Babacar Mbaye Ngaraf dénonce l’arrêt du programme déguerpissement-recasement des populations de la banlieue victimes des inondations. Le président de l’Alliance sauver le Sénégal, un moment membre de la Génération du concret, estime qu’au nom de la continuité de l’Etat, Macky Sall doit poursuivre le plan Jaxaay. Il parle aussi de la hausse du prix de l’électricité et de l’interdiction des manifestations.
Où en êtes-vous avec le programme déguerpissement-recasement des populations de la banlieue victimes des inondations ?
Il y a une situation d’injustice et d’indifférence que vivent certaines populations de la banlieue suite aux inondations. Pour venir à bout des inondations dont l’ampleur commençait à inquiéter les Sénégalais, le Président d’alors, Abdoulaye Wade, avait pris des mesures fortes avec un programme d’éradication des inondations. Lequel programme avait consisté à un déguerpissement-recasement avec la reconstitution du milieu naturel des eaux. Tout cela, dans un plan prioritaire appelé plan Jaxaay. Il y avait plan d’action prioritaire contre les inondations qui s’articulait autour de deux axes majeurs, à savoir de déguerpissement-recasement des populations dans des zones non aedificandi. Et le recasement de ces populations dans un nouveau site appelé «Jaxaay». Cette politique déguerpissement-recasement concernait près de 3 000 familles. Donc à partir de 2006, les maisons ont été démolies, les populations qui y habitaient ont été déplacées vers Jaxaay qui abritait les nouveaux logements de recasement. Le processus a suivi son cours jusqu’en 2012. Le pouvoir a changé de camp. Depuis lors, c’est l’abandon total. Mais le pouvoir actuel pense que c’est un programme avec un soubassement politique. Le plan Jaxaay n’était pas celui du secrétaire général du Pds, mais celui du Président du Sénégal qu’était Abdoulaye Wade. L’Etat étant une continuité, Macky Sall doit poursuivre le plan Jaxaay jusqu’à terme. Aujourd’hui, il y a plus de 300 familles qui ne sont pas encore logées depuis que Macky Sall est arrivé au pouvoir, les travaux étant abandonnés. L’hôpital qui était en cours de construction à Jaxaay, qui devrait profiter à 3 000 familles, qui a englouti beaucoup de milliards, est laissé à la merci des malfrats. En prenant le programme des 100 mille logements, Macky Sall devrait penser à construire les 300 logements des victimes d’inondations, car c’est l’Etat qui a démoli leurs maisons. Et d’ailleurs, il y en a qui bénéficient de logements sur le site de recasement alors qu’ils n’en ont pas le droit. Nous souhaitons qu’une enquête soit diligentée pour situer les responsabilités.
Quelle lecture faites-vous des manifestations contre la hausse du prix de l’électricité ?
L’actualité politique est marquée par la reprise du pouvoir par les citoyens sénégalais. Ces derniers avaient laissé ce combat à la classe politique. Mais depuis l’histoire du pétrole, ce sont des Sénégalais regroupés au sein d’organisations citoyennes comme Aar li ñu bokk et récemment Noo lank Noo bagn qui se sont levés pour réclamer justice et dénoncer la hausse de l’électricité. Malgré l’interdiction des manifestations, les gens continuent à se battre. Maintenant, nous déplorons l’absence de la classe politique traditionnelle qui, en lieu et place d’une participation active à ce combat citoyen, accorde tout leur temps au dialogue national que je préfère appeler deal national.
Certains pensent que Macky Sall chercherait à briguer un troisième mandat. Est-ce votre avis ?
Macky Sall n’a jamais tenu parole. Toutes les promesses qu’il avait faites concernant son mandat de 5 ans, les 500 mille emplois, la patrie avant le parti, qu’il ne protégerait personne… sont restées de simples slogans. Maintenant, s’agissant du débat sur un éventuel troisième mandat, je rappelle qu’il fut un temps l’Afrique était caractérisée par des coups d’Etat. Il y a une certaine stabilité parce que les gens ont dépassé ce stade-là. Aujourd’hui, c’est le coup d’Etat par la Constitution qui existe. C’est une avancée démocratique dont on devrait se féliciter. J’avoue que Macky Sall m’a souvent surpris. La dernière fois, c’était sa sortie sur le troisième mandat où il a fait dans le clair-obscur à travers un «ni oui ni non». C’est extrêmement dangereux. Ce qu’on demande à Macky Sall, c’est de dire ce que la Constitution dit, c’est-à-dire qu’il fait ses deux mandats et qu’il quitte. Il ne faut pas lui donner l’occasion de parler de troisième mandat en lui faisant croire que c’est possible.