Fleuve, le programme prévoyait en 2015, 120 mille ha (60 mille en contre saison, 60 mille en hivernage) ; en 2016, 130 mille ha (65 mille en hivernage, et 65 mille en contre saison) et en 2017, 140 mille ha à raison de 70 mille ha par campagne. C’est ce système irrigué qui devait donner 60% en termes de contribution à l’autosuffisance pour les 1,6 million de tonnes de paddy prévus, le système pluvial devant contribuer à hauteur de 40%. A partir d’un constat en 2016, que chaque fois, sur une période de 3 ans, on dépassait les 35 mille ha en contre saison, la campagne d’hivernage suivante baissait à des niveaux inférieurs à 30 mille ha. Après l’avoir constaté pendant 3 ans, j’ai attiré l’attention en disant, arrêtons-nous pour regarder pourquoi si on dépasse 35 mille ha en contre saison, les superficies en hivernage baissent. En se disant que nous sommes des humains, nous avons pensé en un certain moment que l’hypothèse de double culture pouvait régler le problème, mais on a constaté que malgré les efforts du gouvernement en termes d’achat de moissonneuses-batteuses, de tracteurs, de batteuses à riz, d’allègement au niveau du crédit, on n’est pas arrivé à régler le problème, faire la double culture dans le système irrigué. Je disais arrêtons-nous pour regarder le pourquoi ? Mais on m’a traité de politicien et le gouvernement a botté en touche. Aujourd’hui, je ne suis pas surpris, parce que je voyais après quatre campagnes la tendance d’emblavure au niveau de la vallée autour de 60 mille ha. Les résultats de 2016 montraient qu’on était effectivement toujours autour de 65 mille ha de surfaces emblavées, alors qu’on devait être à 130 mille ha. En 2017 pour les deux campagnes, on devait aller à 140 mille ha, on tourne toujours autour de 65 mille ha, avec une contre-saison qui est restée autour de 40 mille ha et une campagne d’hivernage qui baissa en deçà de 25 mille ha. Oui, je ne suis pas surpris, parce qu’on ne s’est pas arrêté, on n’a pas fait un bilan d’étape pour pouvoir corriger la marche des choses.
Vous avez attiré l’attention. Vous avez sonné l’alarme. Votre entretien dans Le Quotidien a eu beaucoup d’échos. Les gens reconnaissent votre expertise dans ce domaine. Qu’est-ce qui fait qu’ils n’ont pas voulu écouter votre signal ?
Dans un premier temps, ils n’ont pas voulu écouter, ils ont adopté la posture du politicien dans le mauvais sens. Mais après, je crois que dans la pratique, au cours de certaines réunions, notamment à la Primature, après qu’on ait constaté que les importations, au lieu de baisser, étaient en train d’augmenter (près de 800 mille T en 2015 et près de 900 mille T en 2016), le gouvernement s’est dit qu’il y avait quelque chose qui clochait. A partir de ce moment, même le président de la République, au cours d’un Conseil des ministres, a demandé que le bilan de l’autosuffisance en riz soit fait dans les meilleurs délais. L’organisation interprofessionnelle, le Ciriz, attend toujours ce fameux bilan. Ainsi, on peut dire qu’au début on a pensé que c’était un politicien qui parlait, mais après ils se sont rendu compte que les interpellations étaient réelles, objectives et fondées. Oui, après les autorités ont fait attention, mais elles n’ont pas pris les décisions idoines, en ce sens que le ministère de l’agriculture a continué à avancer des statistiques de production surréalistes, entre 900 mille et un million de tonnes de paddy, avec près de 400 mille tonnes dans la vallée et près de 600 mille tonnes au niveau du système pluvial.
La plus haute autorité avait compris l’interpellation et avait demandé un bilan, mais le ministère de l’Agriculture est resté dans sa stratégie de communication de politique politicienne, en donnant de fausses statistiques et en affectant 600 mille tonnes de paddy au système pluvial, c’est-à-dire près de 350 mille tonnes de riz qu’on ne voit nulle part, dans aucune boutique du territoire national. Oui, si l’on avait fait 1 million de tonnes de paddy, cela veut dire qu’on a, au moins, 600 mille tonnes de riz blanc. Non, on ne peut pas avoir 600 mille tonnes de riz blanc produit au Sénégal et que les importations continuent à être autour de 850 mille tonnes dans ce pays, soit un total général de 1 million 450 mille tonnes de riz blanc alors que les besoins nationaux en riz sont estimés à 1 million 050 mille tonnes de consommation.
Au ministère, on parle de problème de distribution avec les négociants qui ne veulent pas acheter le riz local…
C’est inexact ! Aujourd’hui, on voit de moins en moins du riz sénégalais en mévente. Il n’y a plus de problème de mévente de riz blanc de la vallée. Aujourd’hui, au contraire avec le système mis en place par le ministère du Commerce, cette plateforme de commercialisation, on dit que quiconque a du riz blanc n’a qu’à le mettre à disposition et les importateurs et commerçants sont prêts à l’acheter. Mais aujourd’hui, on n’arrive pas à fournir suffisamment de riz à cette plateforme, donc aux commerçants et importateurs sénégalais.
D’ailleurs, je voudrais revenir sur les 600 mille tonnes de riz paddy produites par le système pluvial. Le ministère de l’Agriculture ne se rend pas compte des statistiques qu’il donne. Parce que si on avait fait 600 mille tonnes de riz paddy dans le système pluvial, on aurait vu le riz pluvial quelque part dans les boutiques du Sénégal. De plus, 600 mille tonnes de riz paddy produites par les 8 régions que sont Ziguinchor, Sédhiou, Kolda, Tambacounda, Kédougou, Fatick, Kaffrine et Kaolack, soit au moins 350 mille tonnes de riz blanc, permettent à ces dernières d’être autosuffisantes. En effet, avec la norme de consommation de 75 kg de riz par personne et par an, ces 8 régions qui font une population d’environ 4,7 millions de personnes n’ont qu’un besoin de consommation de près de 350 mille tonnes de riz blanc. Oui, cela veut dire que ces régions sont autosuffisantes. Alors qu’aujourd’hui, quand on se rend dans ces zones, partout, dans toutes les boutiques, c’est du riz importé qui est vendu. Cela veut dire que le ministère de l’Agriculture ne se rend pas compte des problèmes que posent les statistiques avancées. Dans tous les cas, le ministère est encore dans la communication politique. Ce qui est réel, c’est que dans cette zone pluviale, on n’a pas encore atteint 140 mille ha emblavés pour ces 8 régions. Même avec 150 mille ha donnant un rendement moyen de 1,5 tonne par ha, la production totale moyenne annuelle serait de près de 225 mille tonnes de paddy et non les 600 mille tonnes annoncées.
L’Anambé a combien d’hectares ?
L’Anambé, c’est actuellement près de 6 000 ha. Ce sont les 3 régions de la Casamance qui ont un potentiel de 146 mille ha en termes surtout de terres de plateau et de terres de bas-fond. Mais aujourd’hui, par rapport aux contraintes d’aménagement dans les bas-fonds et de fourniture de semences adaptées pour le plateau, certainement le grand bond en termes d’emblavures en Casamance, c’est autour de 110 mille ha. Rappelons que les 5 autres régions, Fatick, Kaolack, Kaffrine, Tamba et Kédougou, ont un potentiel rizicole estimé à près de 35 mille ha. Voilà la réalité et la vérité, la grande région de la Casamance naturelle et les 5 régions ci-dessus ne font que près de 140 mille ha d’emblavure, avec un rendement moyen d’environ 1,5 tonne par ha. Et c’est vraiment, avec l’hypothèse la plus optimiste possible, on n’a pas atteint l’autosuffisance en 2017. C’était prévisible depuis 2 ans. Les autorités n’ont pas suivi les interpellations des acteurs. Pourtant, Dieu sait qu’il est possible d’y arriver en changeant les hypothèses, avec plus de concertation, d’organisation et de méthode dans la mise en œuvre.
Maintenant, les autorités poussent vers 2019. Pensez-vous que ce délai est raisonnable et qu’il est possible de le tenir ?
Avec ce que nous venons de vivre, non, ce délai n’est pas réalisable. D’autant plus que le gouvernement ne favorise pas la vraie concertation avec tous les acteurs, n’accepte pas de discuter des véritables réalisations, de voir les véritables contraintes rencontrées afin de pouvoir, avec les acteurs comme locomotive, lever ces dernières et avancer vers un horizon plus réaliste. Je ne pense pas qu’on puisse d’ici deux ans faire le bilan, identifier les contraintes et amener les solutions idoines pour pouvoir réaliser en 2019 l’autosuffisance. Je pense que le gouvernement du Sénégal devrait s’aligner sur l’objectif de 2025 comme les autres pays africains, revoir les hypothèses, discuter avec les acteurs, aussi bien producteurs, commerçants, industriels et autres partenaires comme les banques, etc. et les pousser à arrêter des niveaux d’emblavure et de progression soutenables et réalistes qui puissent sur 7 ans arriver à l’autosuffisance qui est bien possible.
Quelle est, pour vous, la plus grande contrainte à cette autosuffisance au Sénégal ?
Les plus grandes contraintes sont au niveau des terres aménagées, au niveau des financements adaptés pour l’investissement et les fonds de roulement, au niveau de la disponibilité des semences certifiées dans le système pluvial et de la maîtrise de la transformation industrielle, etc. On pensait régler le problème des superficies par une double culture, mais on s’est rendu compte que ce n’était pas la voie la plus indiquée. Il faut donc aujourd’hui choisir une voie où on va augmenter les superficies aménagées. Cela va coûter de l’argent, plusieurs milliards. C’est une grosse contrainte parce qu’il faut faire des dossiers techniques et chercher de l’argent. Après les superficies, le financement. Il faut le financement de la production et le financement de la collecte et de la commercialisation. Cela demande plusieurs dizaines de milliards. Et ça doit être lié à la capacité d’endettement des petits producteurs. Aujourd’hui, il y a beaucoup de grandes rizeries qui commencent à s’installer, mais ces industriels qui s’installent sont confrontés à des problèmes de fonds de roulement pour pouvoir acheter, et la matière première et avoir un fonds de roulement pour faire fonctionner leur outil industriel. Si ces contraintes sont identifiées et levées au niveau de la production, au niveau de l’organisation de la collecte, au niveau de la transformation, on pourrait avec une production bien transformée arriver à fournir beaucoup de riz blanc et renverser les tendances des importations.
Vous mettez l’accent sur les petits producteurs, mais on a vu que l’Etat a choisi à un moment l’option de l’agro-industrie. On a vu que malheureusement ou heureusement ils ont renoncé à l’attribution de terres à une entreprise marocaine dans le Nord à Demète et à Dodel. Est-ce que l’option de l’agro-industrie ne pourrait pas permettre à l’Etat d’atteindre plus vite cette autosuffisance ?
En matière de perspective de développement, je ne crois qu’au concret, sur quelque chose sur laquelle je peux mettre le doigt. On dit l’agro-industrie, je veux bien. Mais qu’on me donne des expériences d’agro-industrie sur le riz qui ont marché et qui puissent constituer une alternative.
Il n’y en a pas ?
Je n’en vois pas. Dans la vallée, sur une période de 20 ans, 30 ans, je ne vois pas un modèle d’agro-industrie qui constitue une alternative crédible. Ce que j’ai vu comme expérience, qui puisse constituer une bonne perspective, c’est cette politique d’aménagement collectif au niveau des villages, des terroirs locaux. L’Etat aménage et fait une rétrocession aux organisations paysannes. Je veux parler de l’expérience de la Fédération des périmètres autogérés. Ce sont des périmètres qui ont été réhabilités et transférés aux organisations paysannes à partir des années 1990. Et depuis 1990, l’Etat n’y a plus mis un sou. Et ces périmètres existent, font les rendements moyens les plus élevés et produisent même l’essentiel de la production rizicole de la vallée.
C’est-à-dire que ça fait au moins 27 ans que ces aménagements sont gérés par les organisations paysannes, par les producteurs. Ces aménagements vont chaque année en campagne de riz et font l’essentiel de cette production dans la vallée. Voilà un modèle qui peut être proposé comme perspective dans toute la vallée. C’est-à-dire aujourd’hui, l’Etat du Sénégal devrait pouvoir généraliser cela dans la Moyenne vallée et la Haute vallée, c’est-à-dire dans le département de Podor et la région de Matam, où il reste encore beaucoup de superficies non aménagées. Au lieu de donner 8 000, 10 mille hectares à des Marocains, il s’agit d’aménager des périmètres collectifs, en fonction de la réalité des terroirs villageois, tout le long de la vallée du fleuve Sénégal et gérés par des producteurs dans des organisations paysannes professionnelles. Moi, c’est ça que je vois comme perspective. Mais bon, la Css (Compagnie sucrière du Sénégal. Ndlr) avait tenté de faire du riz même avec des rendements moyens de 10 tonnes par ha, mais elle n’a pas continué. Pourquoi ?
Sen huile qui est un agro-industriel qui devait faire du tournesol sur 25 mille ha est finalement orienté vers le riz, mais sur moins de 2 000 hectares, donc plus orienté vers un accaparement des terres qu’autre chose. Donc, je ne vois pas de modèle d’agro-industrie qui puisse être véritablement une proposition d’alternative. Parce que ces petits paysans, aujourd’hui dans ces périmètres collectifs aménagés par l’Etat et rétrocédés, arrivent à faire des rendements moyens de 6 tonnes à l’hectare par campagne. Cela fait partie des rendements les plus élevés au niveau mondial. Ainsi, en termes de productivité agricole, je pense qu’on doit les féliciter et les encourager.
L’agro-industrie ne fait-elle mieux nulle part ?
Ah non ! Mais regardez, sur 27 ans, ces aménagements collectifs autogérés arrivent régulièrement à des niveaux de rendements élevés qui les mettent dans le trio de tête en termes de rendements au niveau mondial. Il y a le Japon, les Etats-Unis, et après ce sont les Sénégalais à travers les périmètres transférés. Aujourd’hui, avec ces niveaux de rendements moyens, on est plus performant que les Asiatiques qui sont les plus grands producteurs de riz au niveau mondial. Donc, il n’y a pas de doute, ces petits producteurs sont productifs et rentables, et l’évolution de la compétitivité du riz sénégalais dans toutes les études, ces dix dernières années, démontre cela à suffisance.
Mais par rapport aux chiffres que vous donnez, nous avons un spécialiste de riz comme ministre de l’Agriculture. Pourquoi persiste-t-il à mettre en avant le système de production agro-industrielle ?
Je ne sais pas. Allez lui demander ! Moi, je ne peux croire qu’aux expériences concrètes vécues au Sénégal. Comme disait l’autre, «Grise est la théorie, vert est l’arbre éternel de la pratique !»
Quand l’Etat a parlé d’autosuffisance, il a parlé du riz, il a aussi parlé de l’arachide. Cette année par exemple, on nous a présenté des chiffres de production record. Dans le même temps, on nous apprend que des entreprises industrielles ont des difficultés pour acquérir les grains. Qu’est-ce qui peut expliquer cela ?
En tout cas, ce qu’on constate depuis quelques années, c’est que le ministère de l’Agriculture annonce des records dans toutes les productions agricoles. Sur le riz, on vient de faire des records, sur l’arachide c’est pareil. Oui, concernant l’arachide, on a fait un record historique. D’ailleurs depuis 2 ans, on fait des productions supérieures à 1million de tonnes d’arachides, mais dans la pratique, où est passée cette arachide-là ? Essayons de retracer la production ! L’année dernière, les achats des industriels étaient près de 180 mille tonnes, les exportations estimées à près de 200 mille tonnes, l’autoconsommation estimée à 250 mille tonnes et toutes les semences confondues à près de 150 mille tonnes, soit un total de production de 780 mille tonnes. Cela, par rapport au 1 million 100 mille tonnes annoncées. Question : Où est le reste de la production qui fait 320 mille tonnes ? Ce sont des pertes post-récoltes, nous dit-on. Si tel est le cas, c’est très, très grave, parce que c’est une perte de près de 67 milliards de F Cfa pour les producteurs agricoles. Voilà le danger de gonfler des statistiques. Parce qu’à un certain moment, on se retrouve avec des difficultés. Dans un pays sous développé comme le Sénégal, dont l’agriculture dépend essentiellement de l’arachide, quand on fait des pertes post-récoltes de près de 70 milliards, normalement son ministère d’Agriculture ne devrait se concentrer que sur l’éradication de ce fléau. Cette année, le même problème risque de se poser avec les 1 million 400 mille tonnes annoncées, doublé de tous les problèmes de commercialisation où les industriels peinent à mobiliser des financements de collecte, mettant les paysans dans une situation très difficile de sans revenus.
Oui, mais n’est-ce pas parce qu’ils n’ont pas d’argent, ou est-ce parce qu’ils ne trouvent pas le produit ?
Le produit est là, c’est le manque d’argent des industriels et des Opérateurs stockeurs (Ops) qui est une réalité du terrain.
Etes-vous sûr que la production est là et suffisante ?
Cette année la production est là. Elle est largement meilleure que l’année dernière, mais ces industriels ont toujours des problèmes d’argent. La preuve, Cait et Wao viennent de démarrer, sinon on n’avait que Sonacos et Copeol. De même, les Chinois et exportateurs ont tardé à venir. Avec les taxes qui viennent d’être suspendues, on verra quel sera leur achat. En tout cas, leur meilleure performance, c’était autour de 200 mille tonnes. Souhaitons qu’ils achètent plus de 200 mille tonnes, que les industriels arrivent à acheter 200 mille tonnes, cela va faire au moins 400 mille, soit au moins 80 milliards de F Cfa pour le monde rural.
Vous contestez les chiffres officiels. Mais souvent, le gouvernement, au niveau du ministère de l’Agriculture, dit que leurs chiffres sont confirmés par les statistiques de la Fao et des organisations spécialisées internationales ?
Il n’y a pas d’organisation internationale spécialisée qui donne des statistiques dans les pays. La Fao, comme les autres institutions internationales, prend ses statistiques au niveau des pays, la base c’est bien les pays, c’est leur souveraineté.
Donc les statistiques de la Fao, ce sont les statistiques du Sénégal ?
Au Sénégal, on cite des statistiques d’après l’Agence nationale de la statistique et de la démographie du Sénégal (Ansd). S’il y a des problèmes de statistiques, c’est au niveau sénégalais. Au contraire, ces autres institutions, à partir d’informations croisées, peuvent se poser des questions, mais la production des statistiques reste une prérogative du pays. Ainsi, je répète, ces institutions peuvent se poser des questions, mais elles ne peuvent pas produire de statistiques pour le pays. Rappelez-vous, il y a un an, le Premier ministre a dit que des statistiques fiables se posaient avec acuité dans ce pays et qu’il fallait faire des réglages afin de trouver une solution. Mais on n’a toujours pas réglé ce problème-là. Encore, aujourd’hui, on est en train de jouer sur ces statistiques pour gonfler les productions du Sénégal. Et quand on gonfle les productions, on gonfle la richesse, donc on gonfle le taux de croissance. Véritablement, c’est un problème très sérieux. Je pense qu’on devrait revenir sur cela et prendre toutes nos responsabilités pour saisir le taureau par les cornes. On souhaite produire beaucoup de richesses pour le pays, mais je pense que ce n’est pas une honte de faire 900 mille tonnes d’arachides et de montrer qu’on a fait 900 mille tonnes. Je pense que si on fait réellement 900 mille tonnes d’arachides et ces 900 mille tonnes soient véritablement bien achetées chez les producteurs, c’est beaucoup de revenus dans le monde rural. Il ne sert à rien d’aller à 1 million 400 tonnes qui n’existent pas et que personne n’aura ni vu ni acheté.