Avancée – Adoption de la loi sur l’accès à l’information : Une loi pour tous les citoyens

Après 15 ans de plaidoyer, le projet de loi sur l’accès à l’information a été examiné et adopté en Conseil des ministres, ce mercredi. Cette avancée, portée par le nouveau régime, consacre enfin un droit d’accès formel à l’information publique pour tous les citoyens sénégalais.Par Ousmane SOW –
Le Sénégal adopte enfin une loi attendue depuis 15 ans. Et la nouvelle a été accueillie avec soulagement par les acteurs du plaidoyer. «C’est une bonne nouvelle, parce que les gens portaient ce plaidoyer depuis 15 ans. Depuis 2010, il y avait le Forum civil, Article 19, l’Institut Panos, mais aussi les organisations de presse», se réjouit Birame Faye, coordonnateur de l’Institut Panos Afrique de l’Ouest, joint par Le Quotidien. Adopté et examiné en Conseil des ministres ce mercredi, ce texte pourrait enfin consacrer un droit fondamental longtemps ignoré au Sénégal. Autrement dit, tout Sénégalais pourra exiger dans un cadre juridique clair, des rapports, données, décisions administratives, tant que ceux-ci ne sont pas classés confidentiels. Et cette loi, précise Birame Faye, ne concerne pas uniquement les journalistes. Elle s’adresse à tous les citoyens sénégalais, en leur donnant la possibilité de demander, par écrit, des informations à l’Administration publique, dans un délai maximum de 15 jours. «Ce n’est pas une loi pour la presse. C’est une loi pour tous les citoyens sénégalais, pour demander des informations et données publiques communicables. Il n’y a pas de distinction ou de disposition particulière pour qui que ce soit», précise-t-il. Cependant, la véritable avancée de cette loi réside dans la contrainte juridique qu’elle impose à l’administration. Jusqu’ici, rien ne forçait l’Administration à répondre aux demandes des citoyens. Ce vide est désormais comblé. En cas de refus injustifié, un recours pourra être introduit devant une Commission nationale d’accès à l’information. Cette dernière pourra saisir l’administration concernée, avec à la clé des sanctions administratives et pénales en cas de non-respect. «La valeur ajoutée, c’est que l’administration sera obligée de répondre aux citoyens qui ont fait la demande. Et dans un délai précis. Maintenant, si l’administration refuse de communiquer une information communicable, le citoyen aura la possibilité de déposer un recours, parce qu’il y aura une Commission nationale d’accès à l’information. Et la commission va saisir cette administration pour lui dire qu’il y a quelqu’un qui avait demandé telle information, il faut la lui donner», explique le journaliste. Avec cette adoption, le Sénégal devient probablement le 12e pays d’Afrique de l’Ouest à se doter d’un cadre légal garantissant l’accès à l’information publique.
Un combat de longue haleine
De son côté, Birahim Seck, coordonnateur du Forum civil, estime qu’il y a lieu de saluer l’adoption de cette loi, mais tout de même reste prudent. «Il faut saluer l’adoption de cette loi. C’est une avancée», reconnaît-il. Mais il tempère aussitôt : «Pour savoir ce qui va changer, il nous faut voir la mouture, afin de pouvoir apprécier non seulement le contenu, mais aussi la portée du texte.» Le coordonnateur du Forum civil rappelle que cette loi est un levier pour la redevabilité, et qu’elle ne concerne pas seulement les organisations de la Société civile ou les journalistes, mais bien l’ensemble des citoyens. Pour Moustapha Cissé, Secrétaire général du Syndicat des professionnels de l’information et de la communication du Sénégal (Synpics), l’adoption du texte est perçue comme une victoire d’étape, à condition que le contenu final respecte les attentes exprimées depuis des années. «Il faut attendre de voir ce qu’il y a dans le texte d’abord. Mais si réellement ça a été adopté comme nous l’avions souhaité depuis très longtemps, notre réaction ne peut être que positive», réagit Moustapha Cissé. Le syndicaliste rappelle que le Synpics, en lien avec d’autres organisations, notamment le Forum civil, a souvent plaidé pour cette loi. «Moi-même, je me souviens d’un atelier avec le Forum civil concernant la loi sur l’accès à l’information. Donc, si réellement c’est avéré, il faut vraiment s’en réjouir», dit-il.
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